Le lourd dossier des privatisations massives et du rôle futur du privé algérien, occupera le haut du pavé. Plusieurs éléments d'information tendent à conforter la thèse que la tripartite serait une fois de plus reportée de plusieurs semaines, probablement pour la fin du mois prochain. Si aucun élément d'information concret ne conforte cette thèse, de nombreux indices confortent, du moins, une pareille probabilité. Comme à l'accoutumée, le chef du gouvernement a pris pour habitude de rencontrer d'avance ses interlocuteurs une semaine ou deux avant la date fixée de la rencontre. Or, jusqu'à présent, Ahmed Ouyahia n'a pas reçu le secrétaire général de l'Ugta, ni les responsables des organisations patronales censées être conviées à cette tripartite. Il semble que chacun, dans son coin, fait face à de multiples problèmes, pour ne pas dire «préalables» dont le règlement devrait logiquement se faire avant la tenue de la tripartite elle-même. Ahmed Ouyhahia, comme en témoigne son inattendu discours d'hier, veut en finir coûte que coûte avec les jacqueries auxquelles il fait face du fait de la hausse des prix du gasoil et du gaz butane. Si l'Etat ne compte pas reculer d'un seul pas sur ses décisions d'augmentation et s'il est résolu à faire respecter les lois de la République, il n'en distingue pas moins les barons de la rente manipulateurs d'un côté et le pauvre citoyen manipulé de l'autre, ce qui n'est pas peu dire. La Centrale Ugta, outre ses sempiternels problèmes organiques aggravés par le refus des privatisations formulées par de nombreuses fédérations, cherche le meilleur moyen de faire respecter au gouvernement ses engagements sociaux afin que le «délestage» du secteur public se fasse le moins douloureusement possible. Les organisations patronales, quant à elles, saisissent parfaitement l'aubaine qui se présente à eux, devenant un secteur clé de la relance économique et espèrent décrocher le maximum de concessions de la part des pouvoirs publics, mais aussi du principal syndicat du pays, ce que ce dernier refuse catégoriquement, estimant avoir trop cédé sur des points pourtant essentiels. Le principal d'entre eux est bien entendu le pouvoir d'achat. La question du Snmg (salaire national minimum garanti) ne sera donc pas incluse dans la liste des dossiers inscrits lors de cette tripartite. C'est à peine si la question de l'article 87-bis sera abordée non sans les réserves qui veulent que tout amendement à la loi 90-11 dont est tiré ce texte passe d'abord par le Parlement. Cet article, comme le démontre un document du ministère des Finances en notre possession, fait que la dernière hausse de 2000 dinars dans le Snmg a été, dans le meilleur des cas, d'à peine 200 dinars parce que le calcul du salaire inclut l'ensemble des primes, ce qui est une véritable «hérésie» sur le plan social. Si les dossiers relatifs à la gestion des retraites et des caisses sociales feront également l'objet de débats lors de cette tripartite, conformément aux commissions mises en place depuis plus d'une année, il y a fort à parier qu'ils soient reportés à une date ultérieure. Le gros morceau des débats, pour ne pas dire le seul, aura en effet trait aux privatisations en particulier et à la politique économique gouvernementale en général. Sur ce chapitre, la Centrale continue d'insister sur la préservation des emplois, des salaires et des nombreux droits sociaux des travailleurs, y compris celui de se syndiquer sous le nouveau régime des futurs acquéreurs. Si le gouvernement fait mine de tout accepter sans broncher, le risque est grand de voir les acheteurs faire volte-face quelque temps plus tard, comme cela se produit depuis toujours un peu partout dans le monde. Les opérateurs privés, eux, se savent désormais incontournables depuis que le gouvernement a décidé de céder 1200 entreprises sur les 1303 qu'il contrôle encore après avoir investi plusieurs centaines de milliards de dinars pour tenter de les renflouer, sans succès. C'est pour cette raison qu'il revendique des régimes préférentiels, y compris pour ce qui est du rachat des entreprises publiques. Or, le gouvernement ne l'entend pas de cette oreille, lui qui cherche coûte que coûte à convaincre les capitaux étrangers de venir en force dans notre pays, ce qui est loin d'être une partie gagnée d'avance. Ce ne seraient donc pas les éventuels avantages accordés aux Algériens, au détriment des étrangers, qui pourraient arranger les choses. En attendant cette tripartite, en tout cas, le patronat se satisfait déjà d'acquis obtenus à la suite de l'inédite bipartite qu'il a eue récemment avec le gouvernement. C'est ainsi que la Coordination du patronat, qui réunit les quatre principales organisations patronales, a salué lundi la baisse des taux d'intérêts décidée récemment par cinq des six banques publiques. Dans un communiqué rendu public hier, ce regroupement souligne que la baisse des taux d'intérêts a été inscrite dans la plate-forme présentée lors de la dernière réunion gouvernement-patronat et qui demandait, entre autres, une baisse des taux d'intérêts sur les crédits bancaires, en vue de favoriser l'investissement et la création d'emplois. En parallèle, ces mêmes responsables ont été reçus ce dimanche à Alger, par le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil. Cette rencontre, qui s'inscrit dans le cadre de «la poursuite des concertations engagées par les pouvoirs publics» et inaugure la première des rencontres prévues entre le patronat et les différents ministères, a permis au patronat d'exposer «toutes les contraintes ayant paralysé, par le passé, les initiatives d'investissement».