La pression s'est accrue davantage sur les militaires au pouvoir au Soudan où une grève générale de deux jours a commencé hier, à l'appel des leaders de la contestation qui réclament désormais la mise en place d'«un gouvernement civil», plus de six semaines après la destitution du président Omar el-Béchir. Un climat de tension croissante régnait dans la matinée au Soudan notamment à Khartoum où des employés de l'aéroport, de la Banque centrale, de la compagnie nationale d'électricité, ou encore des fonctionnaires du parquet général, ont annoncé leur participation à cet arrêt de travail de 48 heures prévu mardi et mercredi. Ce mouvement de débrayage répond à l'appel des leaders de la contestation, après l'impasse dans les négociations avec le Conseil militaire de transition au pouvoir. Acteur clé de l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance du mouvement de protestation déclenché en décembre 2018, la SPA avait qualifié cette grève de «devoir révolutionnaire», appelant les manifestants à «la désobéissance civile». Depuis la semaine dernière, les syndicats de multiples secteurs ont annoncé leur soutien à la grève. L'Association des professionnels a publié un grand nombre de communiqués de soutien. Beaucoup de corporations, les secteurs médical, pétrolier, bancaire...etc, ont clairement affiché leur volonté de faire grève. Le syndicat des pilotes de ligne aussi. L'aéroport de Khartoum marchait au ralenti mardi matin avec des vols annulés. Depuis le 6 avril, des milliers de Soudanais participent à un sit-in devant le QG de l'armée pour réclamer le transfert du pouvoir aux civils, après la destitution du président el-Béchir, sous pression de la rue. Selon l'ALC, les soldats exigent les deux-tiers des postes au Conseil souverain, ce qui n'est pas acceptable pour les civils. Face au refus persistant des militaires de céder le pouvoir, l'ALC a décidé d'utiliser l'»arme devenue inévitable» de la grève générale. En cas d'absence de réaction des militaires face à cette action, Wajdi Saleh, membre de l'ALC, a menacé lundi soir de faire «monter la pression d'un cran vers une grève générale indéfinie». Pour Siddiq Farouk, un des leaders de l'ALC, la grève de deux jours a pour objectif d'envoyer un message clair au monde entier: «Le peuple soudanais souhaite un changement réel et n'acceptera pas de laisser le pouvoir aux mains des militaires.» «La grève est un moyen et non une fin en soi, elle est le droit ultime du peuple pour réaliser ses revendications», a estimé M. Farouk. Par ailleurs, les militaires ont multiplié ces derniers jours les rencontres avec les dirigeants étrangers qui les soutiennent. Le chef du Conseil militaire, Abdel Fattah al-Burhane, s'est rendu dimanche aux Emirats arabes unis au lendemain d'une visite en Egypte, deux pays qui soutiennent l'armée au pouvoir au Soudan. Pour sa part, le chef-adjoint du Conseil militaire, Mohamad Hamdan Daglo, dit «Himeidti», a rencontré le 24 mai le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane à Djeddah, dans l'ouest de l'Arabie saoudite. De leur côté, les représentants des manifestants ont rencontré les ambassadeurs britannique et saoudien à Khartoum. Ils ont notamment demandé le soutien de Riyadh «pour l'instauration d'un pouvoir civil de transition».