Retour vers le passé: le 17 octobre 1961, le journal Libération était l'un des rares, avec L'Humanité, à avoir couvert la répression sanglante de la manifestation organisée par les Algériens à Paris. C'est donc à juste raison que ce journal revient aujourd'hui sur cet événement tragique dans un article intitulé: «Colonisation, la fronde des historiens». Il y aborde en l'occurrence la loi du 23 février qui fait l'apologie du colonialisme, et en chante le rôle positif, en donnant la parole aux 20.000 passionnés de l'histoire, qui ont organisé une grandiose manifestation à Blois samedi dernier, pour protester contre la loi scélérate. En clair, ce sont, selon Libération, quelque 57.000 professeurs d'histoire français qui sont montés au créneau pour rejeter l'application d'un tel texte législatif. Il faut savoir qu'immédiatement après le vote de cette loi, fut mis en place un collectif d'historiens, sous l'impulsion de Claude Liauzu, professeur émérite à l'université Paris-VII «pour faire circuler une pétition, sonner l'alarme et mobiliser dans les milieux tant enseignants que journalistiques». Premier résultat de ce «rendez-vous de l'histoire», c'est de rendre cette loi inapplicable dans la pratique de l'enseignement de l'histoire, en montrant que la France est malade de son passé colonial, et qu'elle est rattrapée par la question du passé colonial de la République et au-delà de son passé esclavagiste. Un second article de Libération aborde plus précisément le contenu des manuels scolaires, en rappelant qu'en 1792, les parlementaires s'étaient intéressés aux manuels scolaires, en légiférant, pour la première fois, sur ce sujet, dans l'optique de faire des manuels scolaires d'Etat, mais en 1796 , le ministre de l'Education nomme une commission chargée d'examiner la production des livres scolaires effectuée par des éditeurs privés. «C'est le principe de l'autorisation préalable et l'abandon définitif en France du manuel d'Etat. Or c'est bien à cela que la loi du 23 février semble revenir, à une histoire officielle univoque.» Le troisième article de Libération est une interview du réalisateur Mehdi Laalaoui, président de l'association «Au nom de la mémoire» qui se bat pour abroger cette loi et contre la résurgence des nostalgiques de l'Algérie française. En l'occurrence, dit-il dans cet entretien, «Nous attendons toujours que le 17 octobre 1961 soit reconnu comme massacre car, ce qui s'exprime à travers cette revendication de justice, c'est une exigence de dignité.»