La révolte commence par la transmission d'un message de mise en garde remis à Marcus Tiberius, chevalier romain, propriétaire terrien, l'un des plus riches de Mascula (actuelle Khenchela). C'est un livre d'histoire romancée, très intéressant, se basant sur des faits historiques liés à la révolte du peuple numide (amazigh) contre l'empire romain. Cela se passe durant la colonisation romaine de l'Afrique du Nord, au début de l'ère chrétienne, à partir du IIIème siècle. La convoitise de cette partie de l'Afrique, de ses richesses agricoles et minières a incité Rome à installer des colonies, exhéréder le peuple autochtone et lui faire subir un esclavage des plus pervers et inhumains. Cela se passe après les règnes de Massinissa et de Jugurtha qui ont posé les jalons d'une nation, quasiment au sens moderne du terme: état central, développement de l'agriculture, frappe de monnaie, etc. La colonisation et la dépossession des autochtones numides de leurs terres fertiles a été une chose courante du point de vue de Rome. L'asservissement et l'esclavage ont été pratiqués à l'échelle de toute l'Afrique du Nord. C'est mal connaître ce peuple vaillant qui ne se laisse pas dominer facilement, pour dominer. Ces pratiques éveillent les consciences. La riposte commence à s'organiser, à travers des regroupements de simples «sujets» qui se révoltent contre leurs maîtres, les colons. La révolte commence par la transmission d'un message de mise en garde remis à Marcus Tiberius, chevalier romain, propriétaire terrien, l'un des plus riches de Mascula (actuelle Khenchela): «Tu as volé nos terres, tu vis dans l'opulence alors que nous avons faim... cesse de te conduire en tyran, libère tes esclaves, distribue ta fortune aux pauvres, le règne du diable finira bientôt grâce aux soldats de Dieu...» (signé: les Saints). Ils se nomment comme cela et on les nomme aussi les Circoncellions car ils attaquent les domaines en groupes fermés (cercles). L'effet déclencheur est lié aux avantages que s'octroient des Romains et leurs alliés: les meilleures terres sont prises par les colons, la dîme et les impôts augmentent chaque jour, les prêts et l'usure atteignent les 100% d'intérêts. Cela devient intolérable. Le peuple s'organise et se révolte.Le mouvement prend de l'ampleur et se développe en tache d'huile. En cette période, le peuple numide n'est pas très christianisé. Le christianisme s'est un peu développé dans les plaines mais est très rare dans les campagnes et les montagnes habitées par des paysans pauvres qui refusent les exactions et les humiliations que leur font subir les colons.La révolte continue par des harcèlements de colons et de leurs suppôts que sont les Numides de la classe moyenne et bourgeoise. La lutte oppose les partisans de l'indépendance et les collabos, les pauvres et les riches et les oppresseurs, et les oppressés. Le pouvoir de Rome durcit la riposte. Il sévit de façon très dure et sanglante. Le clergé chrétien commence à se fissurer et deux groupes se sont distingués. Il y a eu alliance entre les Circoncellions et les religieux regroupés autour de Saint-Donat qui réfute les méthodes colonialistes et le clergé affilié à Rome. L'union a été consacrée autour d'objectifs nationalistes et non religieux. L'alliance est d'ordre de combat pour lutter contre Cécilien qui a eu le feu vert pour mater la résistance avec Anulin, proconsul d'Afrique.L'Eglise africaine commence à se constituer et à s'émanciper de l'Eglise romaine qui justifie toutes les exactions commises par les colons. Saint-Augustin, lui-même Numide lettré, intellectuel, soutient Rome et les colons. Il critique et condamne même la révolte des Circoncellions. Tertullien et Pertilien soutiennent les paysans numides dans leur lutte contre Rome. Pour ces derniers, les soutiens de Rome et des colons sont des traditeurs (traîtres). Les purges commencent par l'intermédiaire de l'empereur Dioclétien. Une répression féroce embrase l'Afrique du Nord. Les tribus s'organisent contre Rome. Un appel aux armes est venu du plein coeur du Djurdjura (en 253). Les montagnards, relativement loin des exactions colonialistes, n'ont pas été sourds aux appels des plaines. L'écho a été entendu dans la vallée de la Soummam, à Auzia (Sour El Ghozlane en 255), à Zuccabor (Miliana), à Milev (Mila) et à Altava (près de Tlemcen). Ainsi, Fraxen, initiateur de l'appel a réussi à liguer contre Rome toute l'Algérie du Nord. Ils se dressent comme un seul homme face aux étrangers qui veulent spolier leurs terres. Cela se vérifie au cours de toutes les périodes de colonialisme. La lutte a duré quelque temps et elle a été reprise par la dynastie berbère des Nubel sise à Tizi N'ath Aicha (Thénia) qui a su mobiliser le peuple contre Rome. Malgré les jalousies et les traîtrises d'entre les frères Nubel (Il y en a 7) la lutte contre Rome a été accentuée. Pour renforcer la lutte, les donatistes font appel à des révoltés reconnus comme les Numides Axido et Fasir qui se sont affirmés comme des nationalistes de premier rang afin de les soutenir lorsqu'il y avait des massacres à Bagaï. Pour se démarquer de Rome et pour des raisons tactiques, les donatistes prêtent allégeance à Byzance (Eglise d'Orient). Les exportations de blé vers Rome ont été arrêtées et les terres commencent à être redistribuées aux paysans pauvres numides durant la guerre de Firmus (fils de Nubel). On note que la révolte commence toujours par la base mais elle est relayée par l'élite afin de briser les chaînes qui lient les autochtones et pour recouvrer la dignité ancestrale. Ce livre de Ahmed Akkache est à lire (durant cet été) pour comprendre un tant soit peu la mentalité des Numides/amazighes, leur soif de l'égalité et leur rejet des pratiques coloniales qu'ils combattent sévèrement. Editions Casbah, 2006