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REFERENDUM SUR LA CHARTE POUR LA PAIX ET LA RECONCILIATION NATIONALE LES OPPOSANTS
Publié dans L'Expression le 29 - 09 - 2005

Leur opposition est centrée sur le refus des mesures édictées par le projet, non sur la paix, laquelle fait consensus.
Au milieu du «oui» général qui préfigure le référendum d'aujourd'hui, quelques voix cependant s'opposent ostensiblement et résolument au projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale. Partis, personnalités publiques du camp islamistes ou de celui des démocrates et mouvement «non intégrés», s'opposent aujourd'hui au président Bouteflika et refusent de cautionner son projet. Cette opposition ne concerne pas la paix et la réconciliation en elles-mêmes, mais reste centrée sur les énoncés des mesures édictées par le projet de charte. Chacun a fait sa lecture, tiré les conclusions, comparé les énoncés de la charte avec ses positions politiques, son idéologie et ses stratégies de l'heure. Au bout, il y a eu une décision prise mais qui reste «discutable», non définitive.
FFS
Le parti de Hocine Aït Ahmed, grand parti «réconciliateur» devant Dieu, dit non à la charte qu'il considère comme «une lecture de l'histoire que le pouvoir a écrite de bout en bout». Réconciliateur lorsque la mode était aux éradicateurs, le FFS ne trouve ni dans la forme ni dans le fond de la charte ses propres positions sant'égidiennes de 1995 et dit, par la voix de son chef, qu'il ne cautionnera pas un projet fait «pour bannir ou éliminer un pan entier de la société, qu'il s'agit au contraire d'intégrer».
RCD
Saïd Sadi estime que la charte est «un brouillon de la future Constitution» et qu'elle élimine l'opposition démocratique, «excommuniée» par le nouveau texte, «dès lors qu'elle ne souscrit pas à la position du pouvoir». En fait, le FFS et le RCD vivent mal les soubresauts de la région kabyle, dans laquelle ils restent très implantés, mais momentanément mis en minorité, voire disqualifiés par le dialogue exécutif pouvoir-archs qui engage l'avenir de toute la Kabylie. Les autres motifs du FFS et du RCD peuvent aussi être d'ordre idéologique. Le FFS est en opposition active depuis plus de quarante ans et cherche toujours à apporter la contradiction au pouvoir, tandis que le RCD voit dans la charte de larges concessions faites aux islamistes, ses ennemis idéologiques.
Archs
Après des relations tumultueuses entretenues avec les autorités depuis plus de quarante ans, l'embellie semblait revenir petit à petit lorsqu'il y eut cassure. Aujourd'hui, les archs pro-Abrika appellent à un mouvement de grève générale, synonyme d'un refus brutal à la charte, aux motifs que «l'officialisation de la charte a été rejetée par le président de la République après les promesses tenues par des officiels». Les archs rejoignent ainsi le FFS et le RCD pour replonger l'avenir de la Kabylie dans une impasse dangereuse.
MDS
Démuni après la mort de Hachemi Chérif, le chef de parti infatigable, le MDS traverse un passage à vide, mais reste fidèle à sa ligne de conduite laïque et anti-islamiste à souhait. Son nouveau secrétaire général par intérim, Hocine Ali, l'a encore confirmé dans un récent entretien en voyant dans le projet actuel une reconduction de la matrice islamiste au-devant de la scène politique. Et puisque la charte fait encore des concessions aux terroristes, le MDS lui tourne le dos.
Laddh
La Ligue algérienne de défense des droits de l'homme dirigée jusqu'à il y a une semaine par le vénérable Ali Yahia Abdenour, a été pendant une quinzaine d'années une organisation virulente et particulièrement critique à l'égard des autorités, notamment concernant le dossier des disparus, des poursuites et des manquements aux droits de l'Homme. Si donc le projet de charte n'offre que peu d'espace d'expression concernant ses dossiers épineux, la Laddh n'a de toute évidence rien à tirer d'un compromis politique et social qui ne la concerne plus. Résultat: «Pas de paix sans vérité, justice et réparation», dit le dernier communiqué de la Ligue.
Onvtad
Cette association des victimes du terrorisme présidée par Djamil Benrabah a été la plus radicale de toutes. Pour son président, le pardon ne saurait faire oublier la petite Nour El Houda, enlevée et assassinée à Larbaâ à ses parents (allusion faite à l'assassinat de la soeur cadette de Amina Koudri en 1995 à Larbaâ). «Le 29 septembre, j'irai me recueillir sur la tombe de mon épouse, lâchement assassinée par les terroristes islamistes», précise le responsable de l'Onvtad.
Rafd
Le rassemblement des démocrates ne veut pas ressembler à l'Unfa. Pour preuve, il s'oppose résolument au projet de charte qu'il rejette au motif que «des flots de sang ont coulé en Algérie» et que «Bouteflika bafoue la mémoire des victimes du terrorisme intégriste». Le refus du Rafd de cautionner le projet du président, tout comme celui des petits partis qui s'articulent autour du seul personnage du chef, est un signe qui reflète que la démocratie en Algérie pousse bien, car même ces petits conglomérats ont eu le droit à la parole.
RPR
Le parti dirigé par Abdelkader Merbah ne croit pas à cette «tromperie nationale» et souhaite «que le peuple n'aille pas voter pour une charte qui détruit toutes les valeurs d'un Etat moderne». Merbah estime qu'il y a tromperie sur la marchandise parce qu'«il n'y a pas de parties qui devraient se réconcilier entre elles».
