La presse marocaine est malade. Ce n'est un secret pour personne. Bien qu'en matière de liberté de ton elle n'ait rien à envier à sa consoeur algérienne à laquelle elle ressemble à bien des égards. Le mal dont elle souffre et dont elle a si souvent nié les symptômes n'est pas seulement le résultat de quelque obscur complot. Pourtant, le champ de la presse marocaine ne désemplit pas. Plusieurs titres ont vu le jour. Parmi lesquels il est aisé de citer Aujourd'hui Le Maroc dont le directeur de la publication et de la rédaction n'est autre que Khalil Hachimi Idrissi, un grand mélomane particulièrement porté sur la musique classique algéroise et la chanteuse Beihdja Rehal. Techniquement, ce quotidien, comme certains titres d'ailleurs à l'image du Journal Hebdomadaire, apporte une réponse concrète à l'incapacité des journalistes marocains de se remettre en question quand il l'aurait fallu. Richement installée avec tous les moyens modernes susceptibles de lui permettre de se surpasser, cette publication ne laisse point indifférent. Même si les articles consacrés à l'Algérie se distinguent par leur légèreté quand ils ne sont pas dénués de tout professionnalisme. Maroc international hebdo en a déjà fait les frais, puisque Abdellah Chancou y occupe, désormais, le poste de rédacteur en chef-adjoint: «Peut-être que j'ai envie d'essayer un autre rythme de travail, me confronter à une périodicité différente, accéder à un autre monde d'information, faire le métier au jour le jour, pousser plus loin les limites de mon énergie, changer tout simplement d'air et d'ambiance.» Le manque de professionnalisme caractérisant certaines livraisons de la presse marocaine est loin d'être fortuit. Même si le silence pudique de celle-ci sur ses difficultés ne manque pas d'être trahi par les doutes qui l'assaillaient, les troubles qu'elle affrontait. Avec Jean-Paul Pigasse, il ne serait pas exagéré de dire: «Tout au plus l'observateur attentif percevait-il, au détour d'une phrase, à la faveur d'un chiffre ou d'une information, que le bel ordonnancement des journaux dissimulait de profondes fêlures.» Dans un royaume où la liberté d'expression n'est pas une simple vue de l'esprit, la presse, tout comme en Algérie, se surprend à rêver, revigorée qu'elle est par l'incapacité des organisations politiques traditionnelles à défendre les intérêts des plus humbles et à lier leur praxis à la réalité plurielle vécue par tout un peuple. Autres temps, autres moeurs.