Tous ces mouvements de protestation ont un dénominateur commun: le ras-le-bol. De Tamanrasset à Béchar en passant par Ouargla et d'autres localités du pays, des émeutes éclatent chaque jour et chaque année à la même période. Les revendications sont toujours les mêmes aussi bien à Tamanrasset qu'à Béchar ; chômage, mal vie, avenir incertain, distribution de logements jugée illégales, manque de prise en charge et absence des autorités locales sur le terrain de la contestation. Depuis quelques jours, Tamanrasset semble sous état de siège. La raison, une contestation populaire sur fond de revendications sociales. Les contestataires dénoncent la mauvaise gestion des élus locaux quant à leur prise en charge après les dernières intempéries ayant touché la région. Ces émeutes viennent après celles de Béchar début juillet dans le Sud-Ouest algérien suite aux coupures électriques. En cette période de canicule, plusieurs jeunes de Béchar ont exprimé leur ras-le-bol en occupant les ruelles de la ville. La colère de la population est due essentiellement à des coupures répétées et prolongées de l'électricité dans les foyers, plongeant ainsi la région dans le noir. Par ailleurs la ville de Tarf a connu un début de semaine houleux. La population excédée par les pénuries d'eau à répétition d'une part, et la liste des 34 bénéficiaires du logement social d'autre part a bloqué la R N 82 en signe de protestation. A la même période Menia, une petite localité de Constantine a vécu les mêmes scènes. La raison, la recrudescence des accidents mortels de la route. Auparavant des émeutes ont éclaté à Djanet fin juin, lorsque la population a condamné le manque de prise en charge par les autorités après les intempéries qui ont causé d'importants dégâts dans la région du Tassili. La dernière en date a eu lieu à la prison d'El-Harrach. Des détenus ont tenu à exprimer leur répulsion quant à leurs conditions de détention, notamment en ce qui concerne l'hygiène et le suivi médical. Dans d'autres localités, la contestation est générée par les listes de logements. En effet, l'anarchie et l'inadvertance dans l'affectation des logements sociaux qu'ont connues les communes ont contribué à rendre la tension sociale inextricable. Aujourd'hui encore, leurs séquelles sont difficilement effaçables. A chaque fois, les élus sont pointés du doigt quant à cet état de blocage qui a fait que pas moins de 55.000 logements réalisés ont été laissés à vau-l'eau. Les pouvoirs publics n'arrivent peut-être pas encore à se rendre compte de l'énorme préjudice moral et financier causé aussi bien aux citoyens qu'à l'Etat. Cet état de fait engendré par le changement de main de la distribution des logements à la faveur du décret exécutif n°04-334 du 24 octobre 2004 modifiant le décret exécutif n°98-42 du 1er février 1998 définissant les conditions et les modalités d'accès aux logements publics locatifs à caractère social. Ainsi tous ces mouvements de protestation ont un dénominateur commun. Chômage, mal vie, avenir incertain, distributions de logements jugées illégales... tant de facteurs générant chaque année des émeutes à travers le territoire national. De ce fait, il est aisé de dire que le pays risque de sombrer une fois encore dans une spirale de violence au rythme d'une protestation par jour si aucune solution n'est trouvée dans les plus brefs délais par les pouvoirs publics, les autorités administratives et les élus locaux. Or, ces derniers se font le plus souvent remarquer par leur carence de présence sur le terrain. En effet, ils sont rares, pour ne pas dire inexistants, les députés ou sénateurs ayant ouvert un bureau au niveau de leur wilaya ou localité d'origine. Aujourd'hui, l'impression qui prédomine au niveau des couches sociales les plus démunies est que le peuple n'a pas d'interlocuteur, qui lui explique le pourquoi et le comment de l'utilisation des deniers de la République. L'absence sur le terrain de ses représentants au niveau des deux chambres parlementaires, conjuguée à leur silence, fait que le citoyen ne sait plus réellement qui fait quoi dans un Etat plus marqué par l'opacité des décisions prises que par la transparence. C'est pourquoi le plus souvent, le citoyen n'a d'autre alternative pour ses revendications que de recourir à l'émeute. Aussi, il est à se demander s'il ne faut pas organiser des élections locales anticipées au niveau de toutes les localités comme celles qui sont prévues dans le cadre des incidences de l'accord sur la plate-forme d'El Kseur? C'est du moins ce que pense une bonne frange de la population qui estime que les pouvoirs publics tiennent là une occasion idéale pour recomposer le champ politique local et pour redéfinir de nouvelles missions des APW et des maires, dans le cadre de la réforme des collectivités locales et de l'administration, et pour donner toutes les chances au programme quinquennal du président de la République.