Six ans après sa mise en service, le métro d'Alger demeure propre et organisé comme au premier jour. Même si certaines lacunes sont à relever, notamment l'insuffisance des escalators et des ascenseurs, le bilan est plutôt positif. Inauguré le 1er novembre 2011, ce moyen de transport moderne et efficace est aujourd'hui entré dans les habitudes des Algérois et enregistre une fréquentation croissante. Peu le savent, mais la capitale, à Alger, a failli avoir son métro en 1928. Cependant, pour des raisons budgétaires, le projet a été abandonné. Le rêve a repris à la fin des années 1970 et les études pour sa concrétisation ont commencé en 1981. Puis, le 24 novembre 1984, l'Entreprise du Métro d'Alger a été créée pour assurer sa maîtrise de l'ouvrage dont la réalisation a été confiée à une entreprise allemande et une autre japonaise. Le creusement a débuté en octobre 1990 sous la place de l'Emir Abd el-Kader, mais évoluait très lentement. L'Algérie avait subi, quatre ans plus tôt, une chute vertigineuse de ses recettes extérieures à la suite du premier contrechoc pétrolier et ne pouvait plus subvenir aux coûts exorbitants d'un tel chantier. Toutefois, en 1994, deux premiers tunnels longs de 450 mètres et de 650 mètres ont été achevés pour former le tronçon qui va de la Grande-Poste à la station Khelifa-Boukhalfa. La galerie avancera ainsi péniblement pour atteindre à la fin des années 1990 une longueur de 3,5 kilomètres. Il faudra cependant attendre 2003 pour que les travaux prennent une cadence régulière et rapide. La ligne Haï El Badr-Tafourah-Grande Poste, longue de 9,5 km et comportant 10 stations est livrée le 31 octobre 2011 pour entrer en fonction le lendemain. Cette phase aura coûté l'équivalent d'un milliard de dollars. Mais l'investissement continue puisque après l'extension de Haï El Badr-El Harrach, on attend la livraison sous peu de celle de la Grande Poste-place des Martyrs puis celle de Aïn Naâdja avant la réception de la ligne qui aboutira à l'aéroport d'Alger. En plus de la facilité du déplacement qu'il permet, le métro a provoqué une petite révolution sociologique. Son effet sur le comportement des Algérois est remarquable. Dans ce lieu de socialisation situé sous terre, la politesse, l'hygiène et la bonne tenue sont de rigueur. Il faut regarder, par exemple, en bas pour constater que, à de rares exceptions, les chaussures des usagers sont d'une propreté irréprochable. Et alors que les rues en surface sont jonchées de détritus, dans les stations du métro très peu de déchets sont à déplorer. En règle générale, l'attitude des passagers est aussi civilisée que dans les meilleurs endroits de la planète et prouve que, dans les espaces organisés, les citoyens s'adaptent. Il est indéniable que les Algérois sont fiers de leur métro et font tout pour le maintenir dans un état appréciable. Il faut dire aussi que la direction veille au grain pour éviter et prévenir les écarts de conduites. En plus d'une présence policière visible, des agents en chemise et cravate sont à pied d'oeuvre pour contrôler les tickets et surveiller le flux des passagers. Cette pression permanente peut paraître exagérée aux yeux de certains mais elle est vraisemblablement voulue pour ancrer le sens de l'ordre dans les têtes de ceux qui fréquentent le transport souterrain. Les maires qui sortiront prochainement des urnes devraient peut-être s'inspirer de cette organisation afin d'améliorer l'état de leurs communes. Car les mêmes personnes qui, sous terre, se caractérisent par un haut degré de civisme se relâchent une fois à l'air libre. Comme quoi, le progrès de l'Algérie a commencé dans son sous-sol.