«Les Algériens ne lisent pas beaucoup», serait-on tenté d'affirmer. Cependant, la lecture fait partie de notre quotidien. C'est vrai que les jeunes d'aujourd'hui ne feuillettent que dans une faible mesure les romans. Interrogé, Ali, ingénieur en aménagement du territoire et actuellement pompiste dans la station d'essence paternelle, déclare: «Moi, je lis beaucoup. C'est vrai qu'avant, lorsque j'étais étudiant je lisais les romans. Maintenant je n'ai guère le temps de bouquiner. Toutefois, je lis les journaux et les magazines scientifiques comme Science et Vie». Une autre personne interrogée, d'un certain âge, renchérit: «Les jeunes d'aujourd'hui sont beaucoup plus portés sur les médias chauds que les médias froids. Ils préfèrent regarder les films et ne prennent pas la peine de consacrer une partie de leurs loisirs à faire la lecture.» Ce dernier affirme encore: «Là où j'ai le temps, je bouquine. Que ce soit dans le bus, ou au café, je dois toujours avoir un écrit sous la main tel un journal ou un livre». Abdelkader quant à lui est agent commercial dans une boutique de pièces détachées d'autos. Il affirme: «Je m'adonne à mon dada qui consiste à acheter les livres qui traitent de la mécanique automobile.» Nadira est un cas d'espèce dans la nouvelle génération. C'est une élève studieuse de terminale qui, poussée par les bons soins et les conseils de son père, s'est mise récemment à bouquiner pour améliorer son français. En plus de ce passe-temps, elle se familiarise avec le jeu des mots croisés. Et combien sont-ils, ceux qui s'identifient au modèle de Nadira? En fait, selon les dires des uns et des autres, il y a actuellement une désaffection du public vis-à-vis des librairies. Ali Bey, responsable de la librairie du Tiers-Monde, sise à Alger, en fait le constat: «Nous ne vendons pas beaucoup en ce moment. Il s'est écoulé des moments de pic remarquable durant les années 2000 à 2003. Pour cette année, les ventes ont baissé. Nous lançons un appel aux pouvoirs publics pour qu'ils suppriment la TVA et les taxes douanières. Aussi, nous sommes pour que les manuels scolaires soient distribués dans les libraires. Nous estimons que ces mesures pourront maintenir en vie les librairies et réduire de ce fait les prix des ouvrages, prix qui constituent pour beaucoup de lecteurs, un obstacle.» Il existe pourtant une catégorie de gens qui ne cesse de fréquenter les librairies à la recherche d'ouvrages. Il est vrai, cela soit dit en passant, que les ventes ont baissé. En vérité, un nouveau comportement est facilement décelable dans les nouvelles générations. Celles-ci ont été abreuvées à la culture télévisuelle. Le tube cathodique a remplacé donc le livre de chevet. Pourtant les adeptes du bouquin existent encore. Ils sont là, entre les stands, à feuilleter, consulter et acheter les ouvrages. Ce qui se vend le mieux est évidemment à classer dans le parascolaire mais les mordus de romans où l'histoire est épicée font aussi partie du décor. Autres genres que les romans, les essais, les ouvrages de cuisine, d'art et d'histoire sont recherchés par les clients. Une nouvelle génération de romanciers a émergé et pris la place des Mohamed Dib, Feraoun, Assia Djebar et autres écrivains de talent. Ainsi citons Yasmina Khadra, Maïssa Bey et autres qui sont devenus célèbres. Mais comme l'affirme Ali Bey et d'autres libraires, les ouvrages traitant de politique et d'histoire se taillent la part du lion. Sinon pour voir nos concitoyens revenir vers la lecture, cela est une autre histoire à moins que les autorités publiques prennent les devants et agissent par le biais du secteur éducatif pour inculquer aux enfants, les générations à venir, l'amour du roman.