Explorer l'être humain et ses zones obscures est le propos de ce long métrage tourné dans le cadre de «Alger 2007, capitale de la culture arabe». Un essai puis un clap. Ça y est, le premier tour de manivelle est donné. C'est dans le jardin de la belle enceinte de la villa Pouillon, surplombant le Clos Salembier, non loin du monument de Riadh El Feth que le réalisateur de Thé d'Ania notamment, Saïd Ould Khelifa a donné le coup d'envoi, dimanche dernier, de la réalisation de son nouveau film Vivantes! Un long métrage de fiction coproduit par l'Entv et Procom International que dirige la réalisatrice et productrice Nadia Cherabi. Vivantes! faut-il le noter, est soutenu par le commissariat de «Alger 2007, capitale de la culture arabe». Il en constitue de ce fait, le premier film, à qui une aide financière est octroyée pour réaliser ce projet qui sera tourné en 35 mm et en cinémascope. Six semaines seront nécessaires pour le tournage et douze pour le montage afin qu'il soit fin prêt pour janvier 2007. Le sujet? Vivantes! est tiré d'un fait divers dont la presse a parlé un moment puis plus rien. Il raconte l'innommable, l'effroyable drame d'un groupe de femmes venues un jour se réfugier dans un camp de fortune au Sahara. Venues des quatre coins d'Algérie à la recherche d'un travail de survie, en faisant le ménage, elles sont victimes une nuit d'une véritable descente expéditive. Elles sont agressées puis violées. Leurs auteurs est un contingent de jeunes et moins jeunes chômeurs et donc sensibles, nous pouvons lire sur le synopsis, aux harangues haineuses et intolérantes. «Il s'agit ainsi de montrer combien l'être en souffrance est souvent malade de l'absence d'une relation à l'autre. Condamner le crime et pouvoir entendre les criminels... Vaste gageure !», nous indique le réalisateur. Et Nadia Labidi Cherabi de souligner: «La force du scénario est de donner un sens au combat des victimes pour se reconstruire, vivre et rester dignes. Le réalisateur a laissé pressentir dans ses précédentes réalisations une écriture cinématographique et des choix esthétiques riches de sens et de signification [...] La lecture du scénario laisse déjà entrevoir... visualiser... et entendre ce que sera le film. Un film tout en nuances qui perçoit dans la violence de l'un la souffrance qu'il inflige à l'autre soi, le film en parlant des autres parlera de nous». Et d'expliquer aussi : «Le réalisateur s'est éloigné du récit ponctuel pour aller vers l'exploration de l'humain. Il observe à la fois le groupe d'hommes qui a déferlé sur le bidonville habité par des femmes seules et qui sont devenues de ce fait les victimes expiatoires d'une colère longtemps contenue et s'approche au plus près des victimes pour entendre dans les battements de leur coeur leur muette souffrance et recueillir les murmures de l'une d'entre... Battues, torturées, violées, ces femmes seules, encore plus seules après le viol, ont subi l'outrage et l'humiliation d'être rejetées par leurs familles après ce «fait divers.» Afin de rendre compte de «l'indicible», un concept visuel bien étudié sera mis en place, nous révèle-t-on. La première partie sera montrée en plus long alternant avec des plans serrés sur les différents protagonistes car ils seront très proches dans ce climat hostile tant géographiquement que physiquement. Les principaux personnages sont tenus par Rym Tackoucht, visage connu du petit écran (dernièrement dans Babor Dzaïr...) dans le rôle de la victime, Kahina Saïghi qui campe le rôle de son amie (une comédienne qui a déjà fait preuve de ses talents de comédienne mais aussi de danseuse de tango à l'étranger et notamment en France) et Farid Bentoumi, dans la peau de son amoureux. Trois jeunes acteurs qui ont marqué le lancement de ce film lors de cette cérémonie à laquelle ont assisté outre M.Hamraoui Habib Chawki, directeur de l'Entv, un nombre important de cinéastes et de comédiens. filmer l'horreur, se veut ainsi déchiffrer les conditions qui mènent certains individus en marge de la société à commettre l'abominable crime. C'est aussi établir un diagnostic et suivre l'après-choc. Aussi, nous indique-t-on, outre le choix de la lumière, une intention claire dans le traitement du temps (long et étiré) et cadre (serré proche de la terreur, des yeux) sera employé, pour que le film donne toute son intensité. La bande son aura une place prépondérante ainsi que les bruits aussi bien de la ville que ceux de la vie. La musique est signée Warda El Djazaïria. Pour une fois, on osera filmer le dénuement et l'indicible le plus total à l'ombre des puits de pétrole, de l'opulence donc. Une vision neuve et vraie car tirée de la réalité profonde pour s'intéresser aux gens.