«Donnons un visage aux martyrs des Zaâtcha.» Le nombre de crânes de résistants algériens conservés au Muséum national d'histoire naturelle de Paris Mnhn, selon un dernier recensement, s'élève à 536 venant de toutes les régions d'Algérie, a indiqué à Paris le chercheur algérien en histoire et anthropologie Ali Farid Belkadi. «Le dernier recensement, au 18 avril 2018, s'élève à 536 crânes. Ils viennent de toutes les régions d'Algérie, de Khenchela, d'Oran, de Batna, de Skikda, d'El-Kala, d'Alger. Parmi ces 536 crânes et ossements figurent ceux d'hommes préhistoriques, très peu nombreux. Tous n'ont rien à faire en France», a affirmé dans un entretien à l'APS ce chercheur qui avait découvert, dans le cadre d'un travail de recherche en mars 2011, les crânes d'Algériens qui avaient combattu à Zaâtcha, Biskra, l'armée française en 1849. «Le muséum de Paris détient ces restes de Biskra qui portent tous les références du musée, suivies d'un numéro d'ordre», a précisé ce spécialiste de l'histoire antique et l'épigraphie libyque et phénicienne, soulignant que ces crânes originaires de Biskra, glanés par un médecin militaire qui vivait dans les Aurès, appartiennent aux résistants de Zaâtcha, en plus de ceux du cheikh Bouziane et Moussa Al-Darkaoui. Il faut rappeler que le siège de Zaâtcha, 30 km au sud-ouest de Biskra, s'est déroulé du 16 juillet au 26 novembre 1849, opposant les troupes de la colonisation française du général Emile Herbillon, aux résistants algériens du cheikh Bouziane, et qui s'est terminé par l'extermination de la population de l'oasis. Vers 9h30mn, le 26 novembre 1849, la tête du cheikh Bouziane, celle de son fils Al-Hassan et celle de Si Moussa Al-Darkaoui, sont placées au bout de trois piques. Un instant avant qu'on ne le fusille, à un soldat l'ayant bousculé un peu rudement avec la crosse de son fusil, Al-Hassan, le fils de Bouziane dit: «Je suis le fils de Bouziane, on tue le fils de Bouziane, on ne le frappe pas», a-t-il évoqué, soulignant que le crâne d'Al-Hassan «n'a pas été retrouvé au muséum de Paris, il doit être rangé dans une autre collection». Il y a en tout 70 crânes, tous originaires de Biskra, qui sont conservés au Mnhn, a-t-il indiqué, relevant qu' «aucun anthropologue français n'a jamais pu récolter autant de crânes en une fois». Le chercheur a ajouté que les autres crânes en provenance de l'Aurès, «toujours émanant du même médecin», appartiennent à des résistants, membres de tribus de l'Aurès soulevées par le marabout de grande renommée, Si Abdelhafidh, cette insurrection est liée à celle de Zaâtcha. Par ailleurs, l'auteur de ces recherches a indiqué qu'il est en relation avec un atelier spécialisé dans la reconstruction/reconstitution faciale de ces crânes pour faire connaître aux Algériens à quoi pouvaient ressembler ces résistants. «Cela coûte environ 17 000 euros par buste + l'emballage, le transport et les douanes. L'objectif est de faire connaître aux Algériens à quoi pouvaient ressembler Cherif Boubaghla, Mokhtar Al-Titraoui, Moussa Al-Darkaoui, Cherif Boukedida et quelques autres», a-t-il expliqué, en lançant un appel aux sponsors en Algérie pour financer cette opération. Rappelons qu'à la faveur de l'entretien qu'avait eu le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, le 6 décembre dernier, avec son homologue français Emmanuel Macron qui effectuait une visite de travail et d'amitié en Algérie, la France s'est engagée à restituer les crânes de résistants algériens. A cet effet, l'Algérie a demandé, en janvier dernier, officiellement à la France la restitution de ces crânes.