Quinze ans se sont déjà écoulés depuis qu'El Hachemi Guerouabi, monument de la chanson chaâbie, nous a quittés. Il est parti le 17 juillet 2006. Le vide laissé par ce géant à la voix unique est immense. Il est irremplaçable. Il a certes, laissé dans son sillage une infinité d'artistes au talent certain. Ces derniers l'imitent. Ou plutôt tentent de l'imiter. Mais Guerouabi est inimitable. Youcef Dris, son neveu et également son biographe, a écrit à l'occasion de ce triste anniversaire: «Le 17 juillet est un triste anniversaire, celui de la mort de notre grand maître de la chanson chaâbie. L'Algérie, le Maghreb et l'ensemble des amoureux de la chanson populaire (châabie) ont perdu un de leurs artistes les plus appréciés. El Hadj El Hachemi Guerouabi, icône de la chanson, du théâtre, de la télévision et des fêtes et représentations festives, est décédé le 17 juillet 2006 à 68 ans. Une icône incontournable du chaâbi Guerouabi nous a quittés pour un monde meilleur, où son humanité, son style et sa voix inimitables, son talent extraordinaire brilleront pour toujours dans nos mémoires.» Youcef Dris ajoute qu'avec la disparition d'El Hachemi Guerouabi, s'en est allé le grand interprète de la chanson algérienne: «Un artiste de grand talent, passionné et humain qui nous a accompagnés toute une partie de notre vie.» El Hachemi Guerouabi est l'un des piliers de la chanson chaâbie aux côtés du Cardinal El Hadj Mhamed El Anka, Amar Ezzahi et Boudjemaâ El Ankis. Son parcours artistique a été flamboyant. En si peu de temps, il a réussi à s'imposer comme le numéro un du chaâbi auprès des jeunes mélomanes de l'époque qui avaient du mal à être conquis par le chaâbi puriste et authentique tel qu'interprété par le Cardinal El Anka et d'autres grands artistes de la même sève que cet autre géant de ce style. Guerouabi, en choisissant de donner un coup de fraîcheur à ce genre en lui insufflant un esprit «jeune», a réussi de fort belle manière. Guerouabi, pour ce faire, allait passer des qacidate relativement longues et aux textes poétiques difficiles à saisir aux courts poèmes dont le thème de l'amour allait occuper une place privilégiée. Et c'est ce qu'attendaient justement les mélomanes jeunes. Sur le plan musical, il s'est abreuvé du génie intarissable de Mahboub Bati qui, lui, a composé des chansons mythiques qui, allaient bouleverser la scène artistique algérienne avec des titres qui devinrent vite des chansons mythiques. Beaucoup de chansons interprétées par Guerouabi sont devenues des hymnes à l'instar de El warka, Lbarah, Allo allo, Goulou l nass, etc. Une infinité de thèmes Guerouabi a abordé une infinité de thèmes avec un style et un lexique qui étaient beaucoup plus accessibles, surtout pour les jeunes générations. Il a chanté beaucoup sur l'amour de la femme, l'exil, l'amitié, la trahison et bien évidemment sur la spiritualité religieuse musulmane. Il a chanté sur l'amour de la patrie, et sa chanson culte dans ce registre, n'est autre que «Allo, allo». Un exilé ne peut pas retenir ses larmes en écoutant cette chanson nostalgique quand elle est merveilleusement portée par la voix sublime de Guerouabi. Tout en traçant sa propre trajectoire dans le chaâbi moderne, Guerouabi n'a jamais abandonné le chaabi authentique et pur. En digne élève du maitre El Anka, il a continué à interpréter magistralement et à enrichir constamment avec des improvisations dignes d'un grand artiste, les célèbres qacidates du malhoun dont les indémodables et envoûtantes: Youm El djemaâ, El Harraz, Kolo l yamna, Mat tdoum el hekma et la liste est encore longue. Quinze ans après son décès, suite à une longue maladie, la voix de Guerouabi, l'estime grandiose qu'il a auprès des mélomanes et ses chansons n'ont pris aucune ride. Guerouabi est tout simplement un artiste immortel.