En dépit du repli observé hier, les experts n'excluent pas une nouvelle poussée vers les 75 dollars. L'or noir risque de devenir sombre. Le marché mondial s'affole. Jeudi dernier, le prix de baril de Brent de la mer du Nord, pour livraison en juin, a franchi, pour la première fois, la barre des 74 dollars à Londres. Les cours sont montés jusqu'à 74,22 dollars, un record jamais égalé. En dépit du repli observé hier, les experts n'excluent pas une nouvelle poussée vers les 75 dollars. Cette augmentation est en fait nourrie principalement par l'inquiétude suscitée par le bras de fer opposant Washington à Téhéran, autour du programme nucléaire iranien. Malgré les assurances données par l'Iran selon lesquelles l'uranium enrichi servira à des fins civiles, il n'en demeure pas moins que les pays occidentaux, à leur tête les Etats-Unis, affirment que le pays a des intentions militaires. Washington a même indiqué ces derniers jours qu'il n'écartait pas l'option d'une intervention militaire en Iran. Ce pays- quatrième producteur mondial de pétrole, et le deuxième de l'Opep - pourrait riposter à toute sanction prise à son encontre en interrompant ses exportations (2,7 millions de barils par jour (mbj) ou en bloquant le détroit d'Ormuz, passage stratégique pour le trafic pétrolier. Justement, à propos de l'impact qu'aura ce conflit sur les cours, le président vénézuélien, Hugo Chavez, n'exclut pas un seuil de 100 dollars pour le baril de brut. Une invasion américaine en Iran aurait une forte répercussion sur le prix du brut, a averti le chef de l'Etat vénézuélien pour qui «si cela se produit, la production du pétrole va chuter et le prix continuera à augmenter». En outre, le marché reste inquiet. L'annonce, mercredi, d'une chute de plus de 5 millions de barils des stocks d'essence américains a ravivé les craintes d'une pénurie de ce carburant cet été aux Etats-Unis. Ces stocks qui sont censés se renflouer en avril, sont de 4,6% inférieurs à leur niveau d'il y a un an, à un peu plus d'un mois du coup d'envoi de la saison des grands déplacements aux Etats-Unis, pic saisonnier de la demande d'essence. La situation est rendue plus délicate par de nouvelles normes aux Etats-Unis sur la composition de l'essence, qui prévoient l'utilisation de l'éthanol comme additif, et non plus du Mtbe, jugé cancérigène. Or, le marché craint qu'il n'y ait pas suffisamment d'éthanol pour alimenter les raffineries, car ce biocarburant, notamment produit à base de maïs ou de sucre, est très difficile à acheminer, ne pouvant être transporté par oléoduc. Autres dossiers qui viennent comme pour ajouter de l'huile sur le feu, ce sont ceux des conflits qui s'exacerbent en Irak et les violences communautaires qui s'accentuent au Nigeria. Aussi, la situation devient plus que jamais inquiétante avec le spectre d'une nouvelle saison des ouragans - très actifs dans le Golfe du Mexique. Rappelons qu'en août 2005, le passage dévastateur des cyclones Katrina et Rita dans la région, avait envoyé les cours à des niveaux record. Ce phénomène préoccupe grandement le marché. Par ailleurs, le ministre qatari de l'Energie, Abdallah Ben Hamad Al Attiyah, a affirmé que l'Opep était impuissante face à l'actuelle flambée des cours du brut. «L'Opep a, depuis bien longtemps, laissé au marché le soin de réguler les prix, et il lui est extrêmement difficile d'influer sur les tendances des cours», a indiqué le ministre qatari de l'Energie, dont le pays est membre de l'organisation. Celle-ci a tenu ce week-end une réunion informelle à Doha en marge du 10e Forum international de l'énergie prévu du 22 au 25 avril.