Sans surprise, le président Moubarak a annoncé jeudi sa candidature pour un cinquième mandat. Le raïs égyptien, Mohamed Hosni Moubarak 77 ans, qui a fait durer le suspense pendant de longues semaines a finalement confirmé jeudi, dans un discours prononcé dans son village natal de Ménoufiya, à 80 km du Caire, sa candidature pour un cinquième mandat consécutif. De fait, cette candidature était une quasi-certitude et n'a surpris que ceux qui voulaient bien l'être. M.Moubarak que les événements, nationaux et internationaux, ont contraint à jouer serré avait beaucoup d'ambitions pour son fils cadet, Gamal Moubarak, 43 ans, l'homme «fort» du parti au pouvoir, (El Watany PND, Parti national démocratique) qu'il voyait sur le trône d'Egypte et comme son successeur le plus approprié. Mais les circonstances internes et internationales l'ont, pour ainsi dire, contraint à surseoir à cette ambition de voir son fils hériter du pouvoir. De fait, à ceux qu'une telle perspective choquait, le président Moubarak répliquait que l'amendement de la Constitution donnait le droit à Moubarak Junior à postuler à la magistrature suprême de l'Egypte. Partie donc remise. S'adressant jeudi à la télévision à la nation égyptienne, le président sortant, au pouvoir depuis 24 ans, a déclaré: «Je suis décidé à demander la confiance du peuple égyptien pour un nouveau mandat». Dès lors, la question quant au prochain raïs égyptien se trouve réglée avant même qu'elle ne soit posée. Car il ne fait aucun doute que M.Moubarak sera reconduit pour un nouveau mandat de six ans. D'une part, parce que le président Moubarak n'aura en face de lui aucune concurrence sérieuse, d'autre part, du fait du boycott massif de l'opposition qui estime que les conditions ne sont pas actuellement réunies en Egypte pour permettre une élection loyale et sincère. L'opposition refuse de jouer le jeu d'une démocratie biaisée par le monopole du parti au pouvoir sur les institutions du pays. Aussi, malgré l'instauration du pluralisme électoral - au rabais, accuse l'opposition car, selon elle, il est sous le contrôle du PND - Hosni Moubarak est assuré, au soir du 7 septembre, de rempiler pour six nouvelles années à la présidence de l'Egypte. Les candidatures du président du parti Al Ghad, Ayman Nour et de six présidents de petites formations politiques ne seront là que pour créer l'ambiance et donner un semblant de démocratie pluraliste. Dans son discours, prononcé sous les acclamations de ses partisans, le président Moubarak a assuré que «l'Egypte est à la croisée des chemins, régresser ou aller de l'avant» en annonçant un programme axé sur de nouvelles réformes vers, explique-t-il, «une société démocratique, le multipartisme, la défense des droits de l'Homme et l'Etat de droit» ainsi que, cela va de soi, « des réformes économiques » libérales. Mais, tout cela ne vient-il pas un peu tard, quand M. Moubarak, qui disposait d'un pouvoir sans partage, avait la possibilité de faire de ce grand pays le réel leader arabe en matière de démocratie, de droit de l'homme et des libertés individuelles et collectives? Ce qui n'a pas été le cas. En effet, peut-on se demander quelle sera l'Egypte de demain sous la férule d'un pouvoir qui, depuis 24 ans, a fait du surplace, ne faisant que gagner du temps alors que les questions de la démocratie et du terrorisme, islamiste particulièrement, se posaient au pays des Pharaons depuis au moins trois décennies. Pour ce qui est du terrorisme, la chose n'est pas nouvelle, notamment après l'assassinat le 6 octobre 1981 du président Anouar El-Sadate par l'islamiste Khaled Islambouli. Aussi, le terrorisme n'est pas une nouveauté pour un pouvoir qui a toujours tergiverser à s'attaquer de front à ce phénomène, alors que les Frères musulmans et les Jamai'yate islamistes, interdits de fait, étaient tolérés par les pouvoirs publics. Or, outre le terrorisme islamiste, qui s'attaque aujourd'hui de front à l'Egypte - dont les derniers forfaits ont été les attentats meurtriers contre la station balnéaire de Charm El-Cheikh et l'assassinat en Irak d'Ihab Al-Chérif, chargé d'affaires égyptien à Bagdad - le nouveau président égyptien élu lors de la présidentielle du 7 septembre prochain sans nul doute M.Moubarak aura aussi le difficile challenge de démocratiser l'Egypte. Un problème pendant depuis 24 ans et l'instauration de l'état d'urgence. De fait, le président Hosni Moubarak, qui étrenne le plus long pouvoir jamais exercé en Egypte, même par le mythique Gamal Abdel Nasser, ne s'est jamais mis en situation de lutter efficacement contre le fléau que constituait le terrorisme, ni n'a mis à profit sa longue expérience du pouvoir pour réformer les institutions du pays et redonner la parole et la participation au pouvoir aux citoyens égyptiens. C'est de fait sous les pressions exercées sur lui par l'administration américaine du président George W.Bush, que Hosni Moubarak s'est vu contraint et forcé de jeter du lest et ouvrir, parcimonieusement, le champ politique égyptien, d'où l'amendement de la loi fondamentale qui a permis, sous conditions - draconiennes estime l'opposition - la première participation plurielle à la présidentielle égyptienne. La candidature du président sortant égyptien, Hosni Moubarak, laisse en fait les choses en l'état - car la stabilité du pouvoir obtenue au prix d'une répression féroce de toute opposition - et rassure peu sur les lendemains du pays des Pharaons.