L'ONU célèbre demain le soixantième anniversaire de la Charte portant création des Nations unies. Entre le 26 juin 1945, date de la signature de la Charte des Nations unies -au lendemain même de la fin de la Seconde Guerre mondiale (1939-1945)- et le 26 juin 2005, -au seuil du troisième millénaire- beaucoup de choses sont intervenues rendant incontournable la refonte de l'institution internationale qui a certes joué son rôle même si cela fut cahin-caha et de manière inégale. Cinquante pays avaient alors signé ce jour, à San Francisco (Californie) aux Etats-Unis, la Charte fondatrice de l'ONU, laquelle est ratifiée le 24 octobre de la même année. En 2005, 191 pays sont officiellement membres de cette organisation internationale dont la Charte voulait «préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l'espace d'une vie humaine a infligé à l'humanité d'indicibles souffrances, (...) proclamer (notre foi) dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l'égalité de droits des hommes et des , ainsi que des nations, grandes et petites, (...) créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect des obligations nées des traités et autres sources du droit international, (...) favoriser le progrès social et instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande (..)». En 19 chapitres et 111 articles, elle crée comme organes principaux une Assemblée générale, un Conseil de sécurité, un Conseil économique et social, un Conseil de tutelle, une Cour internationale de Justice et un Secrétariat. Créée à une période particulière d'un monde qui sortait d'un conflit mondial particulièrement éprouvant, l'ONU avait pour mission de réconcilier les nations et de veiller à la préservation de la paix mondiale. Un devoir qui a été imparfaitement accompli car les Nations unies ne disposaient pas d'un véritable pouvoir de décision leur donnant d'imposer à tous ses membres la raison garder. La guerre froide entre les blocs soviétique et occidental mina davantage l'action des Nations unies mettant à nu les limites de l'organisation internationale. Cette impuissance de l'ONU est rapidement apparue du fait même de la détention par cinq pays, (Etats-Unis, Urss (poste détenu depuis 1990 par la Russie) Chine nationaliste (Taiwan, remplacée en 1970 par la Chine populaire) Grande-Bretagne et France, du droit de veto qui limita au strict essentiel le pouvoir du Conseil de sécurité et partant celui de l'ONU qui ne pouvait intervenir efficacement que lorsqu'il y avait consensus entre les «Grands». Ce qui été rarement le cas durant la guerre froide, et dans le dossier palestinien, notamment, où le veto américain -en faveur d'Israël qui occupe les territoires palestiniens- bloque depuis cinq décennies toute avancée vers une solution équitable et vers la paix. Outre l'incongruité qu'est la détention du droit de veto, -qui place cinq pays au-dessus des lois et du droit internationaux (cf. l'invasion de l'Irak par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne en mars 2003 qui sont allés à l'encontre des recommandations du Conseil de sécurité)- le fonctionnement actuel de l'ONU, secouée ces dernières années pour moult scandales, pose lui aussi problème. En fait, c'est dans la perspective de reconfigurer les missions de l'ONU que le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a élaboré un vaste projet proposant une refonte tous azimuts de l'organisation en vue de mieux l'adapter à notre siècle et aux nouveaux besoins inhérents aux transformations ayant touché le monde lors du dernier quart du XXe siècle, marqué par l'effondrement du bloc communiste, laissant les Etats-Unis seuls maîtres de la décision au plan mondial. De fait, comme pour montrer que les USA sont une puissance hors normes, Washington a décliné les invitations faites au président Bush et à sa secrétaire d'Etat, Mme Rice, entrant dans le cadre des manifestations célébrant le soixantième de l'ONU. Le cavalier seul américain augure en fait mal des prochaines réformes des Nations unies -et du dialogue amorcé dans ce cadre par les 191 membres de l'ONU- dès lors que les Etats-Unis, forts de leur qualité de superpuissance, ont fait de l'unilatéralisme le fondement de leur nouvelle politique étrangère relativisant de fait le dialogue sur les réformes de l'ONU, et remettent en cause la portée même de cette refondation du fait que Washington se place d'ores et déjà au dessus des autres Etats en ayant ses propres institutions de contrôle sur le monde. En fait, les USA qui se sont donné le pouvoir de s'immiscer dans toutes les affaires qui concernent notre planète, font aujourd'hui doublon avec l'ONU dont ces affaires étaient de fait de son ressort exclusif (ce qui était le cas de l'affaire dite des ADM irakiennes). Il y a là comme un hiatus et l'on se demande si la communauté internationale prend la mesure de cette confusion des prérogatives des uns et des autres, ou si elle continue à s'abuser elle-même en jouant à l'autruche. Or, la crédibilité future de l'ONU dépend du fait que tous les Etats soient soumis à l'institution internationale dont la Charte soulignait l'égalité des droits (...) entre grandes et petites nations. Ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui et plus encore demain face à l'unilatéralisme américain.