Un traité avec l'Algérie passe d'abord par des gestes politiques forts. Les commentaires de la presse parisienne après la visite de Philippe Douste-Blazy en Algérie sont unanimes, «Le traité d'amitié algéro-français est renvoyé aux calendes grecques». «La France et l'Algérie reportent la signature du traité» pour le journal Le Monde, «Bouteflika ajourne le traité» ; pour Le Figaro, «le traité n'est pas pour demain» titrent Le Parisien et Libération. Les pronostics d'échec sur la visite du ministre français se sont donc confirmés. La démarche volontariste du président Chirac n'a pas réussi à dissiper toutes les divergences, d'autant comme l'a affirmé Mohamed Bedjaoui, ministre des Affaires étrangères, que ce traité n'est pas entre deux chefs d'Etat mais devrait être entre les deux peuples algérien et français. Or, le peuple algérien a été de nouveau blessé dans sa mémoire par la loi du 23 février qui, même abrogée dans ses articles les plus scandaleux, remet au premier plan la nécessité de «purger le passé» comme l'écrit Le Figaro. La question de la repentance exigée par des partis politiques et des organisations algériennes ne semble trouver aucun écho en France où l'on insiste en revanche sur le dossier des harkis. C'est dire combien les conditions psychologiques et politiques sont loin d'être réunies pour passer à la phase exécution du traité. Est-il pour autant définitivement enterré? Difficile de répondre à cette question au vu des difficultés intérieures que traverse actuellement le gouvernement français et surtout le président Chirac. Le Monde, plus prudent, évoque un report même si «aucun calendrier spécial n'a été retenu par les deux parties.» Rien ne garantit que la prochaine majorité au pouvoir ou le prochain président, les présidentielles sont prévues en 2007, n'inscrivent le traité d'amitié au menu de leurs priorités. Mais là n'est pas le principal obstacle. Paris ne semble pas avoir compris qu'un traité avec l'Algérie passe d'abord par des gestes politiques forts, qu'il s'agisse de la période coloniale ou des relations bilatérales présentes. Sur la question du Sahara occidental, les Algériens attendent davantage que de vagues déclarations sur le droit international. Des actes à l'ONU et dans la region afin de dénouer la crise auraient été plus appréciés. Douste-Blazy a reconnu à ce propos «qu'il pouvait y avoir entre amis parfois des divergences» alors que les observateurs évoquent plus volontiers «l'impasse» des relations sur le dossier du Sahara occidental .Il est donc difficile de ne pas parler d'échec de la visite du ministre français qui n'a pas réussi à relancer le processus mais qui a eu en plus à «encaisser» les contre-arguments algériens. Le Figaro croit savoir que le président Bouteflika «a soufflé le chaud et le froid» pendant les deux heures et demie avec Douste-Blazy sur des questions telles que l'octroi des visas aux Algériens et la repentance qui est due aux souffrances de ces derniers. En définitive, si Paris souhaite relancer le projet d'amitié il lui faudra sérieusement revoir sa copie.