La France a déployé temporairement deux chasseurs Rafale et deux bâtiments de la Marine nationale en Méditerranée orientale sur fond de tensions entre la Grèce et la Turquie autour de riches gisements gaziers, a annoncé jeudi le ministère français des Armées. Les deux Rafale vont faire «étape» jeudi à La Sude, en Crète, a indiqué le ministère dans un communiqué. Ils y sont attendus dans la matinée et y resteront «quelques jours», a-t-on précisé. Ils avaient été précédemment déployés à Chypre, de lundi à mercredi pour un exercice. Le porte-hélicoptères Tonnerre, qui est en route vers Beyrouth pour y apporter de l'aide après l'explosion meurtrière du 4 août, a par ailleurs été rejoint en Méditerranée par la frégate La Fayette qui avait appareillé de Larnaca (Chypre) et a réalisé un exercice avec la Marine grecque. «Cette présence militaire a pour but de renforcer l'appréciation autonome de la situation et d'affirmer l'attachement de la France à la libre circulation, à la sécurité de la navigation maritime en Méditerranée et au respect du droit international», a souligné le ministère des Armées. Le président français Emmanuel Macron a annoncé mercredi soir un renforcement temporaire de la présence militaire française sur zone et appelé la Grèce et la Turquie, toutes deux membres de l'Otan, à se concerter davantage pour apaiser les tensions. La découverte de vastes gisements gaziers en Méditerranée orientale a renforcé les tensions entre la Turquie et la Grèce, aux relations régulièrement ponctuées de crises. La situation s'est détériorée, lundi, après le déploiement par Ankara d'un navire de prospection des hydrocarbures en Méditerranée orientale, conformément à l'accord conclu en novembre entre la Turquie et le Gouvernement d'union nationale libyen (GNA) qui a son siège à Tripoli, a-t-on expliqué. Le Pentagone s'est inquiété jeudi du déploiement militaire français en Méditerranée orientale en soutien à la Grèce face aux revendications gazières de la Turquie, soulignant qu'il intervient dans un contexte «moins que coopératif» entre Paris et Ankara. L'armée américaine est «bien évidemment préoccupée par les incidents qui se produisent en Méditerranée orientale», a indiqué un porte-parole du ministère américain de la Défense, Jonathan Hoffman. La France et la Turquie sont «tous deux des alliés extrêmement importants de l'Otan et nous voudrions voir les tensions diminuer», a ajouté M. Hoffman au cours d'un point de presse. «Nous voudrions donc qu'ils continuent de coopérer et qu'ils trouvent des solutions qui n'impliquent pas la nécessité d'avoir des navires de guerre ou des avions déployés dans un environnement moins que coopératif», a-t-il conclu.Une semaine plus tôt, le président turc Recep Tayyip Erdogan avait annoncé la reprise des recherches turques en Méditerranée orientale. Cette annonce avait mis fin à une suspension de quelques jours des recherches turques, arrachée par la chancelière allemande Angela Merkel pour apaiser les fortes tensions entre la Turquie et la Grèce. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré jeudi qu'il allait s'entretenir dans la journée avec la chancelière allemande Angela Merkel et le président du Conseil européen Charles Michel pour tenter d'apaiser les tensions en Méditerranée orientale. «La solution en Méditerranée orientale passe par le dialogue et les négociations», a affirmé le président turc, ajoutant toutefois qu'Ankara ne «laisserait aucun pays empiéter sur ses droits». La découverte ces dernières années de vastes gisements gaziers en Méditerranée orientale a aiguisé l'appétit des pays riverains dont la Grèce, l'Egypte et Israël, et renforcé les tensions entre la Turquie et la Grèce, deux pays voisins aux relations régulièrement ponctuées de crises. La situation s'est notamment détériorée après le déploiement lundi par Ankara d'un navire de recherche sismique, escorté par des bâtiments militaires, pour effectuer des recherches de gisements dans une zone revendiquée par Athènes. La marine grecque est également présente dans la zone pour «surveiller» les activités turques, selon Athènes. Les tensions actuelles sont en grande partie dues à un différend entre Athènes et Ankara concernant les délimitations de leurs frontières maritimes, à l'origine de nombreuses disputes ces dernières années entre ces deux membres de l'Otan. Athènes accuse Ankara de violer son territoire en effectuant des recherches énergétiques au sud de l'île grecque de Kastellorizo (Meis, en turc), mais la Turquie refuse d'admettre que ce petit territoire situé près de ses côtes limite son champ d'action. «Revendiquer une souveraineté maritime en se servant de l'île de Meis, située à deux kilomètres des côtes turques et 580 kilomètres de la Grèce métropolitaine, ne peut s'expliquer rationnellement», a ainsi estimé M. Erdogan jeudi.