Mohamed Fellag est, incontestablement l'un de nos artistes algériens qui a brassé le maximum de genres avec un talent exceptionnel qui a fait de lui un artiste indétrônable dans le style qui est le sien. Mohamed Fellag est à la fois acteur, humoriste, écrivain et nouvelliste. C'est un artiste qui a marqué, de manière indélébile, plus d'une génération, surtout à travers ses innombrables et mémorables monologues restés dans la mémoire collective. Des monologues où il a réussi de fort belle manière à restituer le vécu des Algériens de plusieurs générations. Avec un sens de l'humour propre à lui, ajouté à son sens de la dérision, Mohamed Fellag est parvenu à s'imposer comme le maestro algérien du rire et du monologue. En décidant d'opter pour le monologue en faisant cavalier seul sur scène, Fellag a pris un grand risque car il s'agit d'une très dure mission que celle de pouvoir occuper et distraire le spectateur pendant plus d'une heure sans se lasser et sans tomber dans les pièges de l'oubli que peuvent provoquer des trous de mémoire imprévisibles. Fellag s'est montré digne d'une telle mission puisqu'il a réussi à gagner un pari qu'il s'était fixé dès le départ. D'ailleurs, des décennies plus tard, et après avoir écrit des tas de livres, joué dans plusieurs films, c'est en tant qu'humoriste du one-man-show qu'il reste le plus performant, même si ses prestations dans les films ne manquent pas de génie et de prestance. Mais, sur scène, quand il est seul, Fellag est tout simplement adoré par ses fans car il sait répondre à toutes leurs attentes. C'est un as! Mohamed Fellag fait partie de cette très longue liste d'artistes dont la région d'origine n'est autre qu'Azeffoun qui a donné Mohamed et Saïd Hilmi, El Anka et El Ankis, Issiakhem et Nouara, etc. C'est dans l'ex-Port-Gueydon que Fellag vit le jour le 31 mars 1950. Des dispositions pour le théâtre L'enfant d'Azeffoun n'apprit que le kabyle, enfant, tout comme tout le monde à l'époque dans les villages de Kabylie. Quand il a huit ans, sa famille s'installa à Alger et son champ linguistique s'enrichit alors avec l'arabe dialectal et le français. Sa vie fut secouée par un drame familial qui le hantera plus tard: il s'agit du décès de son père alors qu'il n'avait que 15 ans. L'ancien maquisard qui est sorti vivant de la guerre d'indépendance, mourut dans un accident de la circulation. Dès son jeune âge, Fellag montra des prédispositions pour le théâtre. Il avait cet art dans le sang. Et c'est tout naturellement qu'il atterrit, en 1968, à l'Institut national des arts dramatiques et chorégraphiques de Bordj el Kiffan. Sa formation dura 4 ans. Après quoi, il fit un passage au TNA avant de lancer sa propre troupe avec ses amis. Après avoir joué plusieurs spectacles un peu partout, Fellag s'envola au Canada en 1978. Il vécut dans son pays, puis en France jusqu'à 1985, année durant laquelle il revint au pays pour renouer avec le TNA. Comédien et metteur en scène, au départ, Fellag finit par se mettre à l'écriture théâtrale avant de monter son propre texte à peine une année après avoir rejoint le TNA. Il s'agit des «Aventures de Tchop». En choisissant de jouer ce spectacle dans les trois langues: kabyle, arabe et français, Fellag ratissa large et il sortit de l'anonymat. Mais il faut attendre l'année 1991 pour que Fellag connaisse la consécration grâce à son célèbre one-man-show «Cocktail-khorotov» mais aussi «Babor Australie» et «Sos Labas». Joués en kabyle et en arabe, ces spectacles avaient fait un tabac. N'étant pas fait pour camper des rôles administratifs, le passage de Fellag en tant que directeur du théâtre de Béjaïa fit long feu. L'exil et la terre natale La dégradation de la situation sécuritaire en Algérie a poussé Fellag à l'exil. Après un passage en Tunisie, Fellag s'installa en France où il écrivit et joua un autre chef-d'oeuvre, faut-il le rappeler:«Djurdjurassic Park». Mais cette fois-ci, Fellag, en plus du kabyle et de l'arabe, réalisa une version francophone de son spectacle. Le succès est également au rendez-vous tout comme il le sera désormais pour tous ses autres monologues à l'instar de «Le dernier chameau» ou encore «Tous les Algériens sont des mécaniciens». Mohamed Fellag a parallèlement écrit et publié de nombreux livres dont des romans et des recueils de nouvelles à l'instar de «Rue des petites daurades», «L'allumeur de rêves berbères», «Le mécano du vendredi», etc. Quant aux films, Fellag a participé dans plusieurs dont le fameux «Ce que le jour doit à la nuit» d'Alexandre Arcady, adapté du roman éponyme de Yasmina Khadra, mais aussi dans plusieurs autres célèbres films comme «Hassan Niya», de «Hollywood à Tamanrasset», «Le gone du chaâba», «L'ennemi intime», Monsieur Lazhar, etc. Le parcours de Mohamed Fellag, aussi bien dans le théâtre, qu'au cinéma, à la télévision qu'en littérature est tout simplement fascinant et impressionnant. Mohamed Fellag est l'un des piliers de la culture algérienne. Même si les circonstances l'ont empêché de continuer de vivre en permanence dans son pays, toute l'oeuvre de Mohamed Fellag est inspirée de sa terre natale et de son peuple ainsi que de sa propre vie et parcours. Mohamed Fellag a su raconter ses imperfections et celles de l'Algérie avec un humour et un génie dont il est le seul à détenir le secret et les ingrédients.