La génération actuelle de footballeurs est la plus faible que nous ayons eue depuis l'indépendance du pays en 1962. L'information a été donnée d'une manière tout à fait banale au point où elle est passée inaperçue. Elle est même tombée dans la normalité des choses alors qu'il s'agissait d'un événement qui aurait dû réveiller les consciences et les amener à déclencher une campagne de sensibilisation sur le thème d'un football algérien complètement déglingué. Malheureusement on préfère pérorer de week-end en week-end sur un prétendu championnat où il y aurait des « stars » mais qui en vérité n'accueille en son sein que des joueurs qui ont appris à pratiquer le football à l'envers. L'information dont nous parlions était le retour de Daoud Sofiane au pays, plus précisément dans son club, le MC Oran. Daoud Sofiane est ce joueur catalogué, lui aussi, comme «star» et qui avait été l'un des meilleurs joueurs du triste championnat de la division 1 la saison dernière. Tellement «starisé» qu'on l'avait annoncé partout et que les clubs les plus fortunés de ce pays étaient prêts à faire un énorme sacrifice financier pour l'engager. Finalement, Daoud avait refusé les dinars algériens pour aller signer à Dubaï, dans un obscur club de la seconde division de cette partie des Emirats Arabes Unis qui lui proposait des dollars américains sonnants et trébuchants. Un authentique international algérien dans un club de seconde division d'une compétition où l'on ne doit pas disputer 20 matches par saison et dont le niveau, on le devine, n'a vraiment rien de celui d'un championnat de bonne facture. Cela, c'était le choix de Daoud qui a privilégié le côté financier au challenge sportif. Seulement, ce Daoud qui passe chez nous pour un joueur hors normes, a vite fait de s'apercevoir de l'énorme retard qu'il accuse sur le plan de la formation de base. Dans un championnat de très faible niveau, il n'a pas pu s'imposer et son club lui a fait savoir qu'il valait mieux pour lui qu'il retourne d'où il venait. Cette histoire nous ne l'avons pas inventée, ni exagérée. Elle est la stricte vérité sur un footballeur algérien, énormément médiatisé chez nous, car faisant partie de ces «vedettes» que l'on cherche à tout prix à présenter comme des joueurs de grande valeur. L'histoire de Daoud Sofiane ressemble à celle d'un autre joueur algérien «super starisé» depuis qu'un soir, à Sousse, en Tunisie, lors de la CAN-2004, il avait inscrit sur un exploit personnel face aux Egyptiens. Il s'agit, vous l'avez deviné, de Hocine Achiou, le joueur de l'USMA qui, depuis ce jour-là, veut toujours rééditer un exploit auquel lui-même n'y croyait pas. En vain. Achiou qui était jeune n'a en fait pas progressé. Son étoile, depuis ce match contre les Egyptiens, n'a fait que décliner. Il se trouve qu'après son exploit de Sousse, le joueur de l'USMA a tenté de se faire embaucher par un club à l'étranger. Il avait frappé à un tas de portes mais on ne se montrait pas enthousiaste à l'idée de le retenir. Finalement celui qui était présenté comme le meilleur joueur du football algérien avait atterri à Sedan dont le club évoluait dans la division 2 française ; Sedan dont le club était à peine connu, tellement son palmarès est vide. Malgré tout, l'essai de notre «star» dans ce petit club français avait été jugé non concluant et il avait dû revenir dans son club. L'été dernier, il avait prolongé son séjour en Angleterre, affirmant qu'il avait des contacts avec Fulham. Il s'est avéré que ce club n'avait fait que l'autoriser à s'entraîner avec ses réservistes de la 3e équipe pour qu'il conserve sa forme. Les autorités politiques de notre pays s'inquiètent que notre football ne puisse plus rivaliser avec les meilleurs et que nos sélections nationales se fassent éliminer de toutes les compétitions internationales. Leur inquiétude s'est tellement amplifiée qu'elles en sont arrivées à demander le concours de personnalités comme Issa Hayatou et Michel Hidalgo pour qu'elles proposent des solutions aux problèmes posés par le football algérien. A vrai dire, les deux experts invités par les autorités algériennes, n'avaient pas à trop se casser la tête pour situer le mal dont souffre le football algérien. Si l'équipe nationale algérienne ne gagne plus c‘est parce que le football, dans lequel elle puise son effectif, ne dispose plus de joueurs de talent et de qualité. C'est aussi simple que cela et le nier ne ferait qu'empirer une situation qui n'a que trop duré. Nous n'avons pas besoin de le démontrer, les gens de Dubaï et de Sedan l'ont fait pour nous en refusant de prendre chez eux des joueurs que chez nous on présente comme des «stars». Avant eux, il y avait eu Bezzaz, parti en France avec le statut de meilleur espoir du football algérien et qui n'avait pu trouver que le très modeste AC Ajaccio pour l'accueillir et où il ne lui a jamais été possible de trouver une place de titulaire. Il y avait eu Dziri qui avait atterri à... Sedan, précédé du titre de meilleur joueur algérien, Sedan où il n'avait jamais pu s'imposer alors que c'était un club de seconde division. Et l'on ajoutera, plus près de nous, Daoud Bouabdallah et Ghazi incapables de gagner leur place à l'ES Tunis. Ce sont tous là des internationaux algériens; des joueurs finalement sans envergure, ni génie. Et l'on ne croit pas nous tromper en affirmant que la génération actuelle de footballeurs est la plus faible que nous ayons eue depuis l'indépendance du pays en 1962. Même Robert Nouzaret, l'entraîneur du MCA, à qui on ne contestera pas les compétences en matière de football, ayant été lui- même un professionnel dans une bonne équipe de l'Olympique Lyonnais dans les années 70, disait à certains de nos confrères qu'ils exagéraient en interviewant des joueurs qui ne le méritaient pas. Il est allé jusqu'à affirmer que pour ce qu'ils montraient sur un terrain, certains joueurs étaient surpayés. Pour les responsables politiques de notre pays la cause de cette situation ne pouvait provenir que de la fédération de football. C'est pourquoi tout ministre de la Jeunesse et des Sports qui était nommé demandait à ce que les responsables de cette fédération soient changés dès que l'équipe nationale réalisait de mauvais résultats. L'instabilité de la FAF était devenue chronique mais le problème persistait, à savoir que l'équipe nationale était toujours aussi peu performante. Tout cela à cause de l'absence d'une réelle politique sur le football. Une politique qui serait partie du diagnostic que s'il n'y a plus de joueurs de talent c'est parce que la formation est quasi inexistante, surtout dans les clubs, véritables socles de tout l'édifice. Des clubs que l'on a laissé entre les mains de dirigeants dont la plupart ne recherchent que leurs propres intérêts en venant au football. Des clubs que l'on ne contrôle que partiellement parce qu'ils se trouve que des DJS n'ont pas l'autorité requise devant des dirigeants superpuissants. Des clubs qui ne disposent pas du minimum requis pour s'épanouir et se développer, à savoir une base d 'entraînement et un centre de formation. Des clubs, enfin, qui passent d'un jeudi à un autre, d'une surface en gazon naturel (loin d'être de qualité) à une autre en gazon synthétique. Cela fait des années que ça dure et le résultat est là, cruel de vérité, avec des sélections nationales qui se font battre par n'importe qui parce qu'elles ne disposent pas de bons joueurs. On aura beau changer de fédération, cela n'y changera rien. Malheureusement, il semblerait qu'une nouvelle fois (une énième fois) on veuille s'attaquer au sommet pour éviter de s'intéresser à la racine du mal. A cette condition, le football algérien est parti pour un très, très long sommeil.