Ces deux événements ont mis à nu les inaptitudes de la superpuissance américaine. Quatre années après l'attaque du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles du World Trade Center, le cyclone Katrina, qui a dévasté le 29 août l'Etat de la Louisiane, -et fait d'importants dégâts matériels et humains dans les Etats du Mississipi et de l'Alabama-, remet au devant de l'actualité l'envers du décor américain, si policé, marqué par l'arrogance de l'Administration Bush Junior. De fait, les images que donnent d'eux les Etats-Unis d'eux-mêmes au monde -surpris par les attentats antiaméricains de New York et de Washington, choqué par le désastre de La Nouvelle-Orléans, et inquiet par l'enlisement américain dans les guerres que l'armée états-unienne livre en Irak et en Afghanistan- font douter du fait qu'il s'agit bien de cette superpuissance intouchable qui domine le monde de par ses capacités militaires, financières, économiques et culturelles. Déjà, le 11 septembre 2001 a fait découvrir au monde un pays fragile face à des attaques d'hommes déterminés, Katrina a mis en exergue l'inefficacité et l'impréparation des Etats-Unis face à un désastre naturel, lesquels se sont trouvés aussi désarmés et désorientés qu'un pays du tiers-monde démuni de tout. Si les attentats de New York et la tragédie de La Nouvelle-Orléans relativisent cette puissance, les guerres que mène l'armée américaine en Irak et en Afghanistan, (dans ce dernier pays les talibans -que tous estimaient avoir été éliminés après les sanglantes batailles d'octobre à décembre 2001- de plus en plus offensifs ont refait surface et font subir des pertes de plus en plus significatives à l'armée américaine) montrent en revanche que la puissance militaire reste inopérante face à la résistance des peuples. Cette impuissance américaine est connotée à l'arrogance dont font montre ses dirigeants, et le premier d'entre eux, le président George W.Bush, qui, fort de la force écrasante de son armée, des finances et de l'économie de son pays, regarde le monde de haut et avec mépris, n'écoutant ni les conseils ni les réserves de la communauté internationale et des Nations unies, allant jusqu'à ignorer l'ONU en décidant unilatéralement l'invasion de l'Irak le 20 mars 2003. Même les Etats-Unis découvrent aujourd'hui, quelque peu ébranlés, qu'ils pouvaient avoir besoin de plus petits qu'eux. De fait, l'opinion américaine, traumatisée par les attentats du 11 septembre, qui a élevé le patriotisme au rang de concept de sauvegarde au lendemain de ce drame, était tout aussi bouleversée par la catastrophe de la Louisiane et le sentiment de honte qui l'a submergée face à l'impuissance générale à venir en aide aux habitants des trois Etats du sud. George W.Bush, qui a axé tout son premier mandat sur la lutte antiterroriste aura fait tout faux ne réussissant dans aucun de ses programmes lancés à grand renfort de publicité et de tapage médiatique: capturer mort ou vif le chef d'Al Qaîda, Oussama Ben Laden, qui nargue depuis quatre ans la superpuissance américaine; instaurer la démocratie en Irak et en Afghanistan; réduire la nuisance terroriste. Or, l'Irak qui n'a jamais connu le terrorisme, en dépit -sans doute à cause- de la dictature de Saddam Hussein, est devenu le vivier du terrorisme international, fait relevé lundi par le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, qui a estimé que le pays était devenu un repaire de terroristes «pire que l'Afghanistan» des talibans. Ce même Afghanistan, qui donnait l'impression d'être sur la bonne voie, semble retomber dans la violence terroriste qui l'a marqué ces dernières années et, surtout, à repris -depuis sa «libération» par les Etats-Unis- sa position de leader mondial de la production de drogue. Un bel exploit en vérité dénoncé récemment par l'ONU qui estime que l'Afghanistan est redevenu le premier producteur de drogue dure. Un beau gâchis pour George W.Bush et son équipe qui ont tenté de mettre le monde au pas en faisant des Etats-Unis l'unique vecteur des décisions qui engagent la communauté internationale. De fait, l'administration Bush, en marginalisant l'ONU dans les grands dossiers qui interpellent le monde s'est isolée d'elle-même de ses partenaires dans le monde. En fait, sous le prétexte de se consacrer à la lutte contre le terrorisme, et obsédée par la chasse à Ben Laden, -ce dernier court toujours de même que son compère, le chef taliban, le mollah Omar Moudjahid- l'administration Bush a gravement négligé ses engagements nationaux comme la lutte contre les inégalités et la pauvreté, (l'Etat de Louisiane dévasté par le cyclone Katrina -dont 60% de la population est noire- est l'un des plus pauvres des Etats-Unis), promouvoir la santé pour tous, éradiquer les substrats du racisme. D'une manière générale, les Etats-Unis renvoient d'eux une image déformée, qui fait que le mouvement de solidarité envers la Louisiane a été moins spontané qu'il ne l'a été envers les populations du sud-est asiatique lors du tsunami du 26 décembre dernier. Les USA, victimes de leur position dominante sur le monde? C'est le cas de le dire. Mais, de fait, ce qui a stupéfait le monde a été l'incapacité des pouvoirs publics américains à faire face à la catastrophe du cyclone Katrina. Ce qui a fait dire au sénateur démocrate américain Tom Carper: «J'ai peur qu'une tempête qui aurait pu ne coûter que des dizaines de milliards de dollars revienne à plus de 100 milliards, qu'une tempête qui aurait pu faire des centaines de morts se traduise par des milliers de décès. Ce n'est pas comme cela que les choses auraient dû se passer» Autre paradoxe, près de deux semaines après le passage de Katrina il n'existe toujours pas de chiffres officiels des victimes à La Nouvelle Orléans. Ce qui montre l'impéritie de l'administration Bush alors qu'un pays aux moyens limités comme l'Indonésie, frappé par le tsunami, est arrivé à donner dans les 24 heures qui ont suivi le nombre de victimes qui s'est élevé, au final, à 180.000 morts. Elles seront combien les victimes de Katrina à La Nouvelle-Orléans? 10.000, comme l'estime un sénateur démocrate, 20.000 ou plus? C'est encore là, l'un des mystères du passage de Katrina, qui a mis en lumière carence et incompétence de l'administration du président George W.Bush face aux grands défis et cataclysmes.