Annaba affiche les couleurs et les goûts de la fête durant ce dernier jour du mois de Ramadhan. Pour les femmes bônoises, la tâche n'est pas encore finie. Après les soucis de la table du f'tour, les vêtements de l'Aïd pour les enfants, viennent ceux liés à la préparation du «hlou», qui veut dire «sucré» et qui désigne les gâteaux de l'Aïd El Fitr. Les espaces qui vendent les gateaux et confiseries ne manquent pas à Annaba. Mais une bonne partie des familles préfère faire, elle-même, ces gâteaux, dont les secrets sont connus pour les Bônoises et qui font plaisir, à la fois, aux petits et aux grands. «Baklawa El Bey», «Baklawa turque», «Ghraiba aux amandes», «Sablés», «Samsa aux noix et noisettes» et «Taminette Elouze». Toutes ces variétés de gâteaux ne sont pas disponibles chez les pâtissiers, car tout simplement leurs recettes sont jalousement gardées secrètes par certaines familles annabies. En somme, cette variété de gâteaux traditionnels sont la spécificité des familles bônoises, et ne peuvent se trouver nulle part ailleurs. Si ils sont préparés à la maison, ces derniers nécessitent également des dépenses car leurs ingrédients (amandes, pistaches, noisettes...), sont souvent coûteux pour certaines familles aux revenus moyens. Hassiba, 54 ans, mère de quatre enfants se contente de fabriquer du «makroudh aux dattes, de la ghraïba aux pois chiches». Ces variétés sont, selon elle, abordables et suffisantes pour garnir la table de l'Aïd. «L'essentiel est de célèbrer la fête de l'Aïd», nous dit-elle, répétant l'adage «Koul kdir w kadrou». Bien sur, c'est «chacun selon ses moyens» que les familles à Annaba célèbrent la fête de la rupture du jeûne. Car, il faut savoir que nombreuses sont les familles qui ne parviennent ni à acheter ni à préparer elles-mêmes leurs gâteaux. Cette situation est imputée à la hausse des prix des ingrédients à la base desquels sont fabriqués les gâteaux de l'Aïd. Une petite tournée dans les magasins de vente de ces produits de base, pour la confection de gâteaux traditionnels, donne un aperçu sur ces prix, inaccessibles pour la majorité des familles. Les indétrônables amandes et noix dont les prix ont toujours été entre 1800 et 1900 DA. Les autres ingrédients, noisettes, pistaches, pignons et noix de cajou, leurs prix varient entre 2000 et 3500 DA. A ces prix-là, les familles s'orientent vers les pâtisseries, pour acheter selon les moyens, une ou deux variétés de gâteaux. D'autres passent la commande de plusieurs sortes de gâteaux, estimant que leur confection revient au même prix. Roumaïla, rencontrée dans une des pâtisseries huppées de Annaba a payé 37 000 DA, pour une variété de gâteaux. «Je travaille, et puis cela revient au même prix, les ingrédients, fruits secs, farine, sucre, colorants et beurs entre au- tres coûtent cher, alors je préfère les acheter tout faits tout prêts», nous dit-elle, en mettant en avant le facteur temps et effort. En effet, à Annaba quand il s'agit de gâteaux traditionnels, il y en a pour tous les goûts. On y trouve même des variétés d'origine turque, syrienne, tunisienne, marocaine et libanaise, qui se vendent dans plusieurs pâtisseries. Un commerce qui ne peut en aucun cas remplacer les coutumes et traditions. Pour les uns, la fabrication de pâtisserie à la maison est une des occasions pour réunir les membres de la famille et raffermir les liens entre les parents et proches. Pour les autres, fabriquer les gâteaux à la maison permet d'éviter l'achat de pâtisserie contrefaite, notamment au cours de cette période marquée par une grande demande et une fièvre acheteuse spectaculaire. Entre les uns et les autres, il y a la majorité qui estime que l'essentiel dans ces moments de fête demeure la célébration de l'Aïd El Fitr et la préservation des coutumes et traditions. Ces dernières demeurent de véritables rituels dont les familles bônoises continuent de perpétrer leur préservation malgré les dépenses.