ANR
Le petit parti qui s'articule autour du seul personnage de Réda Malek, son président, porte-parole et théoricien depuis sa création, doit être mis aux côtés des opposants, bien que, hormis les avis de Malek, on ne sait rien de cette alliance qui agit par la seule volonté de son président, non en tant que structure politique où le pour ou le contre sont soumis à débat. Pour cela, il faudrait classer le parti dans le chapitre des «personnages».
SOS Disparus
Comme toute ONG qui se respecte et qui fait de la recherche des disparus son credo, l'association SOS Disparus est restée sur sa faim en lisant la charte sous toutes ses coutures. En fait, il ne faut pas demander plus à des familles qui n'ont jamais pu faire le deuil de leurs disparus d'autant plus que la charte tire un trait définitif sur ce passé douloureux.
Réda Malek
Un des principaux chefs de file «civils» du clan des éradicateurs. Tout rapprochement avec les islamistes lui fait grincer les dents. Son dernier communiqué lacère la notion même du pardon, sans dévoiler clairement sa position vis-à-vis de la charte. «Le pardon relève de la sphère intime des convictions de chacun (...). La raison d'Etat ne saurait se subroger moralement aux victimes et à leurs ayants droit».
Sid-Ahmed Ghozali
L'ancien chef de gouvernement a fait partie du «clan des janviéristes» qui ont déclaré la guerre au FIS et assumé les conséquences politiques - non sécuritaires - de leur choix. Egal à lui-même, SAG reste en retrait d'un pacte qui ne le concerne pas. Ses choix et ses thèses se trouvent ailleurs que dans la charte. Alors, pourquoi s'en soucier?
Abdelhamid Mehri
Ex-secrétaire général du FLN, il est l'homme qui a réussi la prouesse exceptionnelle de mener son parti (1994-1995) d'un «parti présidentiel» à un «parti d'opposition». Réconciliateur avant l'heure, alors que tout le monde criait oui à la guerre, il ne se reconnaît pas dans la charte de Bouteflika.
Pour Mehri, «la charte cherche une solution sécuritaire à une crise principalement politique». Cela étant, ce n'est pas Mehri qui peut être classé dans la « liste noire des opposants ». Sa place est plutôt dans celle des polémistes, des critiques d'une paix à sens unique.
Ahmed Taleb El Ibrahimi
Président du fantomatique Wafa fin politicien qui allie nationalisme et islamisme. Disqualifié par une série de mesures politiques de la scène depuis plusieurs années, il se disqualifie lui-même du débat sur la charte qui ne fait pas honneur à son idée sur la sortie de crise. En excluant les islamistes de toute activité politique, Bouteflika fait pièce à une des principales revendications de Taleb, à savoir «réconcilier les belligérants et réintégrer les anciens du FIS dans un jeu politique clairement délimité».
Djeddi-Guemazi Boukhamkham
Le trio des fondateurs de l'ex-FIS fait toujours bloc compact depuis 1994 et depuis leur séjour à Djenane El Mefti.
Dans un communiqué signé conjointement, ils viennent encore d'afficher leur refus de cautionner «une offre de paix qui ne ressemble pas à une paix» et de porter la responsabilité, seuls, de toute la tragédie nationale «née de l'interruption du processus électoral».
Abassi Madani
Le n°1 de l'ex-FIS a toujours exigé une paix et une réconciliation nationale. Et lorsqu'elles sont venues, il leur a tourné le dos au motif qu'elles «ne sont pas justes, ni équitables». Le septuagénaire reste pointilleux sur la genèse de la crise, la responsabilité de la tragédie nationale et l'exclusion du FIS de la scène politique. Sans dire non à la charte, il dit clairement: «Ce n'est pas là la paix que j'ai souhaitée».
Abdellah Anas
Plus audacieux que Kamareddine Kherbane, il sait dire non à une charte qu'il qualifie d' «injuste» envers la mouvance islamiste. Il dit aussi être prêt à discuter d'une «ouverture politique sans exclusion».
Mourad Dhina
L'ancien responsable de l'ex-FIS à l'étranger n'est pas encore convaincu de la bonne foi des autorités, et encore moins de l'empressement de ses compagnons à dire «oui» à la charte. Contacté par un ministre en visite à Genève, il lui a fait savoir que le débat brillait par son manque de sérieux et par le sens unique que le pouvoir veut bien donner à l'histoire de la crise.
L'adhésion de tout le monde au projet de charte fait aujourd'hui l'effet d'un bulldozer qui avance. Et c'est pour cette raison qu'il serait judicieux de voir dans cette poignée d'opposants un trait de démocratie, un espace de débat dans la monotonie du «oui» général. Aussi, il faudrait se garder de penser à faire la chasse aux sorcières après le 29 septembre mais centrer le débat sur les mesures pratiques à mettre en marche pour que pareille tragédie ne se reproduise plus jamais.
Ali Benhadjar
Ex-émir national de la Lidd et personnage tonitruant qu'on situe dans le sillage de l'AIS, mais qui reste plus proche des djazaâristes et de l'intelligentsia islamiste que de Madani Mezrag. Partisan de la paix depuis 1997 par son opposition aux dérives génocidaires du GIA, il dit pourtant à propos de la charte: «Je ne signerai pas de mes propres mains un document qui me rend responsable de la crise algérienne et qui m'élimine de toute activité politique future».


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