Nous sommes à la veille de l'entame de la campagne électorale pour le scrutin législatif du 12 juin prochain. Le marathon juridique et pré-électoral pour des milliers de candidats, partisans et indépendants, a donc été sanctionné par un quitus délivré par l'Autorité nationale indépendante des élections (Anie). Ce «pass» leur ouvre le droit à une compétition politique inédite dans l'histoire de l'Algérie indépendante. D'abord parce qu'elle repose sur une loi électorale qui a ouvert grandes les portes à une nouvelle génération de politiques, ensuite en raison d'une représentation très visible de la société civile et enfin, par l'adoption du principe de la liste ouverte. Ce sont là, trois mesures légales qui font du prochain scrutin une séquence politique particulière qui n'a pas son précédent dans l'Histoire de l'Algérie indépendante. Après avoir réussi l'examen de passage de l'Anie, la majorité des partis en lice qui présentent 646 listes de candidatures pour le scrutin, a révélé, hier, ses programmes et ses ambitions dans la course électorale. Ainsi, Jil Jadid, TAJ, FJD, El Islah et bien d'autres formations politiques ont annoncé la couleur. Présents tous dans une grande majorité de wilayas, ils affichent des intentions politiques qu'ils qualifient de légitimes et réalistes. De toutes les conférences de presse animées hier, par les leaders de ces partis, on n'a pas entendu un discours surréaliste ou mensonger. Il semble donc qu'au niveau des partis, les discours de campagne seront réalistes et sans fausses promesses. Du côté des listes indépendantes qui forment, soit dit en passant, la majorité de l'offre électorale, il est impossible de se faire une idée précise, mais l'on s'attend à des campagnes de proximité qui s'intéresseront à des problématiques de développement local. «L'intrusion» des indépendants dans le débat politique national donnera plus de visibilité aux territoires au sein de la nouvelle Assemblée populaire nationale. Dans nombre de cas, il n'y aura pas de direction nationale pour recentrer le débat ou dresser des priorités ou encore donner des consignes de vote. Chaque député indépendant se donnera comme mission prioritaire, celle de défendre sa wilaya, ce qui promet un contrôle plus strict de l'action du gouvernement à l'intérieur du pays. Mais en attendant de connaître le profil de la nouvelle APN, les 837 listes indépendantes demeurent un mystère pour les observateurs de la scène nationale et un objet de curiosité pour une opinion publique qui voudrait voir ces députés plus proches des citoyens que des gouvernants. Les prochaines élections présentent ainsi une «architecture politique» qui peut réserver pas mal de surprises, tant au niveau des urnes que dans la pratique législative, où l'on aura dans les différentes commissions des visages nouveaux, avec des idées nouvelles et pourquoi pas originales. Il reste que l'opinion nationale aura l'opportunité d'avoir quelques idées sur les profils des nouveaux députés à travers une campagne électorale qui sera forcément différente de toutes les précédentes. L'obligation de respect des mesures sanitaires, l'absence de la scène des forces de l'argent et l'inexpérience de beaucoup de jeunes candidats dans la conduite d'une campagne électorale traditionnelle, augurent d'une forte implication des réseaux sociaux dans les débats électoraux. Il n'est pas dit, cependant, que le recours à l'Internet soit la seule voie pour atteindre les électeurs, mais il est clair qu'il est absolument incontournable. De fait, les candidats qui sont eux-mêmes influenceurs auront une longueur d'avance sur leurs adversaires. Parmi ces derniers, il y en aura certainement qui voudront s'appuyer sur les réseaux de quelques «youtubeurs» ou «facebookeurs», dont ils sont eux-mêmes adhérents. De là à dire que les stars algériennes du Web auront leur mot à dire dans la campagne qui s'annonce en partie vituelle, il n'y a qu'un pas que beaucoup d'observateurs de la Toile algérienne n'hésiteront pas à faire.Cette particularité «cybernétique» vient clore la liste des inédits du prochain scrutin où la chasse aux électeurs sera «féroce», plus sur le Net que dans les salles de meetings et dans les places publiques. Il n'en demeure pas moins que les réseaux sociaux peuvent aider, mais quelle que soit la popularité des candidats, il leur faut le contact avec les Algériens pour les séduire. Ce ne sera pas aisé, en ces temps où les partisans du boycott ont la voix qui porte, autant sur le Net que dans la vie réelle.