Le sujet de l'exécution des deux otages était sur toutes les lèvres. Le ciel d'Ath Yemmel s'est assombri soudainement lorsqu'une chaîne étrangère annonçait l'assassinat d'un des siens en ce mercredi du mois de juillet. Timezrit n'avait pas cru au départ, croyant à une fausse information mais très vite, on s'est rendu à l'évidence. L'Entv venait de confirmer l'exécution des deux diplomates algériens, Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi, kidnappés le 21 juillet dernier par le groupe du chef d'Al Qaîda en Irak, Abou Moussab Al Zarkaoui. L'information s'est alors propagée telle une traînée de poudre, plongeant la région d'Ath Yemmel dans une profonde tristesse. Le jeudi matin, au chef-lieu de la commune de Timezrit, plus précisément à El Had, situé à quelques kilomètres du village natal de Azzedine, c'est la consternation. Tous les commerces étaient fermés, deuil oblige. Les quelques groupes de jeunes rencontrés sur les lieux guettaient la moindre information. Auparavant, dans la ville de Sidi Aïch, centre urbain le plus proche, le sujet de l'exécution des deux otages était sur toutes les lèvres. Les citoyens se rabattaient sur les journaux du jour à la quête des moindres détails. A El Had, chef-lieu de la commune de Timezrit, c'est véritablement le deuil. Un deuil qui a commencé à l'annonce de la triste nouvelle d'exécution. Le mouvement s'est visiblement ralenti depuis la veille. La tristesse se lit sur les visages des gens. Toutes les fêtes et cérémonies de mariage ont été détournées de leur caractère festif. Certains ont jugé utile de les annuler. Pour ce week-end, point de musique ni chants. Il en sera de même partout dans les villages de la commune. A Ighil Guemour, village natal de Azzedine, l'atmosphère était lourde. Près du domicile parental, des processions de gens, amis et parents arrivaient par intermittence pour marquer comme il est de coutume ici, leur solidarité. Il n'était pas facile de se frayer un chemin. Doucement, nous parvenions près du père d'Azzedine que nous avons trouvé visiblement peiné, mais recevait les gens dignement. Ici, la surprise est de taille. Toutes les familles attendaient plutôt la libération des diplomates. «On attendait plutôt leur libération», déclarait hier celui qui se présentait comme le cousin d'Azzedine, avant de poursuivre: «Nous étions tellement optimistes que la nouvelle a été terrible pour nous.» Près de lui, un autre proche était en larmes. «Ils ont osé!» , criait-il avant qu'un autre le calme. A cet instant, la venue du ministre des Affaires étrangères est annoncée. Le comité du village tentait d'organiser la situation au milieu de pleurs de femmes et ceux plus timides, des jeunes qui ne connaissaient d'Azzedine que l'ambition et des apports tous azimuts. Tous voulaient parler de ce qu'il a apporté à sa commune de son vivant. Plus que tout le monde, les jeunes semblent le connaître le plus, lui qui a été membre fondateur du club de foot de la commune. Toutes les discussions étaient focalisées autour de la tournure dramatique du rapt et la vie d'Azzedine. «Je n'arrive pas encore à croire que des Algériens se fassent tuer en Irak, eux dont l'Etat n'a de cesse manifesté son soutien au peuple de ce pays meurtri depuis l'invasion américaine», commentait un autre jeune, visiblement très au fait des positions algériennes. «Ils devraient nous accueillir les bras ouverts», soutenait-il. Un vieux rétorquait ironiquement: «Ils ne veulent pas de notre expérience libératrice parce qu'ils ne se battent pas pour leur liberté.» Eux, ce sont les terroristes qui ont exécuté Azzedine et Ali Belaroussi. Un autre jeune nous apostrophe pour affirmer bien connaître le défunt: «C'était un homme aux qualités nobles, modeste, disponible et très sociable», témoigne-t-il. «Azzedine a toujours été aux côtés des jeunes», soutient un autre qui rappelle son parcours sportif dans la commune. Pendant tout ce temps, la population s'est déplacée en masse pour exprimer sa compassion et sa solidarité à la famille du défunt. Sur les coups de midi, la délégation ministérielle est annoncée. Parallèlement, une minute de silence à la mémoire des défunts Ali Belaroussi et Azzedine Belkadi a été observée. Mohamed Bedjaoui, ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères, à la tête d'une forte délégation, arrivait sur les lieux pour présenter au nom du gouvernement et de l'Etat algérien les condoléances à la famille du défunt Azzedine. D'autres délégations du RND, FFS, FLN et des archs... affluaient sur les lieux. Bref, tout le monde a compati avec la famille d'Azzedine. Durant cet hommage, la sourate El Fatiha a été prononcée par tous les présents qui se rappelaient le souvenir de deux hommes, connus pour leur probité, leur simplicité et leur sens du devoir au service de l'Etat. Le secrétaire général de la wilaya de Béjaïa et le chef de cabinet se sont rendus la veille pour accomplir la même démarche. Durant notre passage, le comité créé le jour suivant l'enlèvement d'Azzedine discutait d'une marche de dénonciation. Elle aura lieu aujourd'hui à Timezrit.