Pluie de missiles houthis sur l'Arabie saoudite Outre l'opposition démocrate qui dénonce l'assistance militaire US, on trouve des ONG comme Amnesty International, qui accusent nommément les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France de fournir des armes à l'Arabie saoudite et à ses alliés de la coalition... Six missiles ont été tirés hier par les rebelles houthis en direction de l'Arabie saoudite, trois d'entre eux visant directement la capitale Riyadh, deux autres vers la bourgade de Jazane et un dernier en direction de Najrane, dans le sud du pays. Le jour-même, ils se sont livrés à une démonstration de force dans la capitale Sanaa qu'ils contrôlent entièrement à l'occasion du troisième anniversaire de l'intervention saoudienne au Yémen. Ces tirs ont été confirmés par le porte-parole de la coalition militaire qui intervient au Yémen depuis le 26 mars 2015, le colonel Turki al Maliki, qui a précisé que les missiles ont tous été interceptés, mais que leurs débris ont néanmoins fait un mort et plusieurs blessés. «C'est un développement grave», a-t-il par conséquent estimé sans autre précision quant à la nature de la riposte saoudienne, Riyadh accusant régulièrement l'Iran de soutenir activement la rébellion houthie. Pour bien étayer sa force, celle-ci a mobilisé hier, des centaines de milliers de partisans sur la place Sabyine d'où partaient pendant des heures chants de guerre et poèmes enflammés contre l'Amérique, les sionistes et leurs alliés chrétiens fondamentalistes à la faveur d'une journée baptisée «résistance à l'agression». Le chef de la rébellion, Abdelmalik al Houthi, a pris la parole pour expliquer que les Yéménites sont «prêts à plus de sacrifices», même si les trois années de guerre écoulées ont déjà fait plus de 10.000 morts et 53.000 blessés, mettant le pays dans une situation de crise humanitaire sans précédent. L'autre responsable faisant fonction de président de la rébellion houthie, Salah al Sammad, a abondé dans le même sens, estimant que cette journée «envoie un message au monde» et prouve que «trois ans d'agression et de blocus n'ont pas réussi à briser la volonté du peuple yéménite». Jusque-là, il n'y a eu qu'un seul tir de missile contre l'Arabie saoudite, par deux fois, et c'est donc pour la première fois qu'une salve de six missiles est engagée simultanément. D'où la réaction du porte-parole de la coalition qui dénote une grande inquiétude des autorités saoudiennes. L'attaque intervient alors que le prince héritier saoudien, Mohamed Ben Salmane, est toujours en visite officielle aux Etats-Unis où le secrétaire américain à la Défense, James Mattis, l'a invité à relancer les négociations de paix. MBS est considéré par les Houthis comme le principal instigateur de l' «agression militaire» au Yémen. Et sa visite a été saluée d' un rejet par le Sénat américain d'une résolution recommandant l'arrêt de l'assistance logistique américaine aux opérations militaires de la coalition conduite par Riyadh au Yémen. Outre l'opposition démocrate qui dénonce cette assistance, on trouve des ONG comme Amnesty International, qui accusent nommément les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France de fournir des armes à l'Arabie saoudite et à ses alliés de la coalition, alors qu'ils sont «coupables de crimes de guerre» avérés au Yémen soumis à des bombardements aussi réguliers que meurtriers. Pour le porte-parole de la coalition, la salve de missiles tirés, hier soir, constitue un «acte agressif et hostile (qui) prouve que le régime iranien continue d'offrir une aide militaire au groupe armé». Cette accusation n'est pas nouvelle et elle est appuyée par les Etats-Unis qui ont menacé, à plusieurs reprises, d'y répondre par de nouvelles sanctions et, surtout, par une remise en cause de l'accord sur le nucléaire, à moins que Téhéran ne consente à soumettre son programme balistique au contrôle des grandes puissances occidentales. Le démenti iranien se heurte aux déclarations de diverses capitales et même de l'ONU qui affirmait, dans un rapport publié en janvier dernier, que l'Iran a violé l'embargo sur les armes en n'empêchant pas les Houthis de s'approvisionner en drones et missiles balistiques. La situation sur le terrain est tout aussi confuse, puisque les Houthis se disent prêts à «s'entendre sur tout ce qui peut conduire à l'arrêt de l'agression et à la levée du blocus» tandis que la coalition menée par l'Arabie saoudite pose le préalable d'un retrait des territoires conquis par la rébellion, conformément à la résolution 2216 du Conseil de sécurité de l'ONU. Hier soir, les Emirats arabes unis, le Koweït, Bahrein et la Jordanie ont condamné le tir des missiles tandis que le gouvernement du président Hadi affirmait y voir «un rejet très clair de la paix». Une paix bien mal servie si l'on en juge par les nombreux contrats d'armement que le prince héritier est en train de conclure, en mai 2017 avec les Etats-Unis pour un montant mirobolant de 35 milliards de dollars (chiffre jamais atteint dans l'histoire de la superpuissance), le 9 mars 2018 avec le Royaume-Uni pour 11 milliards de dollars sans compter la France qui apporte un soutien sans faille à Riyadh dans sa guerre totale contre le Yémen. Il est vrai que, mardi dernier, le président américain Donald Trump a affirmé au cours de l'audience accordée au jeune prince héritier: «L'Arabie saoudite est une nation très riche et elle va donner aux Etats-Unis une partie de cette richesse, sous forme d'emplois, sous forme d'achat des meilleurs équipements militaires du monde.» No comment. L'Algérie «condamne vigoureusement» Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères a indiqué hier que «l'Algérie condamne vigoureusement les attaques aux missiles tirés, dans la nuit du dimanche au lundi, depuis les terres yéménites sur des régions peuplées de la capitale Riyadh et d'autres villes du Royaume d'Arabie saoudite frère, faisant des victimes parmi les civils». «Extrêmement préoccupée» par cette escalade dangereuse, l'Algérie exprime, une fois de plus, «sa solidarité et son soutien au Souverain, au gouvernement et au peuple du Royaume d'Arabie saoudite frère, dans la lutte contre toute tentative d'atteinte à la sécurité et à la stabilité» du pays et «appelle à l'arrêt immédiat de tels actes hostiles susceptibles d'envenimer la situation et de mener à une escalade dans la région». L'Algérie réitère également «son soutien aux démarches et efforts consentis par les Nations unies», appelant à «emprunter la voie du dialogue et de la réconciliation pour aboutir à un règlement politique de la crise yéménite».