Hommes et femmes dénonceront le manque de clairvoyance de cette arnaque de l'homme blanc qui est venu tel un cowboy sur son cheval pour emporter avec lui le trésor des indigènes et repartir galopant... Le Fespaco a entamé dimanche sa journée par les films en compétition. Autant le dire d'emblée, le service de sécurité n'est plus le même à l'entrée de chaque salle. Mieux encore, il a été renforcé. Ce qui aurait pu être à notre avantage, pourtant, vu le nombre de festivaliers qui passent par le portique d'entrée et les fouilles minutieuses répétées à chaque fois, cela peut à la longue agacer vraiment en raison du temps écoulé à attendre sous une chaleur de plomb parfois. En plus de bien regarder ce qu'il y a dans votre sac, on vous retire jusqu'à votre rouge à lèvres, et autres. Vous récupérez vos affaires plus tard. L'on est obligé d'obtempérer. C'est aussi le cas même dans notre propre hôtel. Le Fespaco a vraiment mis les bouchées doubles en matière de sécurité, eu égard au contexte politique actuel. Et c'est tant mieux... Le ciné Neerwaya qui abrite les projections des films documentaires en compétition a ouvert son bal courant l'après-midi par un court métrage signé par le réalisateur camerounais Michel Kuaté. Ce documentaire appelé le père de Tilai, revient sur l'oeuvre cinématographique et la vie du monstre sacré du cinéma burkinabé décédé l'année dernière, à savoir Idrissa Ouedraogo, dont Tilai est un de ses célèbres films ayant reçu le Grand Prix du jury au festival de Cannes en 1990. Le film évoque à travers des témoignages de ses proches collaborateurs, des extraits de ses films, mais aussi des images d'archives de la pertinence du cinéma de cet homme qui s'est donné entièrement pour le cinéma en abordant des sujets forts capitaux pour la destinée de l'Afrique. Un documentaire très intéressant suivra. Il s'agit de Pas d'or pour Kalsaka du réalisateur burkinabé Michel K. Zongo. Un film incroyable qui revient sur le scandale survenu au Burkina à propos de la transformation de plusieurs villages burkinabés en de grands chantiers de mines industrielles, dans une région qui se trouve en haut d'une colline. Une entreprise coûteuse sur laquelle le gouvernement et toute la population burkinabés avaient misé tout leur espoir pour s'en sortir... Un film incroyable Le résultat des innombrables forages sera catastrophique, et pour les villageois qui perdirent pour la plupart leur seule source de revenus, la terre, ainsi que le pays. En plus de la perte d'argent, l'on découvrira après enquête que l'eau sera infectée par du cyanure et autres produits chimiques toxiques. Hommes et femmes dénonceront le manque de clairvoyance de cette arnaque de l'homme blanc qui est venu tel un cowboy sur son cheval pour emporter avec lui le trésor des indigènes et repartir galopant... Cette image tout droit sortie d'un film western est en effet mise en scène dans ce docu-fiction pour mieux accentuer ce sentiment d'exploitation de ces hommes par l'homme. Des familles qui se plaignent, affirment qu'une indemnisation de cinq ans ne suffira pas pour combler tout ce que la loi est venue imposer par la force en venant les exproprier de leur terre et ainsi de leur métier d'agriculteur... Ainsi, des retombées économiques dévastatrices pour le pays, le film témoigne de la gravité écologique de ces mines. Un film qui dit des vérités via le langage simple et sans ambages de ces villageois téméraires qui n'abdiquent jamais. De la détermination, une autre dans un autre genre, a été fortement appréciée chez ce célèbre artiste nigérien, héros du film documentaire du Brésilien Zito Araujo. Il s'agit de Mon ami Fela qui porte bien évidemment sur le parcours atypique du chanteur, saxophoniste et militant panafricaniste Fela Kuti dont la vie a été marquée par de nombreux soubresauts et minée aussi par diverses contradictions. Le film montre aussi comment une certaine Américaine, Sandra, a été derrière son éducation «africaine» en l'aidant à comprendre ce qu'est la lutte pour la libération du peuple noir en lui prêtant de nombreux livres à ce sujet. Une femme amoureuse qui entreprenait avec Fela un rapport, dit-elle, «spirituel» et qui restera attachée à lui malgré toutes les années, alors qu'il était déjà marié à 27 femmes! Homme conscient et militant de la première heure aussi grâce à une mère militante féminine que le gouvernement fera défenestrer, Fela Kuti passera toute sa vie à lutter pour venger sa mère jusqu'à perdre le contrôle, devenir violent à son tour et sombrer dans la folie et mourir après du sida. Un être complexe Néanmoins tous les malheurs rencontrés ne feront que renforcer sa rage de se battre. Pour lui, l'art et la musique en Afrique ne servaient pas à divertir, mais à faire carrément la révolution, en cela sa musique reste aujourd'hui mythique au-delà des années et des frontières. Ce documentaire a de spécial l'intervention des gens qui ont vraiment compté sans sa vie et qui n'ont jamais eu peur de lui dire «non», lui qui imposait paradoxalement la soumission par ses ordres, à l'endroit des femmes notamment... Homme sombre qui n'a pas eu la vie facile car ayant grandi dans le ghetto, et connu la misère, voilà pourquoi dit-on il était proche de son peuple qui reconnaissait en lui un vrai porte-parole, contrairement à n'importe quel autre intellectuel. Un être complexe toutefois avec une âme blessée qui incarnait parfaitement le sens de ce qu'est le mot «résistance»!