Le patronat, autant que l'Ugta, ont élaboré de «gros dossiers» qu'ils comptent soumettre au gouvernement. Annoncée en grande pompe pour la fin de l'année passée par le chef du gouvernement avant d'être reportée pour le mois courant, nous apprenons que la tripartite ne pourra pas se tenir avant le mois de février prochain. Alors que l'Ugta aura encore besoin de quelques semaines avant d'arrêter et de finaliser sa position vis-à-vis des privatisations massives initiées par le gouvernement, il semble que la rencontre qui a eu lieu ce mardi entre Ahmed Ouyahia et les responsables du Forum des chefs d'entreprises, représentant les secteurs public et privé, ait fini de convaincre l'Exécutif de la nécessité d'aller vers un tel report afin que la tripartite n'échoue pas sur les nombreux points de discorde apparus au fil du temps entre ces trois partenaires aussi incontournables les uns que les autres. La semaine passée, pour rappel, le chef du gouvernement avait reçu le secrétaire général de l'Ugta, Abdelamadjid Sidi-Saïd. Un accord ferme avait été trouvé sur l'essentiel des revendications soutenues par le principal syndicat du pays. Il s'agit de «la préservation des emplois, le maintien de l'activité, le lancement d'investissements nouveaux créateurs d'emplois et de richesses et, enfin, le maintien des acquis des travailleurs». Ces points, essentiels, font que l'Ugta a fini par dire oui aux privatisations après les avoir longtemps contestées. Or, la partie semble loin d'être gagnée. En effet, plusieurs fédérations et unions de wilayas sont sollicitées par le secrétariat national pour donner leur avis sur cette question. Une rencontre générale est même prévue très probablement au début du mois prochain afin de déboucher sur une position finale et consensuelle qui soit la plus proche possible de celle, très logique, développée par Sidi-Saïd depuis plusieurs mois déjà. Reste quand même à ajouter que la Centrale, qui ne veut en aucune manière être sacrifiée sur l'autel de ces réformes, jugées par tous «incontournables», revendique également, sans que la chose soit accordée pour le moment, que les droits et regroupements syndicaux soient eux aussi préservés. N'oublions pas que la Centrale, qui dispose de quelque 12 558 sections syndicales à travers le territoire national, n'en a qu'un peu plus de 200 qui activent dans le secteur privé. Partant, donc, du principe où pas moins de 1200 entreprises publiques sur les 1303 que compte encore l'Algérie doivent être privatisées, la vie même de la Centrale est menacée s'il n'est pas donné suite à cette dernière revendication. Or, celle-ci est surtout du ressort du patronat. Plus fort et incontournable que jamais, depuis qu'il a été décidé qu'il supplanterait le secteur public, le privé a même joui pour la première fois de l'histoire de l'Algérie indépendante, d'une bipartite avec le chef du gouvernement. C'est fort de ce «retour en force» sur le devant de la scène politique et médiatique que le patronat, réuni en coordination puissante et bien organisée, est lui aussi porteur d'une plate-forme de revendications tellement importante qu'elle fait grincer les dents de ses deux autres partenaires. Les experts vont même jusqu'à dire qu'hormis des questions liées au foncier industriel, la remise à niveau et une plus grande souplesse dans les prêts bancaires, les autres demandes, telles que l'amnistie fiscale, sont tout simplement impensables. Comment pourrait-il en être autrement alors que les pouvoirs publics prévoient de faire rentrer dans le «droit chemin» le secteur informel? Ce n'est donc pas le moment d'encourager, en les amnistiant, les «erreurs» du passé...