Plutôt, l'ONU pourquoi faire? Pourquoi faire en effet, dès lors que d'aucuns estiment désormais que l'Organisation des Nations unies n'a plus de raison d'être et constitue, surtout, un poids qui revient cher à la communauté des Nations. En fait, l'ONU n'est pas cette contrepartie décisionnelle capable d'avoir du répondant et d'imposer des solutions aux conflits qui sapent la stabilité du monde. Faut-il cependant s'en étonner alors que l'ONU n'est en fait que l'interface du jeu ambiguë des grandes puissances? De fait, dès sa fondation - en mai 1945 - l'Organisation des Nations unies était invalidée par des manques incapacitants fâcheux: elle ne dispose pas d'un pouvoir politique, aggravé par la présence de cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité [ledit pouvoir exécutif des Nations unies]. Ainsi, l'ONU a fonctionné, fonctionne, selon les rapports de force induits par et entre les membres permanents du Conseil de sécurité: Etats-Unis, Royaume-Uni, France d'une part, Russie et Chine d'autre part. En fait, les Nations unies ne sont pas gérées comme un «gouvernement mondial», mais plutôt en tant que «modérateur» ou «médiateur» car les décisions finales sont prises par le Conseil de sécurité. Aussi, aucune résolution ne peut être adoptée par le Conseil de sécurité s'il n'y a pas consensus entre les «cinq». L'utilisation du veto - lorsque aucun accord n'a été trouvé entre les «cinq» - est la marque la plus probante du poids qu'ont les «membres permanents» sur la marche de l'ONU. Quand en 2003, les Etats-Unis ont décidé d'envahir l'Irak - avec des conséquences dévastatrices sur ce pays - ils se sont passés de l'accord de l'ONU et du Conseil de sécurité. Autre fait: l'exemple de la Palestine! Sur 193 membres des Nations unies, plus de 150 reconnaissent la Palestine, une majorité écrasante. Or, la Palestine a peu de chance d'être admise à l'ONU, dès lors que c'est le Conseil de sécurité qui acceptera ou non le nouveau venu. Pour une raison bien simple: même si les 14 voix membres du Conseil de sécurité disent «oui», il suffit que l'un des permanents vote non [rejet] pour que l'admission d'un pays soit remise sine die. Or, les Etats-Unis ont répété à satiété qu'ils opposeront leur «veto» à la demande d'adhésion de la Palestine. C'est celle-là la démocratie version onusienne, où un pays peut avoir raison contre les 150 autres qui veulent voir la Palestine accéder à l'ONU. Israël [qui ne dispose pas du droit de veto] s'oppose à cette adhésion, les Etats-Unis le suppléent et brandissent le veto en lieu et place de l'Etat hébreu. C'est à peu de chose près le même scénario pour le Sahara occidental, où c'est la France qui joue le rôle d'obstruction à la place du Maroc, allant jusqu'à s'opposer à l'élargissement de la mission de la Minurso, à la surveillance des droits de l'homme au Sahara occidental. En fait, pour chaque conflit, chaque affaire qui agitent notre monde - on le voit en Syrie, au Yémen, en Afghanistan, en Corée du Nord, en Iran (ce dernier pour son présumé programme nucléaire militaire) - les diplomates de l'ONU négocient entre eux - négociations de dupes - pour trouver un accord ratifié par chaque partie. Souvent ces accords se font au détriment du droit international et des pays concernés par les conflits. Or, la Charte de l'ONU est claire et ne semblait souffrir d'aucune interprétation. De fait, comme l'admettent des diplomates onusiens, les négociations sont souvent une question de personnalités, si ce n'est d'atomes crochus, pour arriver à un consensus - notamment au Conseil de sécurité - où chaque partie doit faire des concessions, édulcorant le texte pour qu'il fasse l'unanimité. Dit autrement, ce ne sont point les intérêts de la paix, du droit à l'autodétermination des peuples, de la souveraineté des nations et tutu-quanti qui font loi mais, plus prosaïquement, les intérêts stratégiques, bien compris des grandes puissances qui sont seuls pris en compte. La Syrie, le Yémen, comme la Palestine et le Sahara occidental, nous en administrent la preuve, qui sont victimes de la voracité des «grands». Autre exemple, le chef de la diplomatie française en visite hier en Iran, se promettait d'aborder avec ce pays la question des missiles balistiques iraniens. A quel titre Paris prétend aborder avec Téhéran un domaine relevant de la stricte souveraineté et de la sécurité de ce pays? La France acceptera-t-elle qu'un diplomate iranien (ou autre) soulève la question des missiles balistiques français et leur dangerosité sur la sécurité régionale, voire internationale? Ainsi, Paris piétine les prérogatives de l'ONU, seule (naturellement) habilitée à s'informer sur ce qui peut constituer un danger pour le reste de l'humanité. Ce n'est là qu'un exemple parmi mille, qui montre l'inutilité actuelle d'une organisation neutralisée et ne répondant pas aux missions qui lui ont été assignées à sa fondation. Son sort risque d'être celui de la défunte Société des Nations (SDN, l'ancêtre de l'ONU).