A l'heure où plusieurs pays d'Amérique du Sud et centrale ont basculé dans le camp conservateur, l'ombre de Chavez plane toujours sur un Venezuela réfractaire qu'il faut mettre à genoux, à tout prix... Confronté depuis plusieurs mois à des pressions plus ou moins latentes ainsi qu'à des sanctions américaines dont le but est d'asphyxier son économie, le Venezuela a abordé hier une série de rendez-vous cruciaux avec ses créanciers internationaux alors que le président Nicolas Maduro ne cesse de répéter que «jamais» son pays ne ferait défaut. Les agences de notation ne sont pas les dernières à prédire la cessation de paiements pour un pays confronté à une crise économique profonde qu'a aggravé l'agitation» politique orchestrée par des pays hostiles au régime avec l'aide active des factions internes. Conscient de l'enjeu et des manoeuvres effectuées désormais au grand jour par les partisans de l'opposition, le président Maduro a convoqué à Caracas une réunion des créanciers internationaux du Vénézuéla pour tenter de renégocier la dette du pays, estimée à 150 milliards de dollars. Selon les organismes internationaux, le Venezuela ne dispose plus que de 9,7 milliards de dollars de réserves et il lui faut rembourser avant la fin de l'année 2017 entre 1,47 et 1,7 milliard, auxquels s'ajouteront 8 milliards en 2018. Pour les observateurs, il y a peu de chances que les créanciers acceptent la proposition de rééchelonnement que comptent leur soumettre les dirigeants du pays. Or, le chef de l'Etat a encore proclamé haut et fort, dans son intervention télévisée dominicale, que «jamais, au grand jamais, l'option du défaut de paiement ne se produira. Ils ont spéculé sur cette hypothèse», a-t-il dit avant d'indiquer: «Notre stratégie actuellement est de renégocier et de refinancer la dette dans son ensemble» et «cela doit être parfaitement clair aussi bien pour tous les créanciers comme pour les agents financiers». Les économistes occidentaux développent l'argumentaire d'un chef d'Etat vénézuélien en quête d'un soutien des créanciers américains qui feraient pression sur l'administration Trump plutôt que de parier sur une restructuration de la dette. C'est oublier un peu vite que la parole de ces créanciers est assujettie totalement aux objectifs et aux manoeuvres de l'administration US qui ne cache guère ses intentions à l'égard du régime vénézuélien. A l'heure où plusieurs pays d'Amérique du Sud et centrale ont basculé dans le camp conservateur, l'ombre de Chavez plane toujours sur un Vénézuéla réfractaire qu'il faut mettre à genoux à tout prix et ce ne seront sûrement pas les créanciers américains qui vont tenter de s'y opposer! Au cours des mois précédents, Washington a déjà interdit à toutes ses banques et même à ses citoyens d'acquérir de nouvelles obligations ou de négocier un quelconque accord avec le gouvernement vénézuélien, allant jusqu'à bloquer les transactions financières de Caracas qui souffre, c'est un secret de Polichinelle, de la chute drastique des cours du pétrole dont dépend largement toute son économie. Et quand on sait que 70% des détenteurs de bons émis par le trésor venezuelien sont ou américains ou canadiens, on comprend avec quelle facilité l'administration américaine entend conduire la partie. Pour l'heure, on a peine à imaginer que les créanciers américains soient autorisés à se rendre au Venezuela pour y négocier une solution à la crise et la «persécution financière» que dénonce le gouvernement Maduro va encore se traduire par le fait que les négociateurs vénézuéliens Simon Zerpa, ministre des Finances, et Tarek al Aïssami, le vice-président, font tous deux l'objet de sanctions décrétées par Washington. Le pari des Etats-Unis comme celui des créanciers et agents concerne la capacité du Venezuela de résister encore quelques mois alors que ses réserves sont nettement insuffisantes. Misant sur un délai assez court, ils planent au-dessus de ce pays, chacun y allant de son pronostic sur les délais. Dans leur sillage, l'UE a aggravé lundi les sanctions dont un embargo sur les armes pour, dit-elle, «inciter le régime Maduro à «entamer» un dialogue avec l'opposition». Un signal à la fois tardif et globalement politique.