Depuis son arrivée au pouvoir en janvier 2017, le 45e président des Etats-Unis, Donald Trump, a engagé, sous le dogme «l'Amérique d'abord», une guerre sans merci contre tout ce qui bouge, laissant dubitatifs, analystes et observateurs. En fait, ses décisions intempestives, loin de rendre l'Amérique meilleure et plus forte ou les Américains plus heureux, semblent avoir un effet antinomique. En effet, les Américains sont de plus en plus désorientés et inquiets des retombées négatives des décisions de leur président. Ainsi, en décalage par rapport à la réalité du monde, Donald Trump juge que les guerres commerciales qu'il a ouvertes contre les supposés ennemis, concurrents ou faux amis sont «bonnes» pour les Etats-unis, allant jusqu'à affirmer: «Les guerres commerciales sont bonnes et faciles à gagner.» On peut dès lors en déduire des conflits ouverts sur d'autres fronts - le climat, le nucléaire, la Corée du Nord, l'Iran, la Palestine... - que pour Trump toute action d'intimidation sera bénéfique pour les Etats-Unis, première puissance mondiale certes, mais - ce qu'il ne semble pas correctement appréhender - dépendante cependant dans une large mesure de ses relations commerciales, diplomatiques et politiques avec le reste du monde. En fait, la connexion (commerciale) internationale est telle, que l'on ne voit pas comment Trump compte bouleverser cet ordre mondial au seul profit des Etats-Unis. Or, sur le plan commercial, les Etats-Unis importent plus qu'ils n'exportent, rapport que Trump veut inverser. Mais comment? A titre indicatif, notons que c'est l'apport des constructeurs automobiles européens qui a remis à flot une industrie automobile américaine en déclin. Aussi, ses décisions, à l'instar des taxes sur l'acier (25%) et sur l'aluminium (10%), ont déjà un impact onéreux sur les Etats-Unis eux-mêmes. De fait, les premiers effets des taxes - sur l'acier et l'aluminium - se font sentir aux Etats-Unis avec les augmentations effectuées ou annoncées des prix de certains produits comme les boissons gazeuses et ceux des...automobiles. Alourdissements devenus une nécessité pour les industries automobiles américaines pour ne pas être contraintes de se déclarer en faillite. En effet, le secteur automobile, qui importe plus de la moitié des composants de ses produits, a été très sensible aux décrets impromptus de Trump. Il y a ainsi un effet boomerang du fait des mesures de réciprocité prises par la Chine et l'Union européenne, notamment de taxer les produits américains, notamment les Jeans's et les fameuses motos Harley Davidson. Des charges que les entreprises américaines et les Américains ne pourraient supporter à long terme. Diriger les Etats-Unis, un business comme les autres? Il est patent que Donald Trump, entrepreneur immobilier heureux en affaires, qui ne semble pas avoir des notions de politique étrangère, donne l'impression qu'il lui suffit de diriger les Etats-Unis, comme ses propres entreprises, pour rendre son lustre au pays édifié par les émigrés européens il y a plus de deux siècles....suite à une guerre commerciale avec le Royaume anglais. Toutefois, il convient de relativiser la part de Trump dans ce nouveau imbroglio international et de ne pas lui imputer à lui seul les situations incertaines qui prévalent actuellement, quand l'establishment américain et l'Etat profond portent une bonne part des dérèglements qui minent les relations internationales. Il est arrivé que le chef de l'exécutif et l'establishment ne se trouvent pas sur la même ligne, mais c'est bien la première fois dans l'histoire des Etats-Unis que la Maison-Blanche et l'establishment se tirent dans les jambes. Alors, bonjour les dégâts. C'est ce qui semble se produire entre l'establishment - voir sa réaction virulente et hystérique suite à la rencontre Trump-Poutine à Helsinki - et le 45e président des Etats-unis. Aussi, la situation aux States est-elle plus complexe qu'elle n'en donne l'impression. En fait, deux puissances s'affrontent à Washington: la Maison-Blanche et l'establishment [élite politique, financière, économique, culturelle, médiatique]. Tant que ces deux pouvoirs se trouvent sur la même ligne, le problème ne se pose pas, mais dès que le premier dévie de la ligne qui lui est assignée, c'est la levée de boucliers. L'union sacrée des démocrates et des républicains états-uniens contre Trump après sa rencontre avec Poutine à Helsinki montre combien l'establishment est d'accord sur l'essentiel. Ainsi, Trump a été vilipendé après ses déclarations sur la Russie, accusé de «traîtrise» envers l'Amérique. En fait, une césure est apparue après l'élection de Donald Trump qui s'est imposé tant aux démocrates qu'à ses alliés républicains à la candidature de la présidentielle du 8 novembre 2016, cela contre la volonté de l'establishment. C'est donc contraint et forcé que l'establishment - notamment républicain - a dû rallier le président élu, qu'il tenta par tous les moyens d'empêcher d'accéder à la Maison-Blanche. Trump de son côté, n'a rien fait pour se concilier ses soutiens