Les commerces seront bien achalandés On ne peut pas passer d'une économie et d'un mode de consommation totalement dépendants des importations à une situation de «sécheresse» en quelques semaines. Une instruction a été adressée au gouvernement, le 6 août dernier, portant sur le déblocage des marchandises importées avant que ne soient rétablies les licences d'importation. Ce jeudi, c'est-à-dire 3 à 4 jours plus tard, un courrier émanant du ministère du Commerce est venu donner à l'instruction présidentielle une concrétisation sur le terrain. Ainsi, ordre a été donné de libérer «sans délais» toutes les marchandises actuellement en souffrance au niveau des ports du pays. Il est entendu que seules les cargaisons importées avant l'instauration du régime des licences sont concernées par l'instruction et peuvent donc quitter les zones sous douane. En application du courrier du ministère du Commerce, l'Association des banques et établissements financiers (Abef) a saisi par écrit, le jour-même, les banques primaires, afin de procéder à la domiciliation des importations des marchandises concernées par l'instruction présidentielle. L'Abef qui précise dans son courrier avoir été «destinataire d'une correspondance émanant du ministère du Commerce ayant trait à la libération, sans délais, concernant toute cargaison, dont les documents d'importation, prouvent la commande de la marchandise avant l'instauration du régime de licences d'importation», ordonne aux banques de se conformer aux nouvelles directives et accomplir les formalités de financements des opérations d'importation. Le retour à la normale dans le commerce extérieur après un vent de panique qui a duré, tout de même, quelques semaines, devrait permettre à beaucoup de branches d'activité d'être alimentées en produits manquant sur le marché après les décisions brutales de cessation de leur importation. En effet, le caractère subit des ordres gouvernementaux concernant des produits qui étaient en route vers les ports algériens avant l'introduction des licences d'importation, ont provoqué dans quelques filières de véritables tensions, poussant les prix vers la hausse pour certains produits et un début de pénurie pour d'autres. Les Algériens qui, faut-il le souligner, étaient quelque peu surpris par la manière radicale avec laquelle a été opéré le virage commercial s'étaient légitimement inquiétés, d'autant que quelques produits, tout de même essentiels, figuraient sur la liste des marchandises prohibées à l'importation. Les observateurs de la scène économique qui, eux aussi, n'ont pas caché leur étonnement ont souligné l'empressement du gouvernement à mettre un terme à une situation qui dure depuis des décennies. On ne peut, en effet, pas passer d'une économie et d'un mode de consommation totalement dépendants des importations à une situation de «sécheresse» en quelques semaines. Si l'Algérie dispose d'un matelas de devises intéressant et susceptible de lui permettre de passer la crise avec un minimum de dégâts, il serait illogique de lui faire subir un traitement de choc alors qu'elle peut en faire l'économie. C'est exactement ce qu'a fait le gouvernement en produisant «tous les deux jours» une liste de produits interdits à l'importation, avec le seul objectif de rogner sur les dépenses en devises, indépendamment de toute logique économique. Il faut dire que dans sa tentative de réduire les dépenses à l'export, le gouvernement n'a pas fait preuve de pédagogie, il a agi comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. L'opinion nationale ne savait pas à quoi s'en tenir avec ces communiqués quasi illisibles et gauchement défendus par un ministère du Commerce qui, faut-il le relever, a tiré sur tout ce qui bougeait. Même si extérieurement, la situation ne semble pas du tout catastrophique, il reste que les entraves mises à tous les carrefours économiques du pays annonçaient un futur assez compliqué, à l'image de l'interdiction d'importation d'intrants pour les limonadiers qui a failli, n'était-ce de sérieuses mises en garde, provoquer un véritable drame dans l'une des filières agroalimentaires la plus dynamique et qui commence à trouver des pistes à l'exportation. Cela sans parler d'autres couacs, qui ne sont pas sortis ou en tout cas pas encore, des bureaux d'opérateurs économiques, déstabilisés par la chasse aux importations lancée par le gouvernement, jusqu'à bloquer des projets industriels au motif que ceux-ci supposaient des importations préalables d'intrants. En fait, à vouloir stopper les importations inutiles, le gouvernement a tout simplement paralysé tout le commerce extérieur du pays..