Acculés en Syrie, les terroristes du groupe Etat islamique (EI) tentent un retour en force en renouant avec les tactiques macabres et spectaculaires qui ont fait leur sinistre renommée, notamment les enlèvements et exécutions ciblant les minorités, jugent des experts. La semaine dernière, l'EI a ainsi décapité un étudiant de 19 ans qui faisait partie d'une trentaine d'otages druzes enlevés en juillet dans la province méridionale de Souaïda, où des assassinats et des attaques suicide coordonnées ont fait plus de 250 morts. Sur ses organes de propagande, l'EI avait revendiqué cet assaut de grande envergure, un des plus meurtriers menés par les terroristes en Syrie. Mais le groupe était resté muet sur les enlèvements. Loin des projecteurs, l'organisation ultra radicale mène toutefois des négociations pour échanger les otages druzes contre des commandants et des combattants terroristes emprisonnés par le régime syrien,. «D'une part, ils tuent publiquement des gens, mais en coulisse ils prennent des otages et procèdent à des échanges», confirme Hassan Hassan, expert au Tahrir Institute for Middle East Policy, think tank basé à Washington. Car aujourd'hui l'organisation n'est plus que l'ombre de ce qu'elle était. Après avoir proclamé en 2014 un «Califat» sur de vastes territoires à cheval sur la Syrie et l'Irak voisin, le groupe ne contrôle plus que des secteurs désertiques du centre et de l'est syrien. Malgré les revers, l'EI risque de poursuivre «des attaques éclair soudaines, pour kidnapper des civils», pronostique M. Hassan. «Le gouvernement est stable et sécurisé, mais les communautés sont durement touchées», poursuit-il. En février 2015, les terroristes avaient kidnappé plus de 220 chrétiens assyriens, qui ont fini par être relâchés en échange de rançon. Et en 2014, l'EI s'en était pris à la communauté Yazidie en Irak, poussant à la fuite des dizaines de milliers de ses membres, enlevant des milliers de femmes et d'adolescentes qui ont subi viols et esclavage durant leur captivité. Selon un haut dignitaire religieux druze, les négociations pour la libération des otages se font à travers la Russie, en coordination avec le gouvernement syrien. Les terroristes détiennent toujours 14 femmes de la communauté et 15 de leurs enfants. Photos et vidéos de l'étudiant décapité ont été envoyées par les terroristes à sa famille, et ont été reprises sur les réseaux sociaux et dans les médias locaux, replaçant les terroristes sous les feux des projecteurs. Mais depuis le début du conflit, la communauté a tout fait pour se tenir à l'écart des violences, trouvant ainsi un accord fragile avec le régime: en échange de leur loyauté au pouvoir, les hommes de la minorité ne seront pas obligés de faire leur service militaire. Daesh cherche à rompre ce lien fragile.»