Des équipes de choc Trois docs, trois équipes de choc qui ont planché sur une belle thématique, «l'Ombre et la lumière» et nous ont délivré samedi, le fruit de leur formation en son, image, réalisation et montage et ce, en l'espace de 15 jours... Pour la 4ème année consécutive, 12 professionnels algériens se sont confrontés au pari risqué de tourner trois films documentaires cinéma en à peine 15 jours, avec cette fois deux désistements la veille, une exception! Un contre-la-montre qui oblige la coordination et l'efficacité pour tous et pour d'aucuns de trouver d'autres profils sur lesquels il faut se focaliser dare dare et ce, après avoir passé les premiers repérages en juillet. En vain. Un challenge, de la tension et des nerfs et en sus des heures à travailler sans relâche, pour réaliser des oeuvres cinématographiques. Et l'on peut dire que cette année le niveau était bien élevé! Un nouvel exercice en outre a été introduit dans cette nouvelle édition. Il s'agit de choisir une série de photos pour illustrer un thème ou un sujet cher à son auteur. La première série présentée est celle de Kamel. L; Laribi. Ce dernier a choisi de montrer plusieurs hommes en pleins travaux manuels à l'instar d'un fleuriste, d'un boulanger, un serrurier etc. L'idée est de mettre l'accent sur ce travail noble qui semble être déserté peu à peu par la nouvelle génération ce que déplore notre jeune photographe. La seconde série de photos est celle de Abir Tellia. Cette dernière a pu, grâce à des clichés de différents enfants noirs, immortalisés en gros plan, mettre l'accent sur les différents stratifications sociales et culturelles dans certaines régions d'Afrique noire et ce, que l'on peut discerner par les balafres qu'ils ont sur le visage. Ainsi, l'on peut distinguer leurs différences ethniques selon la population à laquelle ils appartiennent. La troisième partie photographique en noir et blanc est celle de Youcef Oufighou qui a choisi d'emblée de poster son objectif à travers le grillage d'un stade cadenassé à l'intérieur duquel jouent des enfants en plein centre d'Alger et se demander quel est la situation des enfants dans l'Algérie profonde? S'ensuivra la série des petits formats sonore traditionnels. Le premier intitulé «Moi, l'artiste» est une réalisation de Haitem Adjou, 3'. Nous plongeons dans l'univers d'un homme qui parle de musique, tout en nous faisant écouter des sons raï notamment, on s'imagine être dans un studio d'enregistrement. Cet homme rêve en fait d'être artiste un jour comme Deriassa, le fils. «Bateau mortel», (Baborlmuth) est une petite forme sonore de Koceila Tayeb Mahfoud,2'. Ce dernier plus opaque et mystérieux nous introduit en fait dans un port sans trop deviner ce qui se passe autour. «Renard et Compagnie» est pour sa part une forme sonore bien dense de Mourad Aouis, 3' 10''. Nous arrivons à entendre plusieurs personnes qui parlent dont une qui décrit ses amis tout en parlant de son métier de fabricante de chaussures puis, petit à petit, notre imagination faisant le reste, nous arrivons à nous projeter dans ce monde fait de gens ordinaires et un atelier de souliers.. Un film bien volubile. Place cette fois aux 3 films documentaires. Le premier est intitulé Birds, Un film réalisé par Louisa Beskri,13'. Cette dernière filme avec son portable un enfant noir dans les rues de Tipasa. Cet enfant mendie, court, saute joyeusement, se cache sous un long tapis, rit, s'agrippe aux gens et à la fin de la journée, sans doute avec sa soeur nigérienne, comme lui, va jouer et nager en toute quiétude loin des regards des adultes ou de la police qui peut les traquer à tout moment. Un instant de bonheur fugace et tout simple que cette séquence à la mer qui fait défaut chez lui comme la «mayonnaise à cause du takachof!» dira cette petite fille espiègle. Rires dans la salle! Des vérités incongrues, mais si tendres quand elles proviennent de la bouche de ces enfants qui nous rappellent combien l'innocence n'a ni couleur, ni odeur, encore moins de nationalité. Nice, Very Nice est quant à lui un film de Zidani El Kheyer, 16'. Notre jeune réalisateur a choisi de s'attarder sur une figure de proue de la Casbah. Didou, 88 ans qui a passé sa vie a sublimer la mémoire de feu son épouse en décorant et l'intérieur comme l'extérieur de sa maison de plein de coquillages et d'orner les murs de son appartement de ses photos. Devenu guide dans la Casbah, Didou ne tarit pas d'éloges sur sa femme lorsqu'il parle d'elle, album photo à l'appui. Mi-triste, mi-nostalgique, il garde toujours ce visage illuminé devant les touristes comme étant habité et passionné par la notion de beauté dont on arrive à distinguer la fulgurance dans son coeur vaillant. Et le torse fort prêt à être bombé pour monter sur un escabeau ou une échelle pour peaufiner son travail de décorateur d'intérieur improvisé qu'il s'est assigné depuis une dizaine d'années. Enfin, Le docteur Fatma est un film réalisé par Narcisse Youmbi,13'. Ce dernier lors du débat qui a suivi la projection, a tenu à souligner que son doc est dédié à la femme qui porte l'enfant durant neuf mois avec tout le poids de la grossesse qui va avec, les péripéties que l'on ne sait pas etc. Qui d'autre qu'un médecin obstétricien pour raconter le mieux cette aventure humaine des plus exceptionnelles? C'est pourquoi, le réalisateur va nous entraîner dans le monde médical de Mme Fatima qui voit passer plusieurs cas de femmes qui viennent accoucher chez elle dans un contexte socioculturel laminé de plus en plus, faut-il le dire, aujourd'hui, par les idées obscurantistes dont les femmes sont les premières victimes. Un film puissant. Notons que ces trois films réalisés cette année dans le cadre de la quatrième édition du Laboratoire doc d'Alger obéissaient tous à une thématique à savoir «l'ombre et la lumière». Des choix de sujets amplement judicieux donc s'agissant de l'importance de mettre en lumière en effet des personnes dont on parle très peu, de certaines causes qui méritent être plus défendues ou tout simplement de la reconnaissance de certains faits dans la société qui devraient être regardés de plus près et traités avec intérêt. Pour rappel, tous ces films sont nés suite à une formation mise en place par l'Institut français d'Alger en partenariat avec le Festival Premiers plans d'Angers ainsi qu'avec Dzair TV. La formation des laboratoires documentaires initiée par l'Institut français d'Alger en 2014, a permis à une quarantaine de professionnels en son, montage, image et réalisation de se confronter pour la première fois au genre documentaire. Leurs films documentaires ont été sélectionnés dans une quarantaine de festivals. Cette formation est désormais l'une des rares formations documentaires pratiques en Algérie, qui recouvre l'ensemble du processus créatif du genre, nous apprend-on. Il est aussi bon de rappeler les noms des précieuses personnes qui travaillent dans ce laboratoire documentaire. En intervenant dans la réalisation, on citera le fidèle au poste depuis quatre ans Xavier Liébard, en intervenant au montage, cette année, Yacine Bouaziz, en intervenant au son Arnaud Marten. Enfin, cette soirée de projection de documentaires en avant-première tenue samedi soir, à l'Institut français d' Alger, a été marquée aussi, par l'annonce de la venue en Algérie, il y a un mois de Grégor Trumel, qui a récemment pris ses fonctions en sa qualité de nouveau conseiller en coopération et d'action culturelle à l'ambassade de France en Algérie et de directeur de l'Institut français d'Algérie.