Le plan israélien a été pris en compte par les Etats-Unis qui ont vu dans le cessez-le-feu au sud de la Syrie un engagement pour le retrait des forces pro-syriennes. Or Moscou a répliqué sèchement par Sergueï Lavrov, pour qui «la présence iranienne en Syrie est légitime»... Tandis que sur le terrain militaire, les affrontements sont désormais circonscrits à Abou Kamal où subsiste une dernière poche de résistance de Daesh, les partenaires du processus d'Astana veulent passer à la vitesse supérieure. Lors de la réunion ministérielle à huis clos de dimanche dernier, le Russe Sergueï Lavrov, l'Iranien Mohammad Javad Zarif et leur hôte turc Mevlüt Cavusoglu se sont retrouvés à Antalya, au sud de la Turquie, pour préparer le sommet qui se tiendra mercredi prochain, dans la station balnéaire russe de Sotchi, en présence des présidents russe Vladimir Poutine, iranien Hassan Rohani et turc Recep Tayyip Erdogan, tous impliqués dans le conflit qui affecte la Syrie. Les trois pays cherchent à concrétiser les objectifs inscrits dans l'accord d'Astana qui prévoit des zones de désescalade et, partant une réduction significative des hostilités, de manière à encourager le processus des négociations pour mettre fin à la guerre. On aura observé au cours des deux derniers mois une accélération manifeste des rencontres diplomatiques et des discussions autour de ce programme tracé par Moscou, Téhéran et Ankara avec l'assentiment de Damas. La Turquie qui, depuis 2011, a soutenu sans réserve l'opposition armée au régime syrien a sensiblement adouci son discours autant que ses rapports avec Damas, d'une part parce que la menace représentée par les PYD, une branche syrienne du PKK est devenue pendante au niveau de sa frontière avec la Syrie et ensuite parce que la donne a complètement changé au cours des derniers mois, l'armée arabe syrienne ayant balayé les positions de Daesh comme celle d'Al Nosra et des autres groupes extrémistes désormais rassemblés à Idlib. Forts de ce contexte qui voit le régime syrien engranger les succès militaires, Moscou et Téhéran cherchent en tant qu'acteurs incontournables du conflit à baliser le terrain pour de nouvelles avancées du processus d'Astana auquel adhère pleinement Ankara, dans le but premier de réduire le niveau des violences qui ont lieu encore dans certaines zones de la Syrie et pour arracher, en second lieu, un accord de nature à réconcilier le régime et des représentants de l'opposition. Or, au moment même où doit s'ouvrir le sommet de Sotchi, une autre réunion regroupant, cette fois, l'opposition version saoudienne est prévue à Riyadh, officiellement «à la demande de différentes factions» soucieuses de «resserrer les rangs» avant la tenue de la prochaine rencontre onusienne Genève VIII le 28 novembre. Pour Moscou, Téhéran et Ankara, qui ont pris acte du report de la conférence inter-syrienne de Sotchi pour cause de désaccord sur l'identité de certaines factions invitées, comme les FDS, apparentées aux PYD, au grand dam de la Turquie qui les considère comme des organisations terroristes, l'essentiel est de parvenir à la tenue d'un congrès national syrien regroupant outre le régime syrien lui-même, certains groupes de l'opposition acceptés par Damas ainsi que le Conseil national syrien établi à Istanbul. La Turquie veut empêcher l'émergence d'une entité kurde, indépendante ou non, à ses frontières et, pour cela, elle rejoint l'Iran qui refuse également l'enclave kurde d'Afrin, dans le nord-ouest du pays, où les YPG, branche armée du PYD, rêvent d'instaurer leur premier bastion qui permettra le morcellement de la Syrie. Chose catégoriquement rejetée par l'Iran qui accuse Israël d'oeuvrer en sous-main dans cette perspective. Le plan israélien a été d'ailleurs pris en compte par les Etats-Unis qui ont vu dans le cessez-le-feu conclu dans le sud syrien un engagement à un retrait des forces pro-syriennes. Mais Moscou a répliqué sèchement par son MAE, Sergueï Lavrov, qui a déclaré que «la présence iranienne en Syrie est légitime» et que le véritable danger résulte des «terroristes étrangers et militants rattachés aux groupes de l'opposition armée que les Etats-Unis soutiennent». Le démenti visait également le Premier ministre israélien qui affirmait la veille qu'Israël se tiendra «aux côtés des pays du camp modéré dans le monde arabe», ajoutant que ce «rapprochement croissant est bénéfique en premier lieu pour la paix et la stabilité dans la région». Le message aura été reçu cinq sur cinq par Damas, bien sûr, mais aussi et surtout par le Liban vers lequel tous les regards se tournent depuis quelques semaines.