Le musicien Mustapha Skandrani est décédé le 18 octobre 2005 laissant un vide immense sur la scène artistique algérienne et plus particulièrement celle du chaâbi qu'il a illuminé et agrémenté avec ses notes suaves, pendant plusieurs décennies, aux côtés de monstres sacrés de ce genre, comme El Hadj Mhamed El Anka, El Hachemi Guerouabi, Amar Ezzahi et tant d'autres. Mustapha Skandrani était unique et c'est la raison pour laquelle les monuments du chaâbi de l'époque ne pouvaient pas se passer de lui aussi bien sur scène que lors des soirées mythiques qu'ils animaient, notamment dans l'Algérois. Quand le tour de Mustapha Skandrani arrivait pour exécuter son intermède, voire des varriations, lors des longues qacidate qu'interprétaient les icones du chaâbi, on assistait inexorablement à d'intenses moments de délectation grâce à une véritable bifurcation musicale pleine d'improvisations et qui tenait en haleine les mélomanes pendant de longues minutes. Mustapha Skandrani ne décevait jamais car il avait toujours ce génie qui lui permettait de faire plonger l'auditeur pendant quelques minutes dans un univers musical qui n'était pas tout à fait du chaâbi, mais qui ne constituait en aucun cas une fausse note avec ce style envoûtant. Un artiste inimitable Mustapha Skadrani était alors longuement et sincèrement applaudi par l'assistance qui ne se lassait jamais de ses prestations magistrales dont il était le seul à détenir le secret. Certes, il y a eu d'autres pianistes au talent exceptionnel ayant accompagné les mêmes maîtres, mais la touche de Mustapha Skandrani était inimitable. Peut-être que c'est le fait qu'il soit né dans le vivier du chaâbi, la Casbah, qui pourrait expliquer, en partie, ce don et talent uniques. C'est dans cette Casbah mythique qu'est né Mustpaha Skandrani le 17 novembre 1920. Malgré le contexte difficile de l'époque, Mustapha Skandrani a pu tout de même poursuivre sa scolarité jusqu'au brevet élémentaire. Il avait en outre la chance d'appartenir à une famille de mordus de la musique, de laquelle il en hérita le talent et le savoir-faire dont il fera preuve plus tard. Presque naturellement, Mustapha Skandrani s'inscrivit à l'école Nadi «Et-Taraqi» d'Alger faisant ainsi irruption dans un univers où il ira loin. Parmi les enseignants dont Mustpaha Skandrani était l'élève en musique, on pourrait citer Mohamed Bentefahi et Abderrezak Fakhardji. Mustapha Skandrani n'est pas directement tombé sous le charme du piano puisque son premier amour a été la mandoline. Coup de foudre pour le piano Ce n'est que plus tard qu'il eut un coup de foudre pour les sonorités douces et exceptionnelles du piano. Pour apprendre à manier le piano à la perfection, il entama une formation en 1938 dans le cadre d'une troupe de musique andalouse drivée par Ahmed Sebti avant de poursuivre ce chemin passionnant avec un grand maitre, en l'occurrence: El Hadj M'rizek. Son talent fut vite détecté et Mustpaha Skandrani devint alors le compagnon de pas mal de sommités. Il composa lui-même des centaines de pièces musicales ayant accompagné des chefs-d'oeuvre artistiques dont les deux célèbres et immortelles chansons «El Harraz», et «Youm el djemaâ khardjou riam» mais aussi «Kifach hilti», «Qahoua wa latah» de Mohamed El Badji ou encore «Abouya hnini». Sa maitrise de la musique et son assiduité sur scène a poussé le Cardinal, El Anka, à lui confier la mission de chef d'orchestre. El Anka sera suivi par Guerouabi, mais aussi Amar Ezzahi et d'autres grandes figures de la chanson chaâbie. Sa carrière artistique exceptionnelle lui a valu d'être nommé à la tête du conservatoire d'Alger en 1981. Mustapha Skandrani nous a quittés le 18 octobre à l'âge de 85 ans. Il repose au cimetière de Sidi Mhamed.