L'Expression : Bonjour, Idir. Le premier cas de coronavirus enregistré en Algérie a été suivi par une véritable psychose. Les réseaux sociaux sont-ils responsables de la « contagion » de cette peur ? Idir Iharkouken : Malheureusement oui ! Comme pour toute information qui fait le buzz, aujourd'hui, les réseaux sociaux sont les canaux qui donnent à un évènement une plus grande vitalité. Je m'explique. Les réseaux sociaux sont aujourd'hui un écosystème virtuel où les gens passent de plus en plus de temps; ça fait partie des changements des usages et comportements des gens, fruit de la transformation digitale et l'accès à un Internet qui devient Atawad (any time, anywhere, any device). Les réseaux sociaux font donc partie intégrante de la vie des citoyens. Aujourd'hui, ces réseaux sociaux sont convoités par les marques et organisations, car ils permettent de réaliser ce qui avant, était impossible c'est-à-dire toucher des milliers de personnes facilement et avec un moindre coût, et donc tous tirent profit de cet avantage, mais aussi de simples personnes, des internautes qui, grâce à l'accès facile et rapide à l'information qui circule, deviennent médias à leur tour en relayant l'information et en s'exprimant sur tout sujet, n'importe où et souvent n'importe comment… Justement, les fake news sont légion ces derniers jours. Elles se sont propagées aussi vite que le virus. Comment expliquer cela ? Effectivement, ces derniers jours la blogosphère est noyée par les fake news liées au coronavirus. Ce genre d'actualités est souvent la cible des générateurs de fake news pour en tirer profit afin d'augmenter la visibilité de leurs pages, compte ou tout simplement par simple plaisir. Ces personnes profitent de la peur des gens ou de leur curiosité sur un sujet pour leur propre intérêt. Ils créent ainsi de fausses informations qui sont susceptibles d'être vraies ou reflètent une réalité probable, ce qui va pousser les internautes à relayer l'information pour devenir très rapidement… virale. Il faut savoir que ce phénomène n'est pas spécifique à l'Algérie, mais il est mondial. Certaines de ces fausses informations n'ont pas de réelle conséquence dans le monde réel mais beaucoup finissent en drame… Quelques exemples à nous donner ? Evidemment, Internet en charrie tous les jours. Il y a bien sûr les fake news des adeptes de la théorie du complot avec des «on vous cache la vérité, il y a des centaines de cas, mais l'information est étouffée». D'autres informations plus graves circulent provoquant panique et hystérie chez les citoyens. Comme c'est le cas avec l'information relative à la pénurie des masques et du gel antibactérien qui a incité une vraie ruée vers les pharmacies et autres vendeurs de ce type de produits. Au grand bonheur des spéculateurs, dont beaucoup utilisent ce type d'information pour fructifier leur «business». Souvenez-vous juste de l'épidémie des choléra et de ceux qui ont tiré profit des fake news qui circulaient. Ces fausses informations peuvent-elles être dangereuses ? On a pu voir un exemple concret, mercredi dernier, avec les émeutes au niveau de l'hôpital de Mila (est du pays). Alerté par les réseaux sociaux sur la possible présence d'un malade atteint du Covid-19, des centaines de citoyens se sont rassemblés à l'entrée de l'hôpital pour l'empêcher d'entrer. Plus globalement, les fake news créent une véritable psychose chez les gens. Certains vont se confiner dans leurs domiciles évitant tout contact avec l'extérieur, d'autres vont devenir paranoïaques ou hypocondriaques s'imaginant avoir tous les symptômes du coronavirus. Ils vont prendre d'assaut les urgences où noyer le numéro vert d'appels ce qui risque de se répercuter négativement sur les vrais malades. Ces derniers risquent de passer inaperçus devant les milliers de faux cas, c'est là le grand danger… Comment s'informer sans se laisser intoxiquer ? Tout d'abord, il faut que les internautes comprennent que tout ce qu'ils trouvent sur les réseaux sociaux n'est pas forcément vrai. Comme leur nom l'indique, ils ne sont pas une source d'information infaillible. Un réseau social, un écosystème où tout le monde peut s'exprimer, donner son avis sans que cela soit une vérité absolue. Il faut également éviter de croire tout ce que disent les pseudos pages d'information qui, en réalité, pompent de l'information un peu partout et la diffusent sans vérification. Elles sont les plus dangereuses car elles ont une image soi-disant crédible mais qui en réalité n'est pas le cas. La majorité des administrateurs sont des amateurs qui n'ont rien à voir avec le monde des médias. Leur seul but est d'avoir le plus de « leads » possible, la crédibilité de l'information est le dernier de leurs soucis. Je conseille à tous de s'informer à travers des sources d'information fiables, connues et reconnues pour leurs crédibilités et la véracité des informations qu'elles diffusent. Vous en sélectionnez trois ou quatre, si aucune d'elles ne confirme telle ou telle information, c'est qu'elle est inévitablement fausse… Quel est, selon vous, le «vaccin» que peuvent utiliser les autorités contre ce type d'information ? Un seul vaccin efficace : la sensibilisation ! Il faut redoubler d'efforts dans ce domaine, surtout chez les plus jeunes qui sont des consommateurs féroces de fake news. Je suis également de ceux qui sont pour le blocage des pages et sites de propagande qui se nourrissent de fake news. Ils représentent un vrai danger…