Les émigrés représentent une clientèle convoitée par les commerçants et indésirable pour les habitants. A l'instar des autres wilayas, Constantine vit chaque été le flux et l'arrivée massive des milliers d'émigrés. Leur grand nombre est perçu par les commerçants comme une aubaine pour leurs activités, leur permettant de réaliser leur meilleur chiffre d'affaires de toute l'année. Pour les quelques commerçants à qui nous avons posé la question, les émigrés dépensent en moyenne entre 1000 et 1500 euros en l'espace de quelques jours. En termes de dinars, les sommes sont de 100.000 et 150.000 DA. Et c'est ainsi le phénomène survient à l'entame de chaque saison estivale, à la grande satisfaction des commerçants, qui n'hésitent plus à squatter les trottoirs, notamment les cambistes clandestins qui opèrent au grand jour, exhibant des liasses et proposent l'achat ou la vente d'euros. Dans ce marché noir, les prix sont compétitifs. Une politique commerciale pratiquée spécialement pour attirer les émigrés, mais ces derniers sont souvent, pour ne pas dire toujours, victimes d'une escroquerie. Cette pratique est malheureusement devenue légion dans certains coins de la ville des Ponts. Et, si jamais la victime réclame une réparation, elle est battue et dépouillée. On citera à titre d'exemple le cas d'Assia, une Algérienne installée en France depuis peu. En visite chez sa famille, cette émigrée s'est vu escroquer par un citoyen qu'elle connaissait pourtant. Sous prétexte qu'il avait besoin de 120 euros, il demande à la victime de les lui vendre, mais depuis plus d'un mois, Assia n'a jamais pu récupérer son dû, nous dit-elle, malgré son insistance. Ce cas n'est pas isolé, d'autres émigrés ont vu pire. Mais cela ne semble pas empêcher les nostalgiques de l'Algérie de s'inviter de plus en plus à venir découvrir leur pays, surtout depuis que la situation sécuritaire s'est améliorée. Cependant, si le flux des émigrés est un fait qui profite aux commerçants, il est pour les habitants synonyme d'envahissement de leur ville. Ces émigrés, qui viennent particulièrement de France, agressent et bousculent le quotidien des citoyens, notamment ceux qui ne peuvent partir en vacances faute de moyens financiers et qui sont contraints donc de vivre la fournaise de la ville, laquelle devient, surtout durant les mois de juillet et août, très agitée et bruyante. Exhibant leurs véhicules, les émigrés sont la majorité du temps jugés indisciplinés, surtout ces jeunes inconscients, qui s'aventurent à faire de la vitesse en plein centre-ville, se croyant dans un rallye automobile. Ce qui a été relevé par certains agents de la circulation, c'est que souvent les émigrés se mettent en double file, ce qui obstrue carrément la voie de ceux qui attendent sous un soleil de plomb. Par ignorance du code de la route ou par snobisme, les visiteurs affichent un « incivisme » avéré, nous ont confié des habitants interpellés sur ce sujet. Sur un autre volet, l'échange de la devise ne se pratique jamais au niveau des banques, c'est le marché noir qui détient le monopole. Sans pouvoir avancer des chiffres exacts, économiquement parlant, certains connaisseurs avancent que les banques algériennes font face à des pertes extraordinaires, surtout que le phénomène est pratiquement incontournable.