Du fait de la mentalité rentière de certains responsables, nécessitant un renouveau culturel, épaulés par des experts organiques aux ordres, pour reprendre l'expression de Gramsci, pour éviter l'impasse de l'économie algérienne, l'on devra combattre quatre mythes que certains responsables devraient éviter. Or, combien de fois nous n'avons pas attiré l'attention depuis de longues années sur les dérives de la politique économique mais avons-nous été écouté ((voir www.google.com 1980/2020)? La remontrance du président de la République avant son départ en Allemagne, en présence des plus hautes autorités du pays, vis-à-vis du résultat mitigé du gouvernement actuel l'atteste et préfigurant, souhaitons-le, d'importantes décisions dans un proche avenir au profit exclusif du devenir de l'Algérie, Premier mythe à éviter, prévoir un développement sans bonne gouvernance? Les scandales financiers mis à en plein jour, ayant existé par le passé, mais de moindres dimensions, relatés ces dernières années montrent clairement que certains dirigeants n'étaient pas mus par les intérêts supérieurs du pays. Les dernières nouvelles en date du 10 janvier 2021, d'un ex- Premier ministre ayant présidé aux destinées du pays pendant près de 20 ans montrent qu'il se livrait à la vente de lingots d'or sur le marché noir et au moment de tensions budgétaires, un ministre du gouvernement actuel, celui des Transports avec le P-DG d'Air Algérie contractaient des marchés en devises douteux, ces dernières affaires ont amplifié une névrose collective auprès de l'immense majorité de la population confrontée à la dure réalité quotidienne, ne voyant pas le bout du tunnel du fait du manque de visibilité et de cohérence de la politique socio-économique. La situation socio-économique est préoccupante à l'instar de bon nombre de pays dans le monde du fait de la crise actuelle. L'annonce du ministre des Finances d'une réduction des importations de 8 milliards de dollars en 2020 ne relève pas d'une bonne gestion, mais de la réduction drastique des importations qui ont paralysé bon nombre de secteurs. C'est comme dans un ménage où la réduction de la nourriture entraîne des maladies sur le corps social. En 2020, excepté le secteur agricole qui a connu un réel dynamisme pour certains produits agricoles, mais toujours dépendant de certains inputs et pour l'importation du blé, le taux de croissance du produit intérieur brut PIB algérien dépend fondamentalement via la dépense publique de l'évolution du cours des hydrocarbures qui détermine à la fois le taux de croissance, le taux d'emploi et les réserves de change. Pour l'Algérie,,selon le FMI dans son rapport du 14 avril 2020, le produit intérieur brut réel (PIB) devrait se contracter de 5,2% durant l'année 2020, le rapport de décembre 2020 donnant un taux négatif de 6,5% et suite à cette baisse, le PIB réel devrait se redresser en 2021 à ¾%, taux calculé en référence à l'année 2020 (taux de croissance négatif) donnant globalement, à taux constant, un taux de croissance entre 0 et 1% en termes réels, ce taux étant inférieur au taux de pression démographique. La Caisse nationale des retraites (CNR), qui a connu, depuis 2014, un déficit qui ne cesse de s'accroître en passant de 1,2 milliard de dinars en 2014 à 5,2 milliards de dinars en 2019, lequel atteindrait les 5,3 milliards DA en 2020, le nombre de retraités s'élevant fin 2019 à 3,2 millions, ces transferts devant être ciblés pour les plus démunis, Deuxième mythe des solutions purement monétaristes à la Friedmann, comme la solution miracle de la dévaluation du dinar pour dynamiser les exportations hors hydrocarbures. Or ces recettes sont remises en cause récemment même par le FMI et la Banque mondiale. Le cours du dinar est passé à 5 dinars un dollar vers les années 1970 à 116 dinars un dollars en 2019, plus de 132 dinars un dollar en janvier 2021, et toujours directement et indirectement les exportations 98% des entrées en devises sont représentées par les hydrocarbures et ses dérivées, montrant que le blocage est d'ordre systémique. Le déficit budgétaire qui selon le PLF2021, serait de 21,75 milliards de dollars en 2021 au cours de 128 dinars un dollar, cotation au moment de l'élaboration de cette loi, contre à la clôture 2020 de 18,60 milliards de dollars et un déficit global du Trésor prévu de 28,26 milliards de dollars. Pour faire face aux tensions financières, vision purement monétariste, source d'inflation en cas de non-création de valeur ajoutée, nous assistons à une dévaluation accélérée qui ne dit pas son nom de la cotation du dinar officiel du dinar où le 10 janvier 2021, un euro s'échange à 162,7211 dinars et 132, 2076 un dollar. La dépréciation simultanée du dinar par rapport au dollar et l'euro a pour but essentiel de combler artificiellement le déficit budgétaire, non articulé à un véritable plan de relance économique et donc assimilable à un impôt indirect que supporteront les consommateurs algériens. Avec la dominance de la sphère informelle qui contrôle plus de 50% de l'activité économique, hors hydrocarbures et plus de 33% de la masse monétaire en circulation où faute de la compréhension du fonctionnement de cette sphère claire l'on croit combattre par des actions bureaucratiques, expliquant tous les échecs de cette intégration (voir le poids de la sphère informelle et ses incidences géostratégiques au Maghreb étude du professeur Abderrahmane Mebtoul réalisée pour l'Institut français des relations internationales IFRI-Paris décembre 2013 réactualisée dans la revue Stratégie du ministère de la Défense nationale Imdep octobre 2019), Troisième mythe, des start-up et la privatisation sans le développement de la numérisation, la maîtrise des nouvelles technologies, le renouvellement des institutions autour de grands pôles régionaux, une véritable décentralisation, et la dynamisation de l'appareil productif. L''expérience des pays développés montre que la rentabilité des star -up est fonction d'institutions