naturels, les Républicains. C'est dans ce contexte quelque peu trouble qu'il convient de resituer les décisions prises par un homme, politiquement neuf, qui s'est engagé auprès de son électorat à rendre aux Etats-Unis leur lustre d'antan. Il n'a donc fait qu'appliquer son programme. Ce qui n'agrée pas toujours à l'establishment marqué par les lobbies, singulièrement le lobby pro-israélien. En fait, Donald Trump agit selon ses propres convictions et son agenda quant à la pertinence des décisions à prendre sur tel ou tel dossier. Ainsi, depuis son arrivée au Bureau ovale, la stratégie de Trump a été de frapper fort - amis comme ennemis - quitte à s'excuser auprès des premiers (cf; les mots durs contre la chancelière allemande, Angela Merkel et la Première ministre britannique, Theresa May) et à discuter ensuite avec les seconds (cf; ses pantalonnades contre le leader nord-coréen, Kim Jong-Un, avant de rencontrer à Singapour, une première mondiale, le dirigeant haï nord-coréen). Une stratégie qui n'a pas été, jusqu'ici, productive dans la guerre commerciale qu'il mène contre la Chine. Le climat, le nucléaire, la Palestine... Ceci dit, il convient cependant de rendre à Trump ce qui appartient à Trump et lui assumer ses foucades sur le climat [sorti du consensus mondial sur le réchauffement climatique], sur le nucléaire [retrait des Etats-Unis de l'accord sur le nucléaire iranien], sur la Palestine [reconnaissance de Jérusalem, «capitale» d'Israël, à l'encontre des résolutions de l'ONU et de l'assentiment mondial sur ce dossier] entre autres. Dans chacun de ces dossiers, il est patent que Trump, agissant à l'emporte-pièce, n'a pas pris les bonnes décisions, s'appuyant plus sur la puissance des Etats-Unis que sur le contexte propre à chaque dossier. Ainsi, pour ce qui est du réchauffement climatique, les Etats-Unis en tant que première puissance industrielle mondiale sont les principaux responsables de sa détérioration, mais Trump refuse d'endosser, ou de faire endosser à son pays, la part de la responsabilité américaine dans la dégradation du climat et les dommages infligés à l'ozone. Ce qui découle d'une position de puissance mal comprise, incapable de positiver et trop égoïste pour partager les soucis et inquiétudes qui se posent au monde. C'est la même analyse partielle et erronée que Donald Trump se fait du nucléaire iranien. Il a ainsi balayé d'une pichenette plus de 16 années d'efforts et de négociations pour trouver une issue à un contentieux gonflé à outrance par une partie intéressée, Israël - qui en réalité n'en a jamais été un. Aujourd'hui, c'est ce même Trump qui menace l'Iran de représailles «définitives» sommant Téhéran de «ne plus menacer» les Etats-Unis, promettant à l'Iran l'enfer. Le monde ne fonctionne pas, ne peut fonctionner sur des oukases, ou sur la soumission au plus puissant. Sinon, chacun serait alors en droit de se doter d'armes à sa convenance pour acquérir cette puissance de dissuasion qui permet d'échapper aux diktats. La Palestine! La première présomption et la moins justifiable, est la prétention de Trump d'être celui qui «réalisera» la paix au Proche-Orient. Cela ne peut être possible en commençant par commettre une monstruosité: accorder aux occupants israéliens la reconnaissance de Jérusalem comme «capitale» de leur Etat. Ce que les Nations unies et les Etats du monde ont toujours refusé à Israël en l'absence d'un accord de paix avec les Palestiniens. Sans contrepartie mesurable, le président des Etats-Unis a commis un outrage, démantelant ce que la communauté des nations peine à réaliser depuis des décennies. Ainsi, mu par des sentiments pro-israéliens et non par une démarche politique cohérente, Donald Trump conforte en revanche un pays dans son irrédentisme, qui occupe des territoires ne lui appartenant pas, qui place la population palestinienne dans des ghettos. Israël, ainsi encouragé, vient d'adopter une loi sur «la nation juive» instaurant officiellement l'apartheid dans ce pays, faisant des Israéliens non-juifs, des non-personnes. La décision de Trump aura de fait incité Israël a aller plus loin dans sa politique de dépossession des Palestiniens et de décomposition de leurs territoires, comme de procéder à une classification de races inédite dans les annales du monde moderne. Est-ce en tant que président d'un «Etat juste (?)» que Trump a pris des décisions allant à l'encontre tant du droit international que de la probité publique? L'expérience de l'esclavage par son pays, ne lui dictait-elle pas la nécessité d'oeuvrer pour un monde meilleur, un monde qui accepte ses différences multiraciales, symbolisant notre planète? Outre malvenues, les décisions de Trump vont à l'encontre de la nature et de son milieu. Si les Etats-Unis sont malades de leur puissance, ses dirigeants, arrogants et égotistes, ont largement contribué au dysfonctionnement de notre monde et à la dégradation de ses lois, quand le mal et la ruse sont érigés en acte suprême de ralliement politique contre le juste et le droit d'existence pour tous.