Israël et l'Occident accentuent leur pression sur l'Autorité palestinienne menaçant de lui couper l'aide internationale. Décidément, la victoire du Hamas aux législatives palestiniennes a induit des réactions occidentales totalement inappropriées et sans rapport avec la réalité sur le terrain par, notamment le surdimensionnement d'une hypothétique menace du mouvement islamiste palestinien, Hamas, sur l'existence d'Israël. Un Israël dont la puissance militaire, qui domine le Moyen-Orient, n'a pas d'équivalent dans la région. En diabolisant le Hamas de manière outrancière, avant même qu'il ait fait ses preuves, en tant que parti de gouvernement, l'Occident et l'Etat hébreu ne font en vérité que donner des raisons au mouvement de résistance palestinien dans sa détermination à poursuivre la lutte. Il y a tout de même un hic dans la position alarmiste des Occidentaux qui font accroire à un douteux danger qui menacerait un Etat, unique puissance nucléaire au Moyen-Orient, qui occupe des territoires reconnus par l'ONU comme étant des territoires palestiniens. La défense d'Israël aurait été admissible si, dans le même temps, l'Occident faisait pression sur l'Etat hébreu pour l'amener à retirer ses troupes des territoires palestiniens -occupés lors de la guerre des six jours- conformément aux résolutions 242 de juin 1967 et 338 d'octobre 1973 qui exigent le retrait israélien de Ghaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est. Or, les pressions de l'Occident -que l'on ne peut en l'occurrence confondre avec la communauté internationale- sont à sens unique et qui pèsent sur les seuls Palestiniens, épousent par trop étroitement les ambitions d'Israël pour ne pas être suspectes et assimilées à un diktat qui interfère dans le choix souverain du peuple palestinien. Y aurait-il une démocratie à géométrie variable qui, pour être reconnue comme telle, doit recevoir le quitus de l'Occident? et fonctionne selon les idées politiques, la religion et autres paramètres exprimés, fixés par l'Occident?. Comment peut-on exiger des Palestiniens, dont les territoires sont occupés, de désarmer -alors que c'est leur droit sacré, conforté en outre par la résolution 1514 du Conseil de sécurité de l'ONU, (1960-VIII), qui accorde aux peuples colonisés le droit de résistance- quand Israël, loin de faciliter les choses, s'ingénie au contraire à les compliquer davantage, sans susciter outre mesure les mises en garde de l'Occident, si soucieux de la sécurité de l'Etat hébreu? Ainsi, la semaine dernière, le Premier ministre israélien par intérim, Ehud Olmert, a affirmé que son pays entendait garder, dans le cadre de tout accord avec les Palestiniens, le contrôle de la vallée du Jourdain, des principaux blocs de colonies en Cisjordanie ainsi que Jérusalem-Est, en indiquant qu'«Il est hors de question d´abandonner le contrôle de la frontière est d´Israël.» La vallée du Jourdain, qui s´étend sur 70 Km le long de la frontière avec la Jordanie, représente un tiers de la superficie de la Cisjordanie (ce qui équivaut à1885 km2 en sus des blocs de peuplement au nord de la Cisjordanie, qu'Israël entend garder), occupée par Israël en 1967. Dès lors, Israël qui ne fait rien pour réunir les conditions propices à l'instauration d'une véritable paix au Proche-Orient a au contraire accentué hier ses pressions sur l'Autorité palestinienne, laissant entendre qu'elle irait jusqu'à couper tout contact avec elle au cas où le gouvernement est formé par Hamas. De fait, un responsable à la présidence israélienne, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat, a déclaré hier que le gouvernement israélien avait fait sienne la position du juge de la Cour suprême, Michael Heshin, selon lequel l´Autorité palestinienne doit être considérée comme une "entité ennemie" après la victoire du Hamas aux législatives du 25 janvier. De son côté, le ministre israélien de la Défense Shaoul Mofaz qui se trouvait au Caire, a conditionné mardi tout dialogue avec le Hamas, à un désarmement du mouvement islamiste. Shaoul Mofaz a indiqué qu'«ils doivent reconnaître l´Etat d´Israël. Ils doivent accepter tous les accords signés avec l´Autorité palestinienne. Ils doivent arrêter d´appeler à la destruction d´Israël. Ils doivent démanteler l´organisation terroriste du Hamas». Or, le responsable du Bureau politique du Hamas, Khaled Machaal, avait affirmé dans une interview à un journal russe, après l'invitation faite par Vladimir Poutine à Hamas de venir à Moscou, qu'Israël doit se retirer aux «frontières de 1967», c'est-à-dire la ligne verte, ou de démarcation, ce qui rejoint la position défendue par l'OLP d'abord, l'Autorité palestinienne ensuite. Cela signifie aussi que le Hamas accepte la configuration géopolitique existant actuellement au Proche-Orient, en fait une reconnaissance, sans doute indirecte, d'Israël. Ce qui aurait dû enlever à l'Occident le faux prétexte de la reconnaissance de l'Etat hébreu. Khaled Machaal a encore réitéré mardi lors d'une visite à Khartoum, que le processus de paix aura plus de chance d'aboutir si Israël met un terme à son «occupation des territoires palestiniens» indiquant: «Je veux dire aux Etats-Unis, à la communauté internationale et à tous ceux qui parlent de paix (...) que la voie la plus rapide pour y parvenir est de travailler pour mettre fin à l´agression israélienne et à l´occupation des territoires palestiniens», avertissant cependant que «sinon, la résistance et une attitude inébranlable seront les seules options». De fait, le Hamas, dont les dirigeants ne sont pas des gens suicidaires, est prêt à faire des concessions en fonction de l'aptitude d'Israël à appliquer les résolutions de l'ONU en se retirant des territoires palestiniens. Or, le seul obstacle à la paix, et le seul vecteur de violence au Proche-Orient, demeure l'occupation par Israël des territoires palestiniens.