et d'entreprises performantes alors que le tissu économique algérien est composé selon l'ONS à plus de 80% d'entreprises familiales, de petites SARL, peu innovantes. Evitons de renouveler les expériences négatives de l'Ansej que, selon un rapport officiel 2020, plus de 70% des projets, des jeunes promoteurs, sont en difficultés ou en faillite, ne pouvant pas rembourser les emprunts bancaires. La privatisation sans réformes structurelles avec l'absence de titres de propriété clairs, des comptabilités défectueuses, des sureffectifs (le ministre de l'Energie ayant évoqué récemment des sureffectifs même à Sonatrach), la léthargie de la Bourse d'Alger où l'on a créé un stade sans spectateurs, des banques qui croulent sous le poids des créances douteuses et le déficit structurel de la majorité des entreprises publiques processus qui ne peut intervenir avec succès que s'il s'insère dans le cadre d'une cohérence et visibilité de la politique socio- économique globale et que s'il s'accompagne d'un univers concurrentiel et un dialogue soutenu entre les partenaires sociaux. C'est un acte éminemment politique et non technique car déplaçant des segments de pouvoir d'où des résistances au changement des tenants de rente, ne devant pas confondre privatisation et démonopolisation,encouragement d'investisseurs privés nouveaux où le partenariat public privé PPP s'appliquant surtout aux infrastructures, où l'Etat reste le maitre d'oeuvre, processus complémentaires, éminemment politique, allant vers le désengagement de l'Etat de la sphère économique afin qu'il se consacre à son rôle de régulateur stratégique en économie de marché. Quatrième mythe, l'exportation des matières premières brutes comme facteur de développement avec une entrée de devises pouvant remplacer les hydrocarbures sans maturation des projets comme en témoignent des déclarations contradictoires. Ainsi, un ex-ministre de l'Industrie en février 2008, à la télévision algérienne, repris par l'APS annonce que le coût du projet de Gara Djebilet avec toutes les annexes est de 15/16 milliards de dollars. En Conseil des ministres courant 2011 on annonce entre 8/9 milliards de dollars et l'actuel ministre de l'industrie en date du 11 juin 2020 avec le projet du phosphate, l'investissement serait entre15/16 milliards de dollars nécessitant de grands investissements 16 milliards de dollars dans les centrales électriques, des réseaux de transport, une utilisation rationnelle de l'eau, des réseaux de distribution qui font défaut du fait de l'éloignement des sources d'approvisionnement, tout en évitant la détérioration de l'environnement, unités très polluantes et surtout une formation pointue. Par ailleurs, ces projets avec la numérisation de cette filière pour réduire les coûts, au niveau mondial, créent de moins en moins d'emplois. En prenant l'hypothèse de 7 milliards de dollars d'investissement, le retour en capital pour une exportation de 30 000 tonnes de fer brut/an, serait de 8/10 ans. Pas de rente et donc, seule la transformation en produits nobles(aciers spéciaux) peut procurer une valeur ajoutée plus importante à l'exportation, mais nécessitant d'importants investissements et des partenaires qui contrôlent le marché mondial. Par ailleurs où en sont les réalisations effectives des projets de mines d'or, proposés aux jeunes investisseurs dans le Sud sachant que l'exploitation a un coût important, et la rentabilité est fonction du cours de l'once d'or qui fluctue depuis trois années entre 1600 et 2100 dollars l'once. Quant au complexe de zinc qui devrait entrer en production selon le ministre des Mines en 2024, sauf problèmes techniques ou de financement, selon les règles financières internationales, le seuil de rentabilité ne se fera pas avant trois ans soit 2027, les exportations en fonction du choix du partenaire étranger, le marché intérieur comme pour le fer étant trop étroit, et le retour de l'investissement dépendra du coût final du projet. En résumé, l'Algérie est encore debout grâce aux patriotes honnêtes qui constituent l'immense majorité des travailleurs et des cadres dirigeants, devant éviter les errements du passé en ces moments de hautes tensions géostratégiques, financières et sociales avec le retour de l'inflation en 2021 que l'on ne combat pas avec des slogans ou des décrets. D'où l'importance du renouveau de la gouvernance, un langage de vérité, rien que la vérité, ni sinistrose, ni sur autosatisfaction destructrice à laquelle la population algérienne ne croit plus.Pour la prospérité de l'Algérie éternelle, pays à fortes potentialités et acteur stratégique de la stabilité du Bassin méditerranéen et du continent Afrique s'impose un renouveau culturel loin de la mentalité rentière. Cependant, soyons réaliste, la rente des hydrocarbures sera pour longtemps, la principale société pourvoyeuse de devises où avec la crise actuelle de l'impact de l'épidémie du coronavirus, selon le FMI, le retour à la normale de la croissance étant prévu pas avant juin 2022, il est utopique d'attirer massivement les IDE et de canaliser le capital-argent de la sphère informelle. La transition d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures, suppose un profond réaménagement du pouvoir, nécessitant une restructuration du système partisan loin des aléas de la rente, et surtout la dynamisation de la société civile, pas celles qui vivent de la rente et qui ont applaudi tous les gouvernements passés, qui, en symbiose avec les Etats et les institutions internationales jouera un rôle de plus en plus déterminant en ce XXIème siècle. Le compromis des années 2021-2030 devra concilier l'impératif de productivité et la cohérence sociale, les principes d'une société ouverte et le devoir de solidarité, en un mot l'efficacité et une profonde justice sociale qui ne saurait signifier égalitarisme vision populiste suicidaire, En bref, la réussite du processus de développement implique la refonte du système politique et socio-économique.