Une vue de Tébessa On veut les mettre dans un pensionnat à Tébessa situé à 15 km du chef-lieu de la wilaya, plus exactement au lieudit Békaria. La nouvelle a été foudroyante, accablante et injuste pour ces enfants assistés. Privés de la chaleur familiale, d'amour et de tendresse de parents, ils doivent encore subir les affres de décisions abusives. On veut les déraciner de leur lieu de naissance pour les dessaisir encore de leur entourage habituel, là ou ils sont nés et grandis. Agés de 8 à 17 ans pour les mineurs et de 18 à 21 ans pour les trois aînés qui n'ont pas encore bénéficié de logement comme l'indique la loi, ces victimes dont le tort est d'être nés sous X sont indésirables. La société n'a rien à en faire, il faut donc les marginaliser et les écarter du paysage. Après les avoir transférés une première fois de leur foyer pour enfance assistée situé à Ziadia, aujourd'hui on veut les jeter dans un pensionnat à Tébessa situé à 15 km du chef-lieu de la wilaya, plus exactement au lieudit Békaria. Qui a pris cette décision? Au profit de qui? Et pour quelle raison? Des questions dont on a tenté d'obtenir les réponses auprès des personnes concernées, cependant l'énigme de ce transfert reste sans réponse. Mais avant d'aller plus loin revenons sur l'historique de ces enfants. Pour des raisons de sécurité, les pouvoirs publics locaux avaient jugé bon de les transférer à El Hamma depuis Ziadia. Ils seront placés dans une maison pour les personnes âgées, où ils occuperont une partie des lieux. Le prétexte de sécurité semblait convaincre tout le monde. Les enfants faisaient souvent l'objet d'agression de leurs aînés. Le foyer de Ziadia servira à autre chose. Seulement voilà que sur décision ministérielle, selon le directeur de l'établissement, installé il y a quelques mois, ces enfants sont menacés d'être placés dans une ville qu'ils ne connaissent pas, dont le foyer devait être fermé pour une affaire de pédophilie. Ce centre accueille des pensionnaires âgés de 6 à 19 ans et dont leur histoire a provoqué un élan de condamnation. Des enfants étaient abusés par le directeur du centre. L'affaire avait été traduite en justice et le directeur a été condamné a une peine de prison. Il a été également question de la fermeture de ce centre. Par miracle, il est toujours fonctionnel, sachant que sa situation donne froid dans le dos du fait que la région connaît tout genre de trafic. La question de ce centre a été soulevée avec Mohamed Chérif Zerguine, militant des droits de l'enfant, à l'origine sur la loi de la reconnaissance de paternité par ADN. «C'est quand même aberrant de vouloir déraciner des enfants pour les lâcher et je pèse mes mots dans un lieu isolé où la mafia de la contrebande fait sa loi», confie notre interlocuteur avant d'ajouter «je n'exagère pas en disant que ces enfants finiront dans le grand banditisme». Outré, notre interlocuteur assure de sa volonté de faire toute la lumière sur ce transfert abusif. Cette enfance assistée demeure comme un jouet sans importance at-il souligné, ajoutant «depuis la réquisition du foyer colonial devenu ensuite une école de police, ces enfants ont toujours émergé au niveau de leur foyer à Ziadia, maintenant on les traite comme des objets en les déplaçant d'un milieu à un autre, sur le plan psychologique ces victimes perdront à coup sûr leurs repères et peuvent se transformer en de véritables bandits». Pour sa part, le directeur du foyer dit avoir tout fait pour maintenir ces enfants dans la stabilité en faisant le va-et-vient vers Alger 13 fois, mais en vain. Selon lui, il n'a rien pu faire et considère ces enfants dont plusieurs sont handicapés comme sa propre famille. Des dires, cependant, contredits par le témoignage de l'un des pensionnaires qui l'accuse d'être à l'origine de cette initiative. Pour notre témoin, un enfant handicapé qui a décidé de prendre la défense de ses «petits frères» au nombre de 18 avec l'assistance d'une association, c'est le directeur lui-même qui n'a pas cessé de les menacer, n'écartant pas la «complicité de la DAS», que malheureusement, nous n'avons pas pu interroger, malgré toutes nos tentatives. D'ailleurs, on nous a fait savoir que nous n'avons pas le droit d'approcher les enfants et que c'était strictement interdit même pour les associations. Notre témoin parle du «traitement inhumain dont ils font l'objet, les insultes et les châtiments qu'ils encaissent de la part même des éducateurs». Il ajoute avec beaucoup de regrets les larmes aux yeux, «on vit dans des conditions pénibles, on nous traite comme de vulgaires voyous. Qui souhaiterait ça à ses enfants?». Néanmoins, le pensionnaire que nous avons pu rencontrer souligne avoir été reçu jeudi matin par le chef de cabinet du wali et que ce dernier a lui-même contacté la directrice de la DAS qui lui a fait la promesse de voir avec le ministère. Le wali de Constantine semble avoir pris l'affaire en main et selon les dernières informations la ministre va réagir en faveur de ces enfants.