L'expérience capitalisée par les services de sécurité algériens est tout à coup devenue incontournable pour l'Europe. Avant, et surtout après les attentats de Londres, la coopération en matière de renseignement bat son plein en Europe. La Grande-Bretagne consent, enfin, à extrader des présumés terroristes vers l'Algérie et la France, la justice française remet à l'Italie l'Algérien Othman Deramchi, membre présumé du Gspc et proche de Djamel Lounici, et l'Egypte, tout comme les pays maghrébins, fournissent à Scotland Yard tout leur arsenal du renseignement pour mener à son terme l'enquête la plus compliquée qu'ont eu à solutionner les services de Sa Majesté. La visite à Alger du ministre espagnol des Affaires étrangères Miguel Angel Moratinos, qui avait parlé, notamment de coopération en matière de lutte antiterroriste, puis du chef de la gendarmerie turque, le général d'armée Feuzi Turkeri, interviennent après celles, remarquables, du représentant d'Interpol, du patron de l'Otan, Jaap de Moop Scheffer, du commandant en chef des forces américaines stationnées en Europe, du chef des carabiniers italiens, de la ministre française de la Défense, Mme Marie-Alliot, etc. Cette poussée d'intérêt pour Alger en matière de coopération antiterroriste, s'est notamment traduite par un échange plus accru des informations, un calendrier très chargé sur le plan des échanges militaires et des exercices navals en Méditerranée. Entre 2002 et 2005, l'Algérie a opéré des manoeuvres militaires avec la majorité des forces multinationales dans un cadre bilatéral ou dans le cadre des échanges avec les forces de l'Otan et le général-major Ahmed Gaïd Salah, lorsqu'il ne reçoit pas, passe son temps à répondre aux invitations qui lui parviennent aussi bien de l'Otan que des puissances occidentales. Résultat: Alger est aujourd'hui une capitale très sollicitée. Aussi bien sur le plan de la lutte militaire antiterroriste que sur celui de la lutte politique antiterroriste. Le plan «Flintlock 2005» élaboré par Washington et lancé à l'endroit des pays du Sahel «en vue d'y contenir toute attaque éventuelle», s'articule autour de la contribution majeure d'Alger, car ni le Tchad, soumis à une forte rébellion du Mdjt, ni le Mali et le Niger, dont les fondements politiques, sociaux, économiques et militaires restent précaires, ni la Mauritanie, soumise elle aussi à une vague de séditions internes, ne peuvent être en mesure de faire réussir l'opération, eu égard à des effectifs militaires déficients et à une logistique obsolète. Le nouveau plan de sécurisation de la Méditerranée lancé aussi bien par les pays de l'UE que par Washington est tout aussi bien centré sur l'apport d'Alger. Le Bassin méditerranéen est devenu une zone de passage pour le pétrole et le gaz. Deuxième grand fournisseur européen pour le gaz, après la Russie, l'Algérie sera obligée, à l'horizon 2009, de sécuriser la berge sud de la Méditerranée, dont elle occupe de larges espaces. Washington pense de son côté que la Méditerranée est une zone de transit pour les activistes et les terroristes qui peuvent s'engouffrer à partir de l'Extrême-Est méditerranéen (zone d'extrêmes turbulences) et aboutir dans l'océan Atlantique, donc, aux portes des Etats-Unis d'Amérique. Aussi, sécuriser la Méditerranée est devenu une hantise pour Washington, qui s'emploie avec les forces déjà sur place et avec l'aide de pays comme l'Algérie, à contenir «la menace». L'expérience capitalisée par l'Algérie en quinze ans commence à peine à porter, et il est attendu qu'elle atteindra le plus haut degré de l'intérêt des pays occidentaux encore plus dans les mois à venir. En 2001, 2004 et 2005, trois grandes villes, New-York, Madrid et Londres se sont réveillées, soudain, sur le bruit d'un terrorisme qu'elles ne maîtrisent pas, et qui, à Alger, fait partie d'un passé déjà vaincu.