Prix Assia Djebar du meilleur roman, prix Souad Sebbah du roman arabe (Koweit), prix Katara-2017 à Doha et une modestie incroyable. Il s'agit du jeune romancier en langue arabe Abdelwahab Aïssaoui. En l'apercevant lundi soir, peu avant la fermeture des stands à l'espace des éditions Baghdadi au Pavillon central du Salon international du livre d'Alger, on est d'emblée frappé par autant de simplicité. Alors là quand il change de place et ose s'accroupir à côté de nous pour répondre à nos quelques questions. On est vite «déstabilisé» par autant d'humilité. Une simplicité d'un naturel déconcertant. Pourtant, l'homme qui est assis à côté de nous et qui s'appelle Abdelwahab Aïssaoui n'est pas n'importe qui. C'est un grand écrivain avant d'avoir bouclé ses trente-deux ans. Un jeune écrivain qui peut aller loin puisque le grand succès obtenu par ses romans ne lui est guère monté à la tête. La modestie de Abdelwahab Aïssaoui a failli nous faire oublier son talent. Enfin, presque. Avec un large sourire, Abdelwahab Aïssaoui parle de ses livres et des livres qu'il a aimés et qui l'ont poussé à passer, sans hésiter, à l'acte d'écrire. Dès qu'il a commencé à se faire publier, Abdelwahab Aïssaoui a attiré l'attention des membres des jurys littéraires, à commencer par celui du prix Assia Djebar du meilleur roman en langue arabe de l'édition 2015. Le livre intitulé en langue espagnole «Sierra de muerti» a vite convaincu les jurés du prix Assia Djebar. Ces derniers ont décidé à l'unanimité que ce sera lui le lauréat de cette première édition. Pourquoi un titre en langue espagnole pour un livre en langue arabe? Abdelwahab Aïssaoui explique que tout simplement le livre raconte l'histoire d'un groupe d'Espagnols emprisonnés en Algérie. Après la réception de ce grand Prix, Abdelwahab Aissaoui, un enfant de la wilaya de Djelfa, est resté égal à lui-même et sa muse ne l'a pas pour autant quitté. Il a continué à écrire et à produire coup sur coup romans et recueils de nouvelles. Et à déposer ses livres pour postuler à des prix littéraires. Après le prix Assia Djebar, Abdelwahab Aïssaoui obtient aussi avec mérite, faudrait-il s'en douter d'ailleurs, le grand prix Souad Sebbah du roman arabe au Koweit en mars 2017. C'est son deuxième roman qui a séduit cette fois-ci les membres du jury. Le roman de Abdelwahab Aïssaoui, primé au Koweit s'intitule «Les cercles et les portes». Puis en ce mois d'octobre, Abdelwahab Aïssaoui surprend encore tout son monde «en chassant» un autre Prix prestigieux également. Il s'agit du prix Katara du meilleur roman inédit en langue arabe. Cette fois-ci, c'est son roman «Voyage des oeuvres oubliées» qui a fait vibrer les coeurs des membres du jury du prix Katara à Doha. Avec une telle collection de prix, à trente-deux ans, un écrivain a de quoi perdre la tête et troquer sa plume contre un narcissisme démesuré. Au lieu de cela, Abdelwahab Aïssaoui garde les pieds sur terre. «Je suis certes très heureux d'avoir décroché tous ces prix. Mais en même temps, je suis gagné par une angoisse. Car quand un écrivain ne peut pas produire mieux que ce qu'il a déjà écrit, il doit cesser d'écrire», nous confie Abdelwahab Aïssaoui. «Quand j'ai commencé à recevoir ces prix, la première question qui m'est venue à l'esprit est: et maintenant qu'est-ce que je vais écrire. C'est une grande responsabilité», ajoute notre interlocuteur. Il rassure quand même: «Je continue d'écrire». Une question encore pour terminer car les portes du Sila vont fermer en cette cinquième journée du Salon.C'est une question inévitable. Quels sont les écrivains qu'aime Abdelwahab Aissaoui, ceux qui l'impressionnent, qui le passionnent et qui l'influencent? Hermann Hess, le grand romancier allemand, prix Nobel de littérature en 1946, est son écrivain préféré. Les traductions de ce géant étant disponibles en langue arabe, Abdelwahab Aïssaoui n'a pas hésité à dévorer tous ses livres. D'ailleurs, il nous a confié que c'est la littérature allemande qui le passionne le plus. Il cite un autre auteur germanique: Thomas Mann, prix Nobel de littérature en 1929. D'autres auteurs arabes ont influencé Abdelwahab Aïssaoui comme le monumental Nadjib Mahfoud et Abderrahmane Menif. En Algérie, notre interlocuteur cite Tahar Ouettar, particulièrement «Ezilzal» et «El laz». Sans oublier Wassiny Laredj. Abdelwahab Aïssaoui, au rythme où vont les choses, deviendra à son tour et peut-être même bientôt une référence pour d'autres jeunes écrivains. Pour peu qu'il persévère. Et qu'il garde les pieds sur terre. Comme il l'a si bien fait aujourd'hui.