un Front pour la promenade des Oranais Cette destination touristique par excellence, ciblée par des milliers de touristes, n'est pas près de connaître de sitôt ce soubresaut qualitatif. Le rêve se transforme en cauchemar ou encore nous donne à voir un grand gâchis qui s'offre amèrement aux yeux. Le Front de mer devient le cobaye du laboratoire où l'on expérimente, sans succès ni la moindre possibilité de pouvoir transformer grand-chose, car toutes les antidotes ont été inutiles, sauf celles pouvant faire de Wahrane la plus belle capitale de l'Ouest. Pis encore, on l'amochit par des coups de colmatages et des petites opérations de maquillage. Faire du mal à cette ville Cela se passe alors que le monde entier célèbre pompeusement le mois du Patrimoine. C'est devenu une rengaine à ne jamais négliger lorsque cette ville et ses habitants s'apprêtent à vivre et à suivre de près des petits moments heureux en toute gaieté. Faire du mal à cette ville tant accueillante est mené à bon escient. Sinon, comment interpréter le fait que le revêtement du balcon du boulevard de l'ALN, ex-Front de mer, soit, dans plusieurs tronçons, transformé en réceptacle de stagnation des eaux pluviales, alors que le projet est en chantier. Un tel constat est de fait visible lors des dernières petites trombes qui ont marqué la partie ouest du pays, dont principalement sa capitale. Plus d'un citoyen s'en offusque. Il s'agit notamment des Oranais, ayant décidé de ne plus tourner le dos à la mer, qui s'interrogent sur la nature et la qualité des travaux d'un projet, dont l'étude a nécessité la mobilisation d'un pactole financier de 30 milliards de centimes pour redorer le blason de ce balcon de 2000 mètres de long et lui donner une meilleure image à l'aune des préparatifs de l'Algérie pour les Jeux méditerranéens de 2021. Hélas! Le contraire s'est produit, alors que l'on s'attendait à une véritable transformation du Front de mer, faisant face à de somptueux immeubles et placettes, comme le triangle de Bamako abritant l'avenue Loubet, le consulat du Maroc et ses célèbres boutiques n'ayant rien du chichi, le célèbre lycée Lotfi, l'établissement spécialisé en ophtalmologie, la très réputée place des Crémeries ou encore l'immeuble du coin de la rue Lamartine, ayant abrité l'ex-consulat des USA. Des malfaçons et des déformations, sont de visu constatables offrant une image hideuse d'un Front de mer, n'ayant de Front que la misère et la désolation qui s'offrent à ces Oranais inhalant l'air iodé de la mer lors des grandes chaleurs, pendant que les visiteurs affluent en nombre pour immortaliser leurs vacances dans la ville des Deux Lions. Les malfaçons se résument essentiellement à ces petites flaques d'eau causées par la stagnation des eaux pluviales. Pourquoi donc, un tel fait a soudainement apparu alors que le projet est de surcroît en pleins travaux? Le silence radio est observé chez plus d'un de nos responsables locaux! Des ingénieurs, rencontrés sur place, l'imputent au bureau d'études n'ayant, contre toute attente, pas jugé utile de se tracasser en ne s'ingéniant pas dans la création pour embellir, aux mieux, ce balcon du Front de mer, boulevard de l'ALN actuellement. Des ouvriers, en cabans et tuniques de travail de différentes couleurs, sont imbus de leurs personnes en frappant, le long des journées, avec leurs maillets en plastique sur le dos du pavé en le collant sur le parterre du balcon donnant la belle vue de la mer et son très beau port en pleine activité, pendant que les badauds s'offrent le luxe de contempler et d'apprécier, à partir du barreaudage du Front, les bateaux remorqueurs manoeuvrant dans tous les sens en tractant et charriant ces gros bateaux chargés de conteneurs. Le maillet de la moquerie Le Front de mer a, en 2006, connu des travaux de confortement de ses assises. Ses soubassements, qui reposent sur des piliers hauts de 30 mètres, ont failli fléchir. C'est l'une des plus belles promenades de la ville d'Oran, dominant le port, elle offre près de 2 000 m de flânerie embrassant la mer. Passage obligé de tous les touristes visitant la ville, le boulevard du Front de mer est devenu l'emblème de la ville, c'est le lieu incontournable des soirées estivales. Construit à 40 m au-dessus des flots, c'est l'abbé Lambert 33e maire (1934-1941) qui entreprit sa construction. C'est toutefois bien avant (1891) qu'Emile Cayla, ingénieur en génie civil et maire d'Oran qui avait prévu la construction d'un grand balcon urbain qui s'inspirerait de la promenade des Anglais de Nice. Il avait imaginé un boulevard de 2650 mètres de longueur et 14 mètres de largeur, croisé par 10 voies transversales, mais le conseil municipal a dû renoncer au projet, estimé trop coûteux. Le plan du boulevard veillait à répondre à deux objectifs, tout d'abord celui de relier la vieille ville aux hauts quartiers, ensuite il visait la mise en valeur des terrains militaires concédés par la guerre. La construction a nécessité le comblement des ravins, celui de la Cressonnière qui fut ensuite aménagé en une place, Lyautey (actuelle place Port Saïd) et celui de la Mina, qui fut aménagé en place de la Punaise. Il a également fallu mettre en place des viaducs aux fondations très profondes, des pieux coulés dans le sol, d'une profondeur allant de 7 à 18 mètres, car le sol argileux dans certains endroits avait besoin d'être renforcé. L'Histoire devient histoires! Du point de vue architectural, le boulevard témoigne encore du passé tumultueux de la ville et de son évolution hétérogène. Les façades urbaines du boulevard font ressortir certaines particularités, le style architectural dominant est le style moderne, identifiable par l'absence d'ornementation ainsi que des formes simplistes. La partie dite moderne du tronçon est apparue après la délocalisation des casernes militaires et la vente des terrains occupés à des sociétés immobilières qui y ont implanté des tours symbolisant la modernité et le développement. C'est durant le règne du maire Henri Fouques du Parc, (1948-1962) que le boulevard du Front de mer a été parachevé. Le Front de mer d'Oran demeure incontestablement, l'un des paysages les plus pittoresques de la ville, offrant à ses habitants, ainsi qu'à ses visiteurs un lieu où il fait toujours bon se promener et se délecter de la richesse du paysage. Cette destination touristique par excellence, ciblée par des milliers de touristes, n'est pas près de connaître de sitôt ce soubresaut qualitatif dans le cadre de la dynamique touristique que l'on tend à donner, vaille que vaille, à la ville européenne d'El Bahia. Dans sa prophétie, le célèbre écrivain, Albert Camus, a fini par avoir raison en prédisant dans les années 1950 que «les Oranais tournent le dos à la mer». Vit-on donc le début de la fin des petits bistrots où l'on se délecte d'une petite chope en bonne compagnie de ces Oranais pétant la vie à fond, assistant eux aussi, impuissants, au trépas, à petit feu, de leur cité? En attendant la réponse, les locaux misent sur les préparatifs des Jeux méditerranéens, passage pour lequel on jure par tous les saints que la ville retrouvera son aura. Espérons-le!