Le fait que l'hôte de la Maison-Blanche ait choisi Robert Lighthizer comme négociateur en chef est «un signal» fort. Le compte à rebours pour nouer un accord commercial a commencé. Et, pour la première fois, Washington et Pékin semblent bien décidés à y parvenir, faisant fi des affaires diplomatiques susceptibles de compromettre l'issue de leurs délicates négociations. Donald Trump a estimé vendredi qu'un «grand accord» pourrait intervenir «plutôt rapidement!» justifiant cette urgence par le ralentissement de l'économie du géant asiatique sous le coup de taxes douanières punitives américaines. Ces déclarations sont intervenues au moment même où la ministre des Affaires étrangères canadienne rencontrait son homologue américain pour discuter du cas de Meng Whanzhou, la directrice financière du géant des télécoms chinois Huawei, arrêtée le 1er décembre par le Canada à la demande de Washington et à l'origine d'une crise diplomatique entre Ottawa et Pékin. La dirigeante chinoise, soupçonnée de complicité de fraude pour contourner les sanctions américaines contre l'Iran, a été libérée sous caution dans l'attente d'une procédure d'extradition vers les Etats-Unis. Pour autant, Donald Trump s'est dit prêt à intervenir si «nécessaire», notamment si cela permettait de conclure un accord commercial. Il y a tout juste deux semaines, le président républicain et son homologue chinois ont décrété une trêve. Concrètement, Donald Trump a accepté de retarder de 90 jours l'augmentation de taxes douanières sur 200 milliards de dollars de marchandises chinoises au 1er janvier. Après des doutes sur les marchés financiers, les autorités chinoises ont multiplié les mesures pour apaiser le courroux de Washington. Suspension des surtaxes douanières imposées aux voitures et pièces automobiles importées des Etats-Unis, reprise d'achat massif du soja américain, l'administration chinoise s'est en outre dite disposée à négocier sur son sol comme sur le territoire américain. Le fait que l'hôte de la Maison-Blanche ait choisi Robert Lighthizer comme négociateur en chef est «un signal» fort. Car le représentant au commerce est un spécialiste du droit commercial rompu aux tractations difficiles. En moins de deux ans - il a rejoint l'administration Trump en mai 2017 -, il est parvenu à réformer le traité de libre-échange nord-américain (Aléna) liant Etats-Unis, Canada et Mexique. Robert Lighthizer, 71 ans, est aussi connu pour avoir mené avec poigne des tractations complexes avec le Japon sous l'administration Reagan dans les années 1980. Discussions sérieuses et gestes d'apaisement ne signifient pas pour autant la signature d'un accord d'ici le 1er mars, s'accordent à dire les experts. Donald Trump ne cesse de dénoncer des échanges commerciaux déséquilibrés. Dans un rare entretien accordé à un média la semaine dernière, Robert Lighthizer avait de son côté souligné que derrière ses négociations se jouait le maintien de la supériorité technologique des Etats-Unis. Pour l'heure, aucun objectif chiffré n'a filtré alors que Donald Trump exigeait de Pékin de réduire le déficit commercial des Etats-Unis de 200 milliards de dollars. L'inconnue reste l'interférence des affaires diplomatiques. Outre le dossier Huawei, les autorités américaines accusent la Chine de cyberattaques sur le sol américain. Elles lui ont ainsi dernièrement imputé le piratage d'une base de données du géant de l'hôtellerie Marriott. Pour l'heure, les présidents américain et chinois font mine de ne pas mélanger négociations commerciales et couacs diplomatiques. Mais cette position est-elle tenable?