France Télévisions, TF1 et M6 ont annoncé la création d'une plateforme commune de vidéos en ligne, baptisée Salto. Objectif: faire face à la concurrence du géant américain de la vidéo à la demande, Netflix, qui est en passe de devenir le numéro un de la télévision payante en France. Le trio français fait valoir que cette plateforme en ligne, qui fonctionnera sur abonnement et sans engagement, offrira «une variété sans égal» de programmes. Cette plateforme dite OTT (c'est-à-dire accessible via Internet, sur ordinateur, tablettes ou smartphones, ou sur certains téléviseurs, tout comme Netflix ou Prime Video d'Amazon), «permettra de retrouver tous les meilleurs programmes de télévision, mais aussi de découvrir des programmes inédits». Avec cette union sacrée, Delphine Ernotte et ses homologues, Gilles Pélisson (TF1) et Nicolas de Tavernost (M6) prennent le taureau par les cornes, face à la concurrence fulgurante de Netflix et de Amazon. Dans cette entité TF1 et France Télévisions représentent 75% de la création audiovisuelle en France. Les trois partenaires se disent ouverts à ce que d'autres chaînes les rejoignent. La date de lancement et les tarifs n'ont pas été précisés, mais selon une source proche du dossier, ce nouveau service devrait afficher un abonnement de base inférieur à 5 euros par mois. Mais ce trio sera amoindri par le manque de soutien de Canal+, l'autre chaîne cryptée, qui constitue avec ses programmes américains et ses exclusivités audiovisuelles une force inestimable contre Netflix. D'ailleurs, Netflix, qui est présent depuis seulement quatre ans en France, compte désormais 3,5 millions d'abonnés, soit plus qu'OCS, le bouquet payant d'Orange. A ce rythme (100 000 clients par mois), l'ogre Netflix semble en mesure de s'imposer tôt ou tard comme le numéro un de la télévision payante en France, devant Canal+ et ses 4,9 millions d'abonnés. Salto «proposera plusieurs formules d'abonnement pour tenir compte des besoins de chacun et s'articulera de la meilleure manière avec les plateformes gratuites existantes: Mytf1, 6Play et France.tv», assurent ses fondateurs qui vont créer une société à parts égales pour ce projet. La présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte, avait relancé en novembre l'idée d'une plateforme commune aux chaînes publiques et privées et plaidé pour l'émergence d'une «équipe de France de l'audiovisuel», capable de «devenir un champion européen qui pèse(rait) sur la scène mondiale». De telles alliances ont déjà été constituées aux Etats-Unis (Hulu) et au Royaume-Uni (Freeview). Un projet de rapprochement avait échoué par le passé, notamment en 2015, mais M6 et TF1 s'étaient montrés ouverts ces derniers mois. Pour se donner le temps de nouer un accord, France Télévisions avait gelé en mars son propre projet de plateforme vidéo payante, attendu au printemps. De son côté, la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, avait encouragé l'audiovisuel public à «construire des alliances avec les chaînes privées pour permettre l'émergence d'un champion numérique de la diffusion des programmes français». Il s'agit d'une démarche sans précédent pour ces groupes aux statuts différents (deux privés et un public), et qui se battent entre eux au quotidien pour capter le plus grand nombre de téléspectateurs. Reste à savoir quel coût va donner le trio dans la promotion de cette démarche, sachant que Netflix a investi des milliards dans la publicité et le marketing pour s'imposer à l'international. [email protected]