Les habitants et les commerçants refusent de quitter les lieux sans des indemnisations préalables. Une opération de démolition graduelle sera menée au début de l'année 2006, au niveau du carrefour du Ruisseau, rue des Fusillés. Une opération qui touche des hangars, des entrepôts, des restaurants et même des habitations .... Cette décision, prise par la wilaya et la direction du métro, a suscité de grandes inquiétudes chez les propriétaires de ces structures commerciales et surtout chez les familles touchées par les mesures de restructuration du quartier. Plusieurs commerçants se sont présentés à notre rédaction et nous ont fait part de leur indignation devant l'offre de l'administration de la wilaya et du métro. Celle-ci leur a proposé, selon eux, des prix dérisoires contre l'expropriation pour cause d'utilité publique à savoir la réalisation du projet du tramway. Bientôt l'étape de démolition Au début de l'opération de recensement, les concernés ont été rassurés après avoir lu dans la presse que la wilaya, selon des responsables de l'administration, édifiera d'autre locaux sur un autre site. D'ailleurs, il a été indiqué qu'un grand terrain aux Sablettes sera attribué aux commerçants du Ruisseau pour construire leurs locaux. Seulement, les responsables de l'APC et de la wilaya ont démenti cette information en déclarant aux concernés que c'était juste des rumeurs, aucun projet n'ayant été préconisé dans ce sens. En octobre dernier les propriétaires ont reçu des convocations pour se rapprocher de la direction du métro pour expropriation et indemnisation. Apparemment ce rendez-vous est loin d'avoir été concluant, selon ces commerçants qui disent que la plupart d'entre eux qui s'étaient présentés à la direction du métro, ont été déçus par l'offre proposée. «On nous a proposé comme indemnisation, moins de la moitié de la valeur réelle des biens en bâti. Nous n'avons jamais été contre ce projet, nous demandons seulement à être indemnisés en fonction de la valeur réelle de nos biens», résume un commerçant. Soutenu par d'autres qui confirment: «Nous sommes des pères de famille et nous travaillons ici depuis une trentaine d'années. Il y en a même parmi nous qui ont vécu les événements de 1957 où des hommes ont été fusillés dans cette rue. Cela aussi représente une valeur sentimentale qui n'a pas de prix», indiquent ces propriétaires qui demandent en contrepartie aux autorités des terrains pour construire des locaux leur permettant de continuer leur activité. Il faut dire que ces commerçants sont très remontés et menacent de faire des manifestations si leurs droits ne sont pas protégés. Aussi ils veulent alerter les pouvoirs publics sur le fait qu'ils ont été surpris par l'expropriation des propriétaires et des commerçants sans qu'il y ait eu des procédures conformes à la loi 27 avril 1991. Voulant avoir plus de détails sur cette affaire nous nous sommes rapprochés des services concernés pour d'éventuelles explications. Ces derniers nous ont informé que les pouvoirs publics sont amenés à convaincre les habitants de plusieurs communes qui se trouvent sur le tracé du tramway quant à leur expropriation des lieux contre une indemnisation équitable. Le tramway coûtera 21 milliards de dinars Le responsable du projet désigné par la wilaya nous a déclaré, à ce propos: «Les commissions des enquêteurs sont passées sur les lieux pour vérifier les dossiers de chaque propriétaire. Cependant les choses ne se passent pas comme sur des roulettes car on compte déjà plusieurs habitations qui sont réparties sur plusieurs communes de l'est de la wilaya d'Alger. Les travaux du tramway doivent démarrer officiellement ce mois courant, mais il faut d'abord régler quelques «tracasseries». Une enquête d'utilité publique est ouverte pour ajuster les affaires d'expropriation pour les habitations construites le long du tracé par lequel passera la voie. L'estimation globale du projet est de 21 milliards de dinars», dira ce responsable qui nous affirme que l'inquiétude des commerçants n'a pas lieu d'être. Car, selon lui, les services des Domaines qui ont estimé les lieux indemniseront convenablement les propriétaires et même les travailleurs. Cependant, ce même responsable nous affirme que plusieurs personnes ont déjà été indemnisées, il y a des dizaines d'années, pour quitter les lieux. Elles sont revenues et elles demandent encore «leurs droits». Aussi il y a des commerçants qui exercent au noir depuis une vingtaine d'années. Ces derniers seront poursuivis en justice par la commission d'enquête. Le tracé du tramway s'étend sur une distance de 16,3 km et devra passer par les communes de Kouba, Hussein Dey, El-Harrach, El-Maquaria, Mohammadia, Bab Ezzouar et Bordj El-Kiffan. La gare principale est le point de départ du projet qui s'étend de la rue des Fusillés (Ruisseau) prenant le chemin menant vers l'avenue de Tripoli, en passant par le Caroubier, El-Mohammadia, l'intersection de Cinq Maisons. Dans sa continuité, le tracé du tramway passera au milieu de la route nationale numéro 24 en allant vers les Bananiers, l'avenue de l'Université de Bab Ezzouar, pour arriver à la route nationale n°24 B qui débouche sur le centre de Bordj El-Kiffan. Elle aboutira à son point terminus à la côte est de la localité en question. Il y aura en tout 30 stations avec 5 échangeurs. Si la mise en place de ce lien de transport n'est pas une chose aisée dans une ville à forte concentration de population, le délogement des habitants est l'une des tâches les plus compliquées. Les mouvements de protestation déclenchés après chaque délogement indiquent que les choses ne sont pas si évidentes, notamment quand il s'agit de villas érigées dans des quartiers de la périphérie de la capitale. «Le choix est déjà fait, ce moyen de transport devrait assurer le transport de 150.000 voyageurs par jour, après sa réalisation. On n'hésite pas, il faut désengorger la capitale qui est au bord de l'asphyxie en matière de transport. A cet effet, une commission chargée de l'enquête a déjà été installée», nous indique-t-on. Des ingénieurs ont été désignés pour piloter cette opération. Cette commission a travaillé pendant des semaines et toutes les propositions et les décisions ont été inscrites dans le registre de la commune. Un registre qui pourra être consulté par les citoyens invités à donner leur avis et faire des propositions. Il est à noter, en outre, que conformément à la réglementation, les procédures d'expropriation se feront sur la base d'une durée limitée n'excédant pas quatre ans. Pour ce qui est des travaux, leur lancement est prévu pour le début de l'année prochaine. Cette précipitation témoigne d'une volonté des pouvoirs publics à lancer tous les projets en attente depuis des années, notamment ceux qui ont été qualifiés de sensibles et qui ont fait hésiter plus d'un responsable. Ainsi, les deux lignes de tramway renforceront le réseau de la capitale, dont une première, reliant Alger-Centre à Dergana, sera opérationnelle en 2008 alors que la deuxième, reliant la Place des Martyrs à Aïn Benian, est toujours en étude. C'est vrai que ce projet facilitera le transport à Alger mais il a créé beaucoup d'inquiétude au niveau des habitants et des commerçants qui s'interrogent sur leur devenir. «Nous ne sommes pas convaincus par les déclarations de ces responsables mais nous espérons qu'ils tiendront leurs promesses en nous indemnisant convenablement», déclarent les commerçants.