«11.600 hectares de réserves foncières destinées à l'investissement en situation de non-exploitation» Une superficie de 6132 ha répartie entre 3183 ha de zones industrielles et 2949 ha de zones d'activités, est détournée. La situation du foncier industriel est déplorable à bien lire les chiffres présentés hier en Conseil interministériel. Cette rencontre gouvernementale, présidée par le Premier ministre, axée sur la gestion des parcelles de terrains destinées à l'investissement productif, a permis de mettre à nu un état de fait en totale contradiction avec le discours ambiant en matière d'encouragement à l'accès à la ressource foncière, plus qu'indispensable dans toute stratégie industrielle. Encouragement, il y a eu, mais vraisemblablement pas aux véritables porteurs de projets. Ainsi, le rapport établi par une commission interministérielle chargé de faire le point sur la situation, fait ressortir un chiffre ahurissant. Il s'agit de quelque «11.600 hectares de réserves foncières destinées à l'investissement en situation de non-exploitation». On apprend, également, que sur la superficie inexploitée, pas moins de «13.977 parcelles couvrant une superficie de 5530 ha non attribués se composant de 2773 ha au niveau des zones industrielles et de 2757 ha au niveau des zones d'activités». La précision des chiffres vient interpeller prioritairement les responsables locaux, notamment les walis qui ont la charge de distribuer les parcelles de terrains aux investisseurs nationaux et étrangers. Tous ces chiffres concernent certainement l'ensemble du territoire national, dont des zones actuellement déshéritées et négligées par les investisseurs, en raison notamment de l'absence de toute viabilisation. Ce genre d'explications, susceptible de réduire de l'ampleur du scandale, résiste difficilement devant quatre autres chiffres dévoilés par la commission. En effet, il ressort du document de la commission interministérielle, que 15.140 parcelles destinées à l'investissement ont été bel et bien attribuées, mais à ce jour non exploitées. Cela revient à dire que plus de 15.000 projets ont été avalisés par les instances habilitées, mais dont les prétendus promoteurs n'ont toujours pas jugé utile de démarrer les travaux de réalisation. Ce chiffre est tout simplement scandaleux et amène à penser qu'une véritable maffia tentaculaire est parvenue à faire main basse sur un secteur stratégique. Autant dire qu'une «nébuleuse» apparemment difficilement identifiable prend l'économie algérienne à la gorge en mettant en lieu et en place des investisseurs, des spéculateurs sans foi ni loi. Il est clair, en effet, que les lots affectés et inexploités s'échangent sur le marché parallèle du foncier industriel. Il est difficile de penser autrement, lorsqu'on tombe sur les annonces de location de terrains de plusieurs milliers de m2 situés dans des zones industrielles, fleurir sur les sites Internet et dans les journaux. Le même rapport souligne que ces 15.140 terrains couvrent «une superficie de 6132 ha réparties entre 3183 ha de zones industrielles et 2949 ha de zones d'activités.» Cette situation qui n'est pas nouvelle, faut-il le souligner, a déjà fait l'objet, plusieurs fois, d'actions du gouvernement pour y remédier. Plusieurs ministres de l'Industrie s'y sont cassé les dents. Il faut croire qu'aucun traitement n'a réussi à extirper le virus des spéculateurs de ce secteur si sensible pour l'économie nationale. A ce jour, des investisseurs sérieux se sentent l'obligation de sous-louer un terrain en deuxième main pour pouvoir lancer leur projet. Les grands bénéficiaires, ce sont ces rentiers, souvent en relation avec des fonctionnaires indélicats qui se jouent des biens de la République pour s'en mettre plein les poches. Ce scandale ne devrait pas durer plus longtemps et le Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, semble décidé à l'éradiquer. Dans un premier temps, il a donné instruction pour la création d'une commission interministérielle composée des trois ministères concernés, qui sont l'Intérieur, les Finances et l'Industrie. Elle devra élaborer un rapport détaillé, dans un délai de 15 jours, «sur la faisabilité ou non des zones industrielles nouvelles proposées par le ministre de l'Industrie et des Mines, et de préparer également les projets de textes nécessaires à la bonne utilisation et gestion du foncier disponible», précise le communiqué du Premier ministère.