Le projet de loi que portera le ministre des Finances devant les élus de la nation est censé faire sauter un verrou prudentiel pour permettre au Trésor public de disposer de liquidités L'un des principaux soucis des concepteurs de l'amendement est en rapport avec le nécessaire maintien de l'activité économique pour ne pas retourner à la case départ. Les amendements de la très médiatisée loi sur la monnaie et le crédit seront étudiés dès demain en commission, à l'APN. Le projet de loi que portera le ministre des Finances devant les élus de la nation est censé faire sauter un verrou prudentiel pour permettre au Trésor public de disposer de liquidités pour faire face aux dépenses de fonctionnement de l'Etat et de l'économie. Ceci passe par l'introduction d'un nouvel article, le 45 bis. Il y est dit: «La Banque d'Algérie procède, dès l'entrée en vigueur de la présente disposition, à titre exceptionnel et durant une période de cinq années, à l'achat directement auprès du Trésor, de titres émis par celui-ci, à l'effet de participer, notamment à la couverture des besoins de financement du Trésor, au financement de la dette publique interne et au financement du Fonds national d'investissement (FNI).» Une triple fonction de «l'argent frais» que dégagera l'amendement, au motif clairement souligné de financer le déficit, mais également l'effort d'investissement de l'Etat. «Ce dispositif est mis en oeuvre pour accompagner la réalisation d'un programme de réformes structurelles économiques et budgétaires devant aboutir, au plus tard, à l'issue de la période susvisée, notamment, au rétablissement des équilibres de la trésorerie de l'Etat et de l'équilibre de la balance des paiements. Un mécanisme de suivi de la mise en oeuvre de cette disposition, par le Trésor et la Banque d'Algérie, est défini par voie réglementaire», préconise le même article bis du projet d'amendement. Le ministère des Finances explique le recours à cette pratique pour financer l'économie et les déficits par l'assèchement des ressources du pays, conséquences de la chute des prix du pétrole. Dans l'exposé des motifs, on y lit que le gouvernement n'a pas pris cette voie de gaieté de coeur. Il est souligné les différentes initiatives de l'Exécutif pour combler le vide laissé par la baisse des recettes. «Un emprunt obligataire national a été levé. En outre, le Trésor a bénéficié de dividendes substantiels prélevés sur les résultats de la Banque d'Algérie. En dépit de tous ces apports, le besoin de financement du Trésor pour l'année 2017 demeure supérieur à 500 milliards DA», note-t-on dans l'exposé des motifs, comme pour souligner le caractère incontournable de l'option du financement non conventionnel, dans un contexte où le niveau des prix de l'or noir «accentuera les tensions sur la trésorerie de l'Etat, à court et à moyen terme». Arrivé à 2017, le pays est dans une situation qui «fait peser un risque majeur sur la capacité de l'Etat à poursuivre ses efforts de développement économique et social». Comprendre que l'Algérie est quasiment prise à la gorge. Une situation aggravée par un «marché monétaire et financier interne (qui) voit ses capacités se contracter, limitant ainsi les capacités de financement des investissements économiques». Le tableau que présentera le ministre des Finances aux députés est, pour le moins, peu reluisant. Ahmed Ouyahia, qui en a tiré une esquisse, lors de la présentation du plan d'action du gouvernement, ne dirait pas mieux. Face à l'interdiction formelle de recourir à l'emprunt extérieur, pour remédier à la crise financière, une seule solution s'impose au gouvernement: «Financement non conventionnel» ou «d'assouplissement quantitatif», lit-on dans le document du ministère des Finances. Le gouvernement reste néanmoins dans le registre du prudentiel, arguant le «caractère transitoire dont l'application est limitée dans le temps», précise l'exposé des motifs. Il reste que l'un des principaux soucis des concepteurs de l'amendement est en rapport avec le nécessaire maintien de l'activité économique pour ne pas retourner à la case départ. Un arrêt de la dynamique de développement conduirait à une récession économique, augmenterait le chômage et provoquerait un anéantissement de la classe moyenne que l'Algérie a mis plus de 15 ans à former. Aussi, il est préconisé la dotation du Fonds national d'investissement en ressources financières «au titre des prises de participation de l'Etat dans des investissements ou de financements à long terme de programmes publics d'investissements». L'autre fonction du financement non conventionnel consiste à «accompagner un programme de réformes structurelles économiques et budgétaires qui, grâce à une rationalisation de la dépense publique et à une optimisation des recettes fiscales, doit aboutir, au plus tard à l'issue de la période considérée, au rétablissement des équilibres macroéconomiques et financiers», assure le ministère des Finances dans l'exposé des motifs. Les réformes, talon d'Achille de l'administration algérienne, seront-elles conduites? La question reste entière, même si tous les observateurs s'accordent sur l'importance stratégique et vitale, pour l'économie nationale, de ces réformes.