Le ministre de la Jeunesse et des Sports en personne admet la responsabilité de l´Etat dans la déliquescence de l´équipe nationale de football. Lorsqu'il était passé au forum de l´ENTV au mois de décembre dernier, le ministre de la Jeunesse et des Sports, Yahia Guidoum, avait affirmé que «le football algérien n'arrive plus à obtenir de bons résultats à l´échelle internationale» ajoutant que «l ´échec de ceux qui ont eu à le gérer est indiscutable». Mais lors de cette même intervention le ministre n´avait pas hésité à parler de «conditions désastreuses pour cette discipline». «Quand les équipes doivent s´entraîner, suer des moitiés de terrains, il n'y a pas lieu de s'attendre à ce que ce sport puisse réussir, avait-il dit. Le problème se complique quand on sait que des clubs ne disposent que de 2 entraîneurs, quelquefois pas qualifiés, pour diriger les 4 équipes de jeunes dont ils disposent». C´était là un discours nouveau du ministre qui, auparavant, mettait sur le dos de la seule FAF tous les malheurs de cette discipline. Lorsqu´il avait évoqué «des moitiés de terrains pour s'entraîner» et «2 entraîneurs seulement pour 4 équipes», il reconnaissait, de facto, que les pouvoirs publics avaient une part de responsabilité dans l´état déplorable dans lequel se trouve le football algérien. Responsabilité parce que les «moitiés de terrains» supposent qu´il y a déficit en infrastructures. Quant au fait qu´il n´y a que «deux entraîneurs pour diriger quatre équipes de jeunes», cela ne peut être dû à un déficit en techniciens. Dans les deux cas, (constructions de stades et aménagement d´aires de jeu et formation d´entraîneurs), l´implication de l´Etat est requise conformément à toutes les lois sur le sport qui ont été promulguées de 1989 à nos jours. L'ex-président de la FAF, M.Mohamed Raouraoua, n´avait eu de cesse, lors de toutes les AG de cette instance qu´il avait eues à présider et dans toutes les interviews qu´il avait eues à accorder à la presse nationale, à mettre en exergue ces deux déficits et à souligner que dans de telles conditions le football algérien était parti pour végéter durant une longue période. Il y a, bien sûr, des détracteurs qui disent que des pays comme le Togo ou l´Angola, qui disposent de moins de moyens que le nôtre, seront, eux, représentés lors de la prochaine Coupe du monde. C´est, peut-être vrai, mais il convient de relativiser ce constat. Ce ne sont pas seulement le Togo et l´Angola qui disposent de moins de moyens que le nôtre (encore qu´il convient de noter que le second pays avec ses hydrocarbures n´est pas aussi démuni que cela) mais sûrement la majorité des pays africains. Mais d´autres pays aux moyens eux-aussi non négligeables ne seront pas en Allemagne, des pays comme l´Afrique du Sud, le Nigeria, l´Egypte ou la Libye, par exemple. Nous ajouterons que la référence aux pays africains est trompeuse. Avant de parler de l'Algérie pour le Togo, il faudrait évoquer le Sénégal qui dispose d'une équipe nationale nettement plus performante que la nôtre et qui s'est fait éliminer par celle des Eperviers togolais. La même remarque s´applique pour l´Angola, qui dans le même groupe que l´Algérie, a barré la route du mondial au Nigeria des Okocha, Martins et autres Kanu et Agahowa. Nous ne parlerons pas du Ghana et de la Côte d´Ivoire dont l´armada des joueurs expatriés, très talentueux, est impressionnante ou de la Tunisie qui a, depuis longtemps, compris que sans une politique de fond sur le football entreprise par les plus hautes autorités du pays (et lorsqu´on parle de «hautes» on fait référence à des institutions au-dessus de son ministère de la Jeunesse et des Sports) il n´y a point de salut pour la discipline. Il est, peut-être, malheureux de le dire mais la génération de joueurs dont dispose actuellement le football algérien est la plus faible depuis l´indépendance du pays en 1962. La situation s´est considérablement compliquée par le fait que celle de nos joueurs émigrés n´a vraiment rien d´extraordinaire en dépit de la volonté de ces derniers de vouloir défendre les couleurs de leur pays d´origine. Si nous avons des joueurs limités au niveau local ce n´est pas tant parce que ces athlètes n´ont pas de prédispositions pour pratiquer le football mais bien en raison de leur déficit en formation de base comme nous l´avons toujours écrit et comme l´ont reconnu MM.Guidoum et Raouraoua en faisant état de manque d´infrastructures et d´encadreurs pour cela. Un Robert Nouzaret, ex-entraîneur français du MC Alger, aux compétences avérées pour avoir coaché des clubs professionnels et pour avoir été lui-même un joueur professionnel, avait eu l'oeil neutre de celui qui est venu découvrir notre football. Il n´avait pas hésité à faire état des carences que traînent les joueurs algériens. Avec de telles conditions on veut monter une équipe nationale compétitive. Du rêve et de l´utopie que tout cela. Il ne s´agit, donc, plus de s´attaquer à la seule FAF à travers les résultats de l'équipe nationale de football. Il y a une responsabilité des pouvoirs publics qui est engagée et qu´admet le ministre de la Jeunesse et des Sports en personne. Un ministre, qui dans une interview accordée à un de nos confrères, avait fait savoir que l´équipe nationale allait être dotée d´un entraîneur étranger. Une démarche qui ne répond à aucune logique. Tout entraîneur étranger que l´on ramènera est voué à l´échec du fait que les joueurs que l´on mettra à sa disposition ne sont pas performants. Cela s'apparente à de la politique de précipitation: on veut tout et tout de suite. Au lieu de songer à mettre les joueurs actuels en permanence sous sa coupe, on ferait mieux de s´investir dans les clubs en les structurant puis en leur donnant les moyens de se développer. Des moyens qui se matérialiseront par la dotation d´une base d´entraînement et de formation. C´est en se projetant sur l´avenir, en sachant faire preuve de persévérance et de patience que l´on obtiendra des résultats probants et qui sont appelés à durer dans le temps par un renouvellement constant de l'élite. Le drame avec la grande équipe de 1982 avait été de ne pas avoir prévu qu´elle n´était pas éternelle. A l´époque, aucune politique de relève n´avait été mise en application. Ce qui fait que cette équipe, telle une bougie, avait fini par se consumer pour s´éteindre totalement, après les Coupes d´Afrique afro-asiatique des nations en 1991. Rabah Madjer en avait été «le dernier des Mohicans», l´ultime vestige d´une formation bâtie sur un système qui avait consisté en 1977 à placer les clubs sous la coupe des entreprises publiques. Aujourd´hui il n´y a ni Mohican, ni vestige mais une équipe nationale qui traîne sa peine et sa déprime, une équipe nationale, dont on pense qu´avec les mauvaises briques et le mauvais ciment qu´elle propose, on peut s´attendre à ce que le maçon (entraîneur) étranger nous érige un mur des plus solides. Que l´on s´attelle à améliorer la qualité de ces briques et ce ciment, alors et seulement alors, on sera en droit de croire en une embellie.