Le propriétaire des lieux reconnaît l'état de délabrement de son établissement et s'engage à faire les travaux nécessaires. L'hôtel Chelif, situé en plein centre-ville d'Oran vient de faire l'objet d'une mesure de fermeture décidée par la wilaya le 7 juillet dernier pour graves manquements aux normes d'hygiène. La décision qui est qualifiée de juste même par le propriétaire de l'établissement aggrave la situation de 23 familles qui y vivent depuis près de 25 ans et qui se retrouvent du jour au lendemain sans toit pour les abriter. La mesure, dans son premier article stipule que l'hôtel est fermé pour une durée de 90 jours par mesure disciplinaire administrative pour non-respect des normes d'hygiène, sanitaire et de salubrité. Ces derniers sont énumérés dans l'énoncé de la décision comme suit: Découverte de 2 cas de tuberculose qui ont séjourné dans l'établissement avant de le quitter. L'existence d'une chambre transformée en cuisine, l'absence de douches et de conduites d'évacuation des eaux usées, l'insalubrité des lieux. Le propriétaire des lieux reconnaît l'état de délabrement de son établissement et s'engage à faire les travaux nécessaires pour la réhabilitation de son hôtel. Mais pour ce faire, il doit faire évacuer les familles qui y vivent depuis des années. Ces dernières s'estiment lésées par la décision et menacent de recourir à des actions de rue si elles sont expulsées des lieux. «Nous n'avons pas où aller, dira Mordjana. J'habite cette chambre insalubre avec ma fille et ma petite-fille. J'ai déposé depuis dix ans une demande de logement et la commission m'avait attribué 125 points avant l'enquête sociale. Je ne peux pas quitter l'hôtel, où irais-je», dira-t-elle. Madame Dahou qui a vu son mari dans la chambre d'hôtel qu'elle occupe avec ses enfants n'arrive pas à comprendre comment on décide de les jeter dehors sans ménagement alors que leurs demandes de logement croupissent dans les tiroirs de l'administration. «Je n'ai même pas pu veiller mon mari lors de son décès. Sa dépouille a été transférée à la morgue quelques minutes après sa mort. Qu'on nous donne un logement puisque nous y ouvrons droit», dira-t-elle. Bouchiba Nouredine vit lui aussi cette situation. «Je partage cette chambre avec mes enfants dont certains sont adultes aujourd'hui. Mon aîné a préféré s'engager dans l'armée pour fuir le calvaire que nous vivons au quotidien. Ma demande de logement date de 1985 et à chaque distribution nous voyons nos espoirs fondre, pourquoi?», s'interrogera-t-il. Certaines familles sont nombreuses. Ces dernières partagent l'exiguïté et l'insalubrité de l'unique chambre qui leur sert de cuisine, de lieu de séjour, de chambre à coucher. Les enfants scolarisés n'arrivent même pas à réviser leurs cours dans ces lieux insalubres. «Certains enfants sont nés dans cet hôtel. Certains clients qui étaient célibataires se sont mariés et occupent aujourd'hui avec femme et enfants la misère de l'hôtel Chelif. Qu'on nous donne des logements ou qu'on nous trouve une solution pour ne pas nous retrouver dehors», disent-ils. Concernant le cas de tuberculose censé être découvert parmi les clients de l'hôtel, son propriétaire dira: «je ne peux pas exiger un certificat pour chaque client qui rentre, je ne peux pas savoir si quelqu'un est malade». Un employé dira, quant à lui, que le nom du client, un Africain de passage à Oran, ne figure même pas sur le registre des entrées de l'hôtel. Les familles qui habitent cet hôtel sont aujourd'hui menacées par la coupure d'électricité et d'eau que pourrait décider le propriétaire. «Nous comprenons son désarroi mais ceux qui ont pris la décision de fermeture doivent nous trouver une solution.» Ce dernier, malade, cardiaque et désemparé, dira: «je dois entreprendre des travaux pour réhabiliter mon hôtel mais que dois-je faire, je ne peux pas couper l'eau et l'électricité pour jeter dehors ces familles, je suis un être avant tout.». En attendant une solution au calvaire de ces familles, la tension reste vive parmi les familles habitant l'hôtel Chelif.