«Voilà une scène devant laquelle la présidente du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, va s'arracher les cheveux (...).» Rouquin et presque imberbe, le soldat des marines américain a le regard vif. Son accoutrement militaire le rend alerte malgré sa carrure chétive. Assis à l'intérieur de son hélicoptère qui fait la navette entre l'aéroport international Houari-Boumediene et le navire Nashville en rade à environ 65 km de la côte algérienne, il prend le temps et le plaisir d'admirer la ville d'Alger et même d'immortaliser de beaux souvenirs. Il s'agrippe à l'objectif de sa caméra de marque JVC. Sur l'écran numérique, défilent des images d'une ville gigantesque où le béton l'emporte de loin sur les espaces verts. Une mosaïque de bâtisses facilement reconnaissables déjà à l'oeil nu puisque l'appareil de l'armée américaine vole à basse altitude. Vue de haut, Alger se dissimule, elle ne cache pas ses entrailles et ne frustre pas le regard. On distingue facilement la Casbah de l'architecture coloniale qui longe le Front de mer. Des milliers de bâtisses amorphes et diffuses semblent prises en sandwich entre l'axe Bab El-Oued, Belcourt et les hauteurs d'Alger. En contraste avec le bleu de la Méditerranée, la verdure du jardin d'El Hamma apaise nos sens. De même d'ailleurs, que ce qui reste des terres agricoles du Bassin de la Mitidja: Bab-Ezzouar, Rouiba Réghaïa et quelques lopins de terre à Aïn Taya. Sur l'écran de l'appareil du soldat, ces images doivent être encore plus belles. «Voilà une scène devant laquelle la présidente du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune va s'arracher les cheveux, elle qui considère que la nouvelle loi sur les hydrocarbures est une atteinte à la souveraineté nationale», présume un confrère parmi l'équipe de journalistes qui se trouvaient à bord de l'hélicoptère américain pour visiter le navire de transport amphibie USS Nashville ( LPD 13 ) en haute mer où se déroulent des exercices militaires conjoints entre les forces navales américaines et algériennes. «C'est quand même anormal qu'aucun militaire algérien n'accompagne ces Américains qui sillonnent le Tout-Alger, ne serait-ce que pour respecter les formalités protocolaires», s'est encore écrié le même confrère, et la balade continue. Deux hélicoptères de l'US Navy, transportent une dizaine de journalistes de la presse nationale, de la télévision et des membres de l'ambassade des Etats-Unis à Alger. Il a fallu une trentaine de minutes pour rejoindre le bâtiment américain qui se trouvait en haute mer, précisément à 40 miles de la côte algérienne, le Nashville. Un énorme bâtiment de onze étages appartenant à la sixième flotte américaine et commandé par une dame, Donna Leony, chef des opérations. «l'Algérie a besoin de nous comme nous avons besoin d'elle dans la lutte contre le terrorisme en Méditerranée», déclara-t-elle avec énergie aux journalistes. A bord de ce vaisseau, 450 marines et 50 officiers. A la veille de la fin de l'opération Flint Lock 05 entamée depuis le début du mois de juin dans les confins du Sahara, l'armée américaine entame d'autres manoeuvres en mer cette fois-ci. En effet, plus de 1000 officiers des forces navales américaines et du corps des marines participent depuis le 23 juin à une série de scénarii reliés à des manoeuvres conjointes avec le Maroc, la Tunisie, la France, l'Italie, la Grande-Bretagne et l'Espagne, en Méditerranée et dans l'Océan atlantique. Dans ce contexte, les forces américaines ont également mené des exercices maritimes conjoints avec les forces navales algériennes. «Ces exercices nous permettent de mieux nous préparer afin de poursuivre les efforts de coopération bénéfiques dans le domaine de la sécurité, de développer les engagements mutuels, relatifs à la stabilité de la région, de promouvoir l'interopérabilité multinationale, et de dissuader des adversaires potentiels... toutes des contributions inestimables dans la lutte internationales contre le terrorisme.» a déclaré le vice-amiral des forces navales américaines, J.Boomer Stufflebeem, commandant de la sixième flotte. Entamés depuis samedi dernier, ces exercices sont menés conjointement par les forces navales américaines et algériennes lesquelles participent avec trois navires. «Ces opérations n'ont aucune relation avec Flint Lock menée actuellement au Sahara» note le capitaine du bateau, Watson Denny, soulignant que «la seule relation qui existe entre les deux opérations est que les Etats-Unis sont prêts à travailler étroitement avec leurs alliés». Destinée à lutter contre le terrorisme et le banditisme en mer, cette opération ne diffère pas en objectif de celle effectuée au Sahara. «Ces opérations ne sont pas spécifiques mais notre seul objectif est de lutter contre le terrorisme là où il existe». Au fait, ces manoeuvres font partie des activités de la sixième flotte américaine. Il s'agit d'une série d'opérations que les Etats-Unis mènent du 23 au 27 juin en Méditerranée dans l'Océan atlantique avec le Maroc, l'Espagne, la France l'Italie, la Grande-Bretagne et la Tunisie. Très peu prolixe sur des sujets «politiques», le capitaine du bateau se contente de son rôle strictement militaire: «En tant que militaire, je suis tenu d'aider mon gouvernement et le soutenir dans la lutte contre le terrorisme transnational afin qu'il ne soit pas vulnérable. L'Algérie et les Etats-Unis ont les mêmes objectifs dans ce sens», il ajoute: «Il s'agit de sécuriser les frontières algériennes et le gouvernement américain est en train de chercher plus d'opportunités de collaboration et de travail conjoint». Aujourd'hui (dimanche Ndlr) l'exercice consiste à intercepter un navire suspect et entamer une fouille dans ce même navire. Le lieutenant-colonel Bouraoui de la marine algérienne explique le scénario de l'exercice aux journalistes. Il s'agit d'une simulation. «Des informations venues d'Algérie, du Maroc et d'Espagne font état de l'arrivée en Méditerranée de deux navires suspects qui viennent, soit de Gibraltar soit de Djibouti. On imagine qu'ils transportent des ADM ou des terroristes. Les informations récoltées sont traitées au niveau du Nashville. L'exercice consiste à intercepter ce navire en mer et à y opérer une inspection.» Baptisées Barbary Thunder, ces manoeuvres se concentreront sur le développement des capacités maritimes individuelles et collectives des pays participants. Cette opération qui prendra fin le 7 juillet prochain, est la première du genre qu'effectuent les Américains en Méditerranée, en attendant deux autres au Moyen-Orient et en Mer